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William, prince du Sporting
Après Paulo Futre, Luís Figo, Cristiano Ronaldo et Nani, le Sporting a accouché d'une autre perle, William Carvalho. Étincelant depuis le début de la saison, le milieu polyvalent du Sporting est dans le viseur de plusieurs mastodontes européens. S'il ne devrait pas partir cet hiver, Carvalho devrait filer en été. Surtout s'il brille au Brésil.
Lucho González est un homme de goût. Mis à part quelques ratés, comme ce numéro 3 tatoué sur le cou, l’Argentin se trompe rarement. Et ce soir-là, el Comandantea de nouveau vu juste. Le 27 novembre, l’ancien Marseillais demande à un joueur aux traits de lycéen d’échanger son maillot avec lui, juste après le coup de sifflet final d’un classico remporté 3-1 à domicile face au Sporting. Un geste rare, voire inhabituel, mais proportionnel à la prestation livrée par le milieu polyvalent des Leões. Quel gosse de 21 ans avait auparavant malmené à ce point le milieu de terrain du FC Porto dans un tel match ? Était-ce simplement un coup de chance ? Non. Lucho était convaincu du contraire. Et il a eu raison de parier sur lui. Lui, c’est William Carvalho, meilleur joueur des mois d’octobre, novembre et décembre en Liga Sagres et patron de l’entrejeu du Sporting. En une demi-saison, l’international portugais a conquis tout un pays, gagné le droit d’être comparé à Patrick Vieira et attiré l’attention de mastodontes européens tels que Manchester United, Arsenal, le Real ou le Barça. Si les jours du natif de Luanda sont comptés à Lisbonne, son président Bruno de Carvalho ne souhaite pas le lâcher cet hiver, « sauf offre ridiculement haute » , c’est-à-dire une offre de 45 millions d’euros, montant de la clause libératoire du bonhomme.
Benfica, Eusébio et le coup de fil de Nani
Quel que soit le futur du prodige lusitanien, le Sporting est bien content de pouvoir compter William Carvalho dans ses rangs. Car le bougre a bien failli filer chez le rival il y a un bon moment. Voilà huit ans que Bruno Maruta, chargé du recrutement des très jeunes à Benfica, débarquait chez les Carvalho afin de convaincre le milieu de terrain de 13 ans de rejoindre la Luz. Le gamin évolue à Sintra, à quelques kilomètres de Lisbonne, et Maruta le surveille activement depuis un trimestre. C’est après un match du Mira Sintra face au Sporting que le dirigeant benfiquista décide de passer à l’action. Si son équipe a perdu, William a survolé la partie en marquant notamment un pion. Rien de transcendant, sauf si l’on prend en compte que le prodige est surclassé chez les U17 de son équipe. Maruta ne peut laisser passer cette occasion, et, par chance, l’entraîneur de William Carvalho est un sympathisant du SLB. Quelques heures et deux ou trois coups de fil plus tard, Maruta débarque, bout de papier et stylo à la main, pour convaincre sa cible de le rejoindre. William fixe le contrat, tremble de peur et finit par refuser. Il ne veut pas Benfica. Il veut le Sporting, son club de cœur. William est Eusébio, mais dans l’autre sens.
Et ça tombe bien, car les Leões le veulent aussi. Moins roublards que les dirigeants benfiquistas, ceux du Sporting respectent tout un protocole avant de faire signer le jeune homme chez eux. Et comme d’habitude, tout passe par un homme, Aurélio Pereira. Responsable du transfert de Cristiano Ronaldo du Nacional au Sporting, le recruteur s’occupe de contacter la famille de William Carvalho et fixe un rendez-vous qui aura lieu quelques jours après la réunion secrète avec les dirigeants de Benfica. Aurélio Pereira est alors à peu près sûr de faire signer le natif de Luanda, mais décide d’allier le fond et la forme. Le recruteur chevronné demande au môme quel est son joueur préféré au Sporting. Ce dernier avoue avoir un faible pour Nani sans comprendre pourquoi on lui pose cette question. Quelques heures plus tard, son idole l’appelle pour lui annoncer la bonne nouvelle. Désormais, William Carvalho est un Leao, un vrai.
Une option sérieuse pour le Mondial
Malheureusement pour lui, Nani est transféré à Manchester un an après le fameux coup de téléphone. Son rêve de jouer avec son idole s’évapore, mais il ne se décourage pas. Si le Sporting ne lui offre pas cette chance, il ira la chercher comme un grand. C’est dans la Friends Arena de Solna, à l’occasion des barrages retour de la Coupe du monde que son souhait se réalise. Le milieu de terrain du Sporting remplace Raul Meireles à la 73e minute d’une rencontre que Nani aura traversé comme un fantôme. Admiratif mais loin d’être passif, le petit William donne tout pour sa première sélection et peut même se targuer d’être dans le coup sur le troisième pion de Ronaldo. En l’espace de quatre mois, le fanboy de Nani est devenu la tour de contrôle du milieu des Leões, le meilleur joueur du championnat portugais et surtout un potentiel titulaire en équipe nationale en vue du Mondial.
Certes, William Carvalho ne compte qu’une sélection. Certes, c’est sa première saison à ce niveau-là après deux prêts à Fatima et au Cercles Bruges. Mais la sérénité et la maturité affichées par le Portugais de 21 ans laissent songeur. Sans parler des qualités physiques et techniques du bonhomme, capable de conserver le ballon dans n’importe quelle position, mais aussi de se projeter rapidement vers l’avant balle au pied. C’est à se demander comment les anciens entraîneurs du club ont pu le louper. En se lançant dans le recrutement de joueurs étrangers il y a deux saisons, le Sporting n’a peut-être pas seulement perdu de l’argent. Il a aussi perdu une ou deux années de William Carvalho. C’est beaucoup. C’est trop. Surtout quand on sait que les perles issues de l’academia restent très peu de temps à Alvalade une fois révélées au grand public. Sauf grosse surprise, William s’envolera vers d’autres cieux après la Coupe du monde au Brésil. En attendant, le Sporting peut savourer.
par William Pereira