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Virer Baup d’accord, mais pourquoi maintenant ?
Avoir l'avoir fièrement portée des mois durant, Élie Baup doit maintenant avaler sa casquette, visière comprise : il vient de se faire virer de son poste d'entraîneur de l'OM. Si cette décision n'attriste pas grand monde, elle pose pourtant plus de problèmes qu'elle n'apporte de solutions et fait voler en éclat une stabilité que l'OM conservait depuis 2007.
Certes, Élie Baup a été bousculé par une partie du Vélodrome hier soir suite à la très pâle copie rendue par ses joueurs contre Nantes (0-1). Certes, Élie Baup fait moins bien cette saison que l’année dernière malgré les biftons mis à sa disposition pour recruter. Certes, Élie Baup n’a pas réussi à gratter un seul petit point dans son groupe de Ligue des champions. Certes, Élie Baup a mal géré le cas Gignac et gère mal le cas Imbula. Certes, Élie Baup a souvent produit un jeu frileux et soporifique depuis son arrivée à l’OM. Certes Élie Baup, certes Élie Baup, certes Élie Baup… Pour toutes ces raisons, et sans doute pour beaucoup d’autres, l’annonce du départ de ce mal-aimé de Baup n’a pas traumatisé les Marseillais. Si cette décision ne surprend donc pas tellement sur le fond, elle interpelle sur la forme. En octobre on garde, en décembre on vire Au début de l’automne, l’OM avait enchaîné une série bien plus noire que la mauvaise passe actuelle. Après les défaites consécutives contre Dortmund, Paris, Nice, Naples et Reims, le Vélodrome grondait déjà et le Toulousain tenait exactement le même discours désabusé qu’hier soir après la défaite contre Nantes. À cette époque pourtant, tout le monde au club (dirigeants, assos de supporters, etc.) avait fait bloc derrière un coach qui avait « l’entière confiance » d’un Vincent Labrune en mode Union Sacrée. Si Baup était encore l’homme de la situation il y a quelques semaines, difficile de trouver les raisons qui font qu’il ne l’est plus aujourd’hui. À mêmes causes, conséquences différentes donc. S’il avait pu se défendre, Élie aurait sans doute dit que son équipe avait — sur le plan du jeu — livré son meilleur match de la saison contre Lille mardi soir et que contre Nantes, son groupe était à la fois cramé par l’enchaînement d’un match tous les trois jours et privé de ses deux principaux cadres offensifs (Ayew et Valbuena). Bye-bye stabilité, recoucou Anigo Si le limogeage peut donc paraître dur, voire injuste, c’est surtout l’absence de sommation de Labrune and co qui dérange. Aux dernières nouvelles, Baup n’était contesté que depuis trois jours. Quand on vire un coach, on essaie de planifier un minimum l’avenir. À défaut d’un remplaçant prêt à reprendre le flambeau sans attendre, on a des pistes, des contacts avec d’autres entraîneurs, des projets, on ne balance pas l’option José Anigo comme ça, en espérant « un choc psychologique » tombé du ciel. Qu’espère sincèrement Vincent Labrune ? Qu’après le départ du coach mal aimé, l’OM en plante trois à une équipe de Dortmund venue chercher sa qualification pour les huitièmes de C1 ? Que les joueurs blessés reviennent comme par miracle ? Cette décision n’est pas constructive, elle est destructrice. Ni le staff ni les méthodes ne sont remis en cause, on présente simplement le pauvre Élie « bouc émissaire » Baup en victime expiatoire en espérant que cela suffise.
Six ans de calme Depuis l’arrivée de Gerets en 2007, cela faisait six ans — six belles années — que l’OM connaissait une relative stabilité. Les dirigeants successifs (Pape Diouf, J-C Dassier et Vincent Labrune jusqu’à maintenant) avaient tous signé un pacte tacite : ne jamais tirer sur les ambulances et faire bloc autour de l’entraîneur dans la tourmente. Cette stratégie a porté ses fruits, puisque Marseille a ces dernières années retrouvé un standing oublié pendant trop longtemps. Même en 2011-2012, lorsque la formation entraînée alors par Deschamps enchaînait les tuiles et terminait à une triste dixième place, la réflexion et l’esprit de bonne gestion primaient sur la précipitation et le changement d’entraîneur était opéré pendant le mercato estival.
Anigo en finale de Coupe de l’UEFA
Ces vertus ont été balayées par la décision de faire appel à l’intérim de José Anigo jusqu’à la trêve hivernale (au moins). Ce n’est pas tellement l’homme qui est à blâmer. Même s’il est possible de penser que cette situation va donner encore plus de pouvoir à un homme qui en a déjà trop, comment oublier que c’est Anigo qui avait amené en 2004 Drogba et les autres en finale de l’UEFA. Ce qui froisse, c’est que cette décision d’un autre temps rappelle la pire période de Marseille, celle de Christophe Bouchet et du début des années 2000. À l’époque, dans une foire d’empoigne généralisée, l’OM consommait un entraîneur tous les six mois (si ce n’est plus) et flirtait avec la relégation. En virant Baup dans la précipitation et en choisissant d’appliquer la vieille recette « le cœur et les couilles » de José Anigo, Vincent Labrune a cessé d’être ce fringant gestionnaire venu de la capitale pour apporter sa rigueur et son pragmatisme dans ce club de passion. Il répète l’histoire et cette histoire n’est pas glorieuse.
Par Pablo Garcia-Fons