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Vincent Enyeama, l’homme de foi
Taulier de Lille depuis plus de deux ans, Vincent Enyeama devrait retrouver les bois ce samedi à Guingamp. Après avoir annoncé la fin de sa carrière internationale, le Nigérian va se focaliser sur le LOSC. Portrait d'un homme qui marche avec Dieu.
« Même contre Rennes, malgré l’injustice, il est resté calme, a tenté de s’adresser à l’arbitre posément. Dans le feu d’un match, ce n’est pas forcément évident. » Pour Jean-Pierre Mottet, entraîneur des gardiens à Lille depuis près de trois décennies, pas de doute, Vincent Enyeama est une crème. « Une force tranquille, ce serait le meilleur terme pour le décrire » assure le préparateur, pour qui le portier nigérian n’a jamais besoin de se mettre en colère pour inspirer le respect. Cette sérénité à toute épreuve n’est pas anodine, car Enyeama ne marche jamais seul : « Comme tout vrai croyant, il a une relation forte avec Dieu, il marche avec Lui » , explique Aniekan Enyeama, le frère. Cette foi se traduit par des sorties dominicales à l’église évangélique à Lille, mais n’est « en rien ostentatoire, même si on voit que cela lui permet de surmonter les épreuves » , explique Mottet. Dans le Nord de la France, il a d’ailleurs connu une première saison difficile dans l’ombre de Mickaël Landreau, même si son frère assure « qu’il n’était venu que pour passer un cap dans un grand championnat mais pas pour forcément déloger un gardien de ce niveau-là. » Habitué à être indispensable tant en club qu’en sélection, le Nigérian trouve le temps long. « C’était dur pour lui, mais aussi pour ses proches, car il n’avait jamais vécu cette situation » , se souvient Aniekan Enyeama, mais comme à chaque fois, sa foi le porte car « il savait que cela allait tourner, car Dieu ne fait rien au hasard. Au final, cela l’a rendu plus fort. »
Papa Girard, copain Elana
Notamment grâce à un prêt d’un an au Maccabi Tel-Aviv en 2012-2013, mais surtout à l’arrivée de René Girard comme entraîneur à Lille, le statut de Vincent Enyeama change à l’été 2013. Alors qu’il ne lui reste plus qu’un an de contrat, le technicien en fait son titulaire au détriment de Steeve Elana. « René Girard, c’est comme un papa pour lui, il l’a remis sur les rails et ils ont un grand respect mutuel » , selon Aniekan Enyeama. Mais pour Jean-Pierre Mottet, une fois le départ de Mickaël Landreau acté, la montée en puissance du Nigérian était logique : « Son talent saute aux yeux quand on le voit, même à l’entraînement, et en plus c’est quelqu’un de très facile à vivre. » Aujourd’hui, il est d’ailleurs proche de l’une de ses victimes, Elana, avec qui il discute souvent dans la langue de Shakespeare, dans laquelle il est plus à l’aise même s’il s’exprime correctement en français. À 33 ans, il continue de montrer l’exemple aux entraînements, où il réclame régulièrement du rab ou s’impose des séances personnelles de gainage afin de rester au top. « Notre groupe de gardiens vit bien » assure Mottet, pour qui « Vincent n’y est pas étranger, car c’est une personne saine, et les autres le sentent. »
« Il voulait arrêter la sélection après le Mondial 2014 » Aniekan Enyeama, frère de
Une personne qui n’aime pas tricher et mentir, si bien qu’il a récemment dit stop aux Super Eagles après plus d’une centaine de sélections, trois participations en Coupe du monde et un titre de champion d’Afrique 2013. Afin de se focaliser sur Lille, mais aussi d’avoir l’esprit apaisé : « Il a longuement réfléchi, il voulait déjà arrêter après le Mondial 2014, mais on lui avait demandé de rester, car il n’y avait pas de relève » , assure son frère Aniekan. « Mais là-bas, c’est difficile, l’organisation n’est pas excellente, et si le sélectionneur a aussi sa part de responsabilités, c’est avant tout car Vincent n’avait plus la force de supporter certaines choses. » Des sacrifices que le joueur ne consent plus faire, d’autant qu’il a eu la douleur de perdre sa mère récemment. Parce qu’il n’est plus un bleu et que sa carrière de joueur est essentiellement derrière lui, un parcours qui aurait pu l’emmener encore plus haut selon Jean-Pierre Mottet, « s’il était venu en Europe plus jeune » . Son futur, il ne sait pas encore où le situer, mais le gardien nigérian ne serait pas forcément contre l’idée de prendre racine à Lille, « une ville qu’il aime » assure son frère. « Cela va dépendre de ce que lui propose le club » . Jean-Pierre Mottet est persuadé que son gardien, en « personne focalisée sur l’instant présent » , n’a pas encore réfléchi à sa reconversion, mais il voit en lui le potentiel d’un futur préparateur de gardien, car « il a une vraie réflexion sur le poste et de l’expérience » . Mais que les gardiens remplaçants lillois ne se réjouissent pas trop vite, car la retraite sportive de Vincent Enyeama a beau approcher, elle n’est pas forcément pour demain.
Par Nicolas Jucha