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Werder Brême, les miraculés
Relégable avant la dernière journée, en ballottage défavorable au coup d'envoi, le Werder Brême a arraché à Heidenheim un maintien encore impensable il y a quelques semaines. Un petit miracle, et surtout un avertissement sans frais pour une équipe qui navigue en eaux troubles depuis bien trop longtemps.
C’était, pour Florian Kohfeldt, l’un de ces soirs où « on écrit l’histoire ». Pas sûr que ce maintien ric-rac, obtenu la trouille au ventre et à la faveur de la fameuse règle du but à l’extérieur comptant double (2-2), dans un décor fleurant bon le traquenard, figure en si bonne place dans les bouquins retraçant la grande et belle histoire du Werder Brême. Mais ce nul, arraché dans la douleur sur la pelouse d’Heindenheim, au terme d’un final de folie, lui permet au moins de continuer à l’écrire en Bundesliga. Un championnat au sein duquel aucune équipe, pas même le Bayern Munich (55 participations) ou le Borussia Dortmund (53), n’a disputé autant de saisons que les Grün-Weiss qui, depuis leur création en 1963, n’ont manqué qu’une seule édition, en 1980-1981. En septembre prochain, le club rhénan sera donc sur la ligne de départ pour la 57e fois, la quarantième consécutive. Et autant le dire franchement : c’est un petit miracle.
Le miracle de Cologne
Dans la zone rouge douze fois cette saison, barragistes à six reprises et englués dans les trois dernières places à partir de la seizième journée, mi-décembre, et une humiliation à domicile face à Mayence (0-5), les hommes de Florian Kohfeldt ont dû attendre la 34e et dernière journée du championnat pour arracher leur ticket pour les barrages. Un sursis d’autant plus inespéré que les Werderaner accusaient un retard de deux points sur Düsseldorf et une différence de buts clairement défavorable (-32 contre -28 pour le Fortuna) au coup d’envoi de cette ultime levée. Et ce que personne ne voyait arriver arriva : alors plus mauvaise attaque du championnat et vainqueur jusque-là d’une seule rencontre à la maison, le Werder a contre toute attente fait exploser Cologne au Weserstadion (6-1), quand Düsseldorf s’effondrait à Berlin, sur le terrain de l’Union (3-0). Si l’histoire s’est écrite à un moment, c’est probablement à celui-là.
Géants cherchent rebond
Restait à passer l’écueil du barrage. Généralement – et logiquement – favorable aux clubs de l’élite depuis son instauration en 2008 (sur onze barrages, seules trois équipes de deuxième division étaient parvenues à monter), celui-ci avait été fatal l’an dernier à Stuttgart, un autre grand du foot allemand, dominé par l’Union Berlin. Déjà relégué en 2016, Stuttgart avait alors rejoint dans l’antichambre Hambourg, le rival et voisin du Werder Brême, tombé pour la première fois de son histoire en 2018.
Stuttgart, Hambourg, mais aussi Cologne (premier vainqueur de la Bundesliga en 1964) et Nuremberg (deuxième club le plus titré d’Allemagne avec neuf titres) : autant de géants du foot allemand que le Sport-Verein, ses quatre sacres nationaux (1965, 1988, 1993, 2004) et ses 1900 rencontres dans l’élite étaient donc tout proches de rejoindre. Qui plus est après l’aller (0-0), où les coéquipiers de Milot Rashica sont comme souvent restés muets, mais ont, maigre consolation, signé leur quatrième clean sheet de la saison.
Avertissement sans frais
Réunir autant de clubs historiques aurait constitué une sacrée pub pour la 2. Bundesliga, où Hambourg, coiffé par Heidenheim à deux journées de la fin, séjournera un an de plus. Norman Theuerkauf (buteur d’entrée contre son camp), Ludwig Augustinsson (auteur du second but werderaner) et le Werder, en ballottage défavorable au coup d’envoi, en ont décidé autrement (2-2, score final). Un dénouement heureux qui ne doit pas occulter la spirale dans laquelle le Werder, jamais mieux classé que dixième cette saison, est englué depuis une bonne décennie déjà. Absents des compétitions européennes depuis la saison 2010-2011 et dans le top 10 seulement trois fois ces dix dernières saisons, les Grün-Weiss jouent depuis trop longtemps avec le feu. Florian Kohlfeldt refusait de prendre ce match couperet comme un fardeau ? Pourvu qu’il lui serve de tremplin, ainsi qu’à son équipe. Ce qui définit les miracles, ne l’oublions pas, c’est aussi leur rareté.
Par Simon Butel