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Wayne Rooney, bélier alpha

Par Douglas de Graaf
5 minutes
Wayne Rooney, bélier alpha

À 34 piges, Wayne Rooney fait désormais les beaux jours de Derby County (Championship). En tant que joueur, bien sûr, mais aussi en tant qu’entraîneur adjoint de Phillip Cocu chez les Rams (Béliers, en VF). Une double vie que le meilleur buteur de l’histoire de Manchester United gère à merveille... au moment de retrouver son ancien club au 5e tour de FA Cup, ce jeudi. Et attention : le bélier ne demande qu'à se transformer en diable pour encorner les Mancuniens sans vergogne.

Le concept d’entraîneur-joueur est une tuerie. Edgar Davids qui s’arroge le n°1 de maillot à Barnet (D4 anglaise), Ryan Giggs qui se fait lui-même entrer en jeu avec Manchester United contre Hull City… Dans l’assentiment général de leurs coéquipiers (ou subordonnés, c’est selon), ces monarques-sujets profitent à fond de leur pré-retraite. Curieusement, le concept d’entraîneur-joueur adjoint se fait lui beaucoup plus rare. Confère-t-il moins d’avantages aux principaux intéressés ? Toujours est-il que c’est le challenge ardu que Wayne Rooney a choisi de relever à Derby County. Sans brûler les étapes. Et en restant lui-même sur le terrain : un leader de jeu et de vestiaire capable de faire la différence à tout moment.

Kinder County

L’ancien wonderkid d’Everton le reconnaissait lui-même en conférence de presse au moment de prendre ses fonctions dans les East Midlands : il est ici pour « apprendre » un métier d’entraîneur qu’il « veut exercer » à moyen terme. Apprendre, oui, mais tout en continuant à donner des cours (pratiques) à ses camarades de classe. Et à ses adversaires. Un poste idéal pour concilier ses deux volontés : l’une, plutôt rationnelle et en forme de suite logique (devenir entraîneur). L’autre, irradiant tout droit de son cœur et pas dénuée d’une certaine rancœur : prouver qu’il n’est pas ce footballeur fini que certains enterraient déjà après sa saison à Everton (2017-2018).

Avec autant de casquettes et de défis à relever, Rooney saurait-il encore où donner de la tête ? Contre toute attente, oui. Depuis son premier match disputé en tant que joueur des Rams, le 2 janvier, « Wazza » a changé le visage de son équipe. L’avant-Rooney : 7 victoires en 25 matchs et une piteuse 17e place au classement. L’après-Rooney : autant de victoires supplémentaires (dont deux en FA Cup), mais en… 14 matchs seulement, agrémenté d’une 13e place plus honorable. Et pour ceux qui doutaient de sa capacité à tenir le rythme dans un championnat aussi exigeant que le Championship, Rooney s’est chargé de répondre avec ses poumons (100% de titularisations et de matchs disputés jusqu’à son terme, à l’exception d’une sortie en standing-ovation à la 76e minute lors du victoire 4-0 face à Stoke City marquée par un but et une passe décisive de l’ancien futur chauve). Ainsi qu’avec ses pieds – 4 buts, 2 passes décisives. C’est dit : le trentenaire s’éclate à un poste de milieu offensif qu’il occupait généralement à Everton, mais pas en MLS à DC United (jusqu’en octobre 2019).

Et sur le banc ? Si la hiérarchie est claire (c’est Phillip Cocu, et non Rooney, qui dirige les séances d’entraînement et effectue les modifications tactiques lors des mi-temps), le meilleur buteur de l’histoire de Manchester United est très loin d’être un simple messager. « Avant les rencontres, il est avec le staff pour les préparer, analyser l’adversaire, choisir les vidéos que l’on veut étudier… Il est très impliqué dans la tactique de l’équipe et dans notre manière d’aborder le jeu. Je lui demande toujours son opinion » , relatait le manager néerlandais en conférence de presse.

Wazza a ri

Tactiquement, le natif de Liverpool se contente pour l’instant de réglages et d’ajustements. Mais c’est surtout humainement que Rooney devrait bientôt trouver sa place au milieu de Frank Lampard (révélé sur le banc de… Derby County avant de rejoindre Chelsea) et Steven Gerrard (Rangers). Sa recette : un sens de la transmission tout en humilité. « Il va avoir une conversation sans rapport avec le foot, puis établir un lien pour aborder ce qu’il veut dire, à propos du placement d’un joueur ou d’une passe » , affirme un membre du staff cité par le journal local Derbyshire. Même son de cloche du côté de son jeune coéquipier Jason Knight (19 ans) : « Il est top, surtout avec nous les jeunes joueurs, et c’est révélateur de la manière dont on performe en ce moment. C’est toujours génial d’entendre un pro comme Wayne dire des choses positives à ton sujet. »

Au rythme auquel Rooney avance, Ole Gunnar Solskjær peut déjà commencer à se faire du souci pour son poste. En attendant, dans l’optique du match, « Baby-face killer » est surtout préoccupé par le joueur, encore capable de belles folies selon lui. « Il est toujours dangereux dans et aux abords de la surface, et dans la manière de diriger le jeu. Il va vouloir montrer que le vieux singe peut toujours faire des dégâts » , estimait le Norvégien en conférence de presse. Rooney, lui, ne s’en fait pas toute une histoire. « C’est toujours étrange de jouer contre une ancienne équipe, mais c’est le football. J’aime Manchester United et je veux que l’équipe réussisse ; mais pour ces 90 ou 120 minutes, je veux qu’ils perdent et que nous passions au tour suivant. C’est un grand jour pour le club et un gros challenge pour nous » , confiait l’idole des Three Lions à RamsTV. Des déclarations qui proviennent davantage de la bouche du Rooney entraîneur que du Rooney joueur, signe que « Wazza » est déjà tourné à fond vers sa future vocation. À moins qu’une énorme performance contre Manchester United ne le contraigne à repousser sa reconversion de quelques mois. Une option qui ne serait pas non plus pour lui déplaire.

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