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WherEver, whenEver
Quand il le souhaite, où il le souhaite, Éver Banega peut faire partie de cette catégorie des grands joueurs. Un come-back au premier plan qu'il doit à son retour dans les bras d'Unai Emery et à un bref passage dans son Rosario natal. Rencontre avec un furieux repenti.
Rosario a pris l’habitude de festoyer à l’heure barcelonaise, pour ne pas dire blaugrana. Le 11 août dernier n’échappe pas à la règle. Dans un stade Boris-Paichadze de Tbilissi plein à craquer, le FCB de Lionel Messi, auteur d’un énième doublé, s’adjuge une cinquième Supercoupe d’Europe. Le premier frisson de la soirée estampillé Rosarino sort pourtant des pieds d’Éver Banega. Après trois petits tours de cadran, l’international argentin enroule à merveille son coup franc dans le petit filet de Marc-André ter Stegen. Un golazo que répète, par deux fois, son comparse et ami Messi dans les minutes qui suivent. Un quadruple Ballon d’or qu’il connaît depuis son enfance : « On était très jeunes, mais il était déjà bien plus fort que tout le monde. On pouvait voir qu’il avait ce plus de qualité qui ne s’apprend pas. Il était déjà différent. Les années ont passé, il est arrivé jeune à Barcelone, mais il n’a jamais changé. En tout cas pas avec moi. » En soi, le contraire d’un Éver Banega qui, tout au long de ses sept années en Liga, n’a cessé de muter. Avant, aujourd’hui, d’avoir enfin trouvé à Séville l’équilibre qu’il a toujours recherché.
Banega : « Je suis parti trop jeune »
« Je ne vivais pas dans un quartier tranquille. Il y avait de tout. Par chance, tous mes amis d’enfance y sont partis, comme moi. Mes parents et mes frères sont toujours restés vigilants. Je ne me suis jamais mis dans des situations délicates, mes frères non plus. Je passais mon temps à jouer au foot. Dès que j’ai pu partir du quartier, je l’ai fait. Sans cogiter. J’avais 14 ans. » Lorsque Éver Banega évoque son enfance à Rosario, ses traits se détendent, sa voix se pose. Lui, le grand espoir du football argentin à son arrivée en 2008 à Valence, quitte très jeune le cocon familial. Et l’Argentine. Dès ses dix-sept printemps, après une seule année en pro à Boca, il s’envole pour Mestalla contre 17 millions d’euros. Un départ précoce qui lui a fait tourner la tête. « Je pense que je suis arrivé trop jeune, juge-t-il avec le recul. D’un jour à l’autre, tu as tout à disposition, tout ce qui avant te semblait impossible à avoir… Surtout, tu n’as pas ta famille à côté qui te dit « Ça, tu peux le faire, ça non. » Tu dois t’habituer à vivre comme tu peux, comme un grand. » D’où ses quelques dérapages avec les spiritueux ou les webcams…
Malgré une adaptation longuette, durant laquelle il part en prêt du côté du Vicente-Calderón – une période qu’il met à profit pour se tatouer l’écusson de Newell’s, « sur le mollet, pour que les gens ne le voient pas au premier coup d’œil » -, il trouve grâce auprès des supporters chés à partir de 2009. Les années qui suivent lui confèrent un statut d’indéboulonnable du côté de Valence. Et ce, même si quelques polémiques viennent entrecouper sa progression. Ainsi, à l’été 2011, une photo circule sur les réseaux sociaux où, en compagnie de ses amis, il arbore un maillot du Real Madrid. La mécanique à polémique espagnole se lance et il est obligé de s’excuser publiquement. « C’est un maillot que m’avait donné mon ami Gago. Je l’ai mis parce que j’allais jouer au foot avec mes frères, c’est tout. Si c’était à faire, je le referais » , jure-t-il encore aujourd’hui. Quelques semaines plus tard, un nouvel épisode l’écarte pour de nombreux mois des prés. Alors qu’il fait le plein de son 4X4, ce dernier lui roule dessus et lui massacre le tibia : le début de la fin de sa carrière à Mestalla.
Six mois en Argentine et un amour pour le football retrouvé
Dès lors, les coachs successifs des Chés ne lui octroient plus leur confiance. À tel point qu’en janvier 2014, il franchit l’Atlantique. « Lors de mon premier match avec Newell’s, je joue contre Boca Juniors, hallucine-t-il toujours. Nous avons fait 0-0, mais ce que je retiens, c’est ma présentation. Dans la semaine, le club a décidé de me présenter aux supporters. De mémoire, il devait y avoir 15 000 personnes ! Je pensais à tout sauf à recevoir un tel accueil. C’était la folie, des moments que tu ne peux vivre que’en Argentine. » Cet intermède de six mois auprès de sa famille conclu, il retrouve un point de chute en Espagne. À Séville plus précisément, où il retrouve celui qui a toujours cru en lui : « Qu’Unai Emery soit là, alors que je l’ai eu pendant longtemps à Valence, ça a fait son effet. Mais nous avons une relation simple : celle d’un joueur envers son entraîneur. Je fais ce qu’il me dit. » Et il le fait bien. Depuis son arrivée au Sánchez-Pizjuán, Banega enchante Sevillistas, amoureux de la Liga et le Tata, qui lui a fait retrouver les joies de l’Albiceleste aux côtés de son ami Messi. Et quand il le veut, Ever n’a que peu d’égal.
Par Robin Delorme, à Madrid