- Un jour, un transfert
- Épisode 26
Waris au FC Lorient : le tour de Majeed subi par le Stade rennais
Actuellement sans club après deux ans et demi au RC Strasbourg, Majeed Waris a connu des périodes plus fastes dans sa carrière. Comme ce mois d'août 2015 durant lequel le Stade rennais et le FC Lorient s'étaient battus pour sa signature, jusqu'à une scène culte à l'aéroport de Roissy qui avait vu les émissaires des Merlus griller leurs homologues rouge et noir in extremis. Retour sur un imbroglio durant lequel le SRFC s'est voilé la face.
Dans The Terminal, projeté dans les salles obscures en 2004, Viktor Navorski – interpreté par Tom Hanks – se retrouve bloqué au cœur de l’aéroport John-F.-Kennedy de New York avec aucune porte de sortie. À peu près tout le contraire de Majeed Waris, qui avait l’embarras du choix le 5 août 2015 à l’aérogare de Roissy-Charles-de-Gaulle alors qu’il atterrissait en provenance de Turquie. Ce dimanche-là, l’attaquant – qui sort d’une saison moyenne en Süper Lig, avec Trabzonspor – revient en France pour mettre le cap à l’ouest et poser le pied en Bretagne.
En début de semaine, L’Équipe a fait savoir que le joueur de 23 ans avait décidé de signer au Stade rennais (qui en avait fait sa priorité), puis Le Télégramme a carrément annoncé l’arrivée du Ghanéen en Ille-et-Vilaine à la suite d’un accord trouvé avec l’équipe de Trabzon à hauteur de 3,5 millions d’euros pour une signature qui doit se faire dès le jeudi. Présents à Paris pour venir à la rencontre de l’ex-Valenciennois à la sortie de son avion, les émissaires rennais ne mettront pourtant jamais la main sur lui.
Fax et querelle de clocher
Car en coulisses, le FC Lorient – lui aussi intéressé par ce profil, pour prendre la suite de Jordan Ayew – a réussi à arracher la prolongation en faisant grimper les enchères (aux alentours de quatre briques) afin de décrocher le pactole au buzzer. Waris vient bien signer en Bretagne, mais pas pour enfiler la tenue rouge et noir. Résultat : c’est dans la voiture lorientaise qu’embarque le Black Star, alors que les rumeurs le disaient « guère emballé par l’idée d’évoluer sur une pelouse synthétique ». « Trabzonspor nous avait donné son accord par fax pour le transfert, afin qu’on puisse se mettre d’accord avec le joueur et le recevoir pour la visite médicale, expliquera le lendemain Philippe Montanier, entraîneur du SRFC à l’époque, dans Ouest-France. Entre-temps, on a eu une information qui ne venait pas de Trasbzonspor qui nous disait que Lorient avait surenchéri et obtenu l’accord du club turc. Nous, on est juste allé à Paris pour vérifier la chose. On était au courant des choses, mais pas par le club turc, c’est ça qui est le plus dur à admettre. Lorient a joué son jeu de vouloir surenchérir. Nous, on n’a pas souhaité le faire, ni sur le montant du transfert ni sur le salaire demandé qui nous paraissait déraisonnable. Après, chacun fait ce qu’il veut dans sa paroisse. »
@FCLorientOff @lequipe Oui! comite accueil @staderennais pour recuperer un joueur sur un vol reserve par @FCLorientOff suite accord club
— Loic FERY (@LoicFery) August 6, 2015
Un récit « totalement faux » selon le vice-président du FCL Alex Hayes, qui donne sa version des faits dans les colonnes du même média : « Au club, on a des principes. On ne peut pas se permettre de prendre des risques financiers. C’est vrai qu’on a fait un transfert record sur le joueur. En revanche, en matière de salaire, on a une grille et on s’y est tenus. Ils n’ont, sans doute, pas accepté que Majeed opte pour le petit voisin breton. Pour eux, si un joueur a le choix entre Rennes et Lorient, il va forcément choisir Rennes. Rennes a été très fort dans sa communication. Parce que ça n’aurait pas été bien perçu de dire aux supporters :« Désolé, on s’est plantés. »Les dirigeants rennais se sont rendu compte que cette affaire tournait au vinaigre pour eux. Mais insinuer qu’on n’est pas correct et qu’on n’a pas suivi les règles, c’est inacceptable, car c’est à l’opposé de tout ce qu’on est. » Tout content d’avoir chipé un joueur à son voisin après les épisodes Sadio Diallo (en 2012) et Gelson Fernandes (en 2014) qui avaient tourné dans l’autre sens, le président des Merlus Loïc Féry mettra lui aussi les choses au clair sur RMC : « Il y a un joueur qui a décidé de rejoindre le FC Lorient. Les premiers contacts directs avec le club de Trabzonspor remontent à un peu plus de dix jours. Une première offre de notre part avait été acceptée. Quand notre dernière proposition a été acceptée, le FC Lorient a organisé le voyage du joueur. Et à l’arrivée à Paris, alors qu’on avait tout organisé, tout payé, on a eu la désagréable surprise de s’apercevoir qu’il y avait des confrères d’un autre petit club breton qui étaient à Roissy. »
Un chambrage en clôture
Alors qu’on avait un temps parlé d’une suite devant les tribunaux ( « notre accord par fax a visiblement une valeur juridique », avait lâché Montanier), l’affaire s’est arrêtée là, et Majeed Waris se relancera comme prévu du côté du Moustoir (onze buts en seulement 21 apparitions en Ligue 1, lors de l’exercice 2015-2016).
Faites comme Majeed #Waris, prenez la route du Moustoir ! ??#FCLSRFC pic.twitter.com/AVk5EUI4zg
— FC LORIENT ? (@FCLorient) October 20, 2015
Passé maître en matière de trash-talking numérique avec les années, le FCL avait également posé la première pierre de son œuvre en octobre de cette même année avant les retrouvailles entre Waris et le Stade à l’occasion du derby : « Faites comme Majeed Waris, prenez la route du Moustoir ! », pouvait-on lire, accompagné d’une image de l’avant-centre tirant la langue, sur le visuel publié par le club incitant les supporters à venir se masser en tribunes. Waris claquera au passage une passe décisive à destination de Raphaël Guerreiro, avant de planter lors des deux matchs suivants face aux Bretilliens. Pas sûr que Tom Hanks aurait fait aussi bien.
Par Jérémie Baron