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Vincent Bessat : « J’espère sortir du monde du foot après ma carrière »
Mardi soir, Nantes s'est qualifié pour les huitièmes de finale de Coupe de France face à Lyon, leader de la Ligue 1 (3-2). L'occasion de revenir sur cette qualification avec Vincent Bessat, Lyonnais de naissance, auteur du premier triplé de sa carrière et meilleur milieu gauche nantais depuis David Garcion, Olivier Monterrubio et Aurélien Capoue, peut-être. Une petite heure de bavardage autour des tatouages « chicanos », de fiches d'impôts et de sa prolongation de contrat - à six mois de son terme. Encore loin d'être actée.
Comment se réveille-t-on après avoir inscrit le premier triplé de sa carrière, de surcroît contre Lyon, la ville qui t’a vu naître ?
Tu as dû recevoir beaucoup de textos de journalistes aujourd’hui. Justement, à Nantes, certains collègues disent que tu n’as jamais refusé une demande d’interview depuis que tu es au club. Pourtant, ce n’est pas un exercice où tu sembles très à l’aise…
C’est-à-dire ?
Comme quoi par exemple ?
Pour revenir à tes origines, tu es né à Lyon. L’OL est donc ton club de cœur, non ?
Quand tu étais petit, que faisaient tes parents ?
Justement, tu bossais bien à l’école ?
Tu parles de tes parents qui ne seraient très football, mais même toi, on a l’impression que tu es embêté avec ce milieu du foot…
Ce n’est pas forcément une obligation : tu as des joueurs qui ont réussi de très belles carrières en étant « grande gueule » , se fichant des éventuelles conséquences. Ça en devient même charmant…
Après ta carrière, envisages-tu de rester dans le monde du football ?
Quel est ton rapport à l’oseille en fait ?Je vis très bien, il ne faut pas se voiler la face. J’ai un gros péché mignon qui sont les voitures, mais pour tout le reste, je ne peux pas jouer sur tous les tableaux. J’ai une autre chance, c’est que mon père connaît pas mal de choses en matière de placements financiers et d’investissements. Puis j’ai le nez dans tout ce que je fais. Tout ce que je fais, tout ce que j’ai, je sais pourquoi je le fais et je sais comment je le fais.
Tu sais donc combien tu paies d’impôts par an ?Je remplis mes fiches d’impôts. Mon père les fait, mais je suis là. Je ne lui envoie pas mes feuilles et il se démerde. À la fin de ma carrière, je sais comment je pourrai faire mes impôts. Sans aucun problème.
Tu disais que ton péché mignon, c’était les voitures. Tu en as combien ?Non, ça je ne peux pas le dire. Ça inciterait au cambriolage après (rires). Mais j’ai un ami qui a un très gros garage à Cannes et qui me permet de faire un roulement et des coups énormes sur les voitures. Puisque le but est de ne pas perdre d’argent ou le moins possible.
Tu es plus voiture italienne ou allemande ?Les deux. Tout ce que je peux te dire, c’est que l’Audi R8 V10 est une très, très bonne bagnole.
En parlant de passion, tu en as une autre : le tatouage.Ouais, j’adore ça. Tout au début, c’était juste l’envie d’en faire, peut-être par effet de mode. Ça me trottait depuis un moment dans la tête. Depuis, c’est vraiment devenu une passion. Mais il y a toujours un sens derrière chacun de mes tatouages : ça peut être religieux, sur ma famille, mes proches, le football. Je suis plus branché dans le style « chicanos » pour faire simple, bien dessiné, avec des écritures bien travaillées, où, justement, j’arrive à trouver un sens derrière tout ça. Là, je suis en train d’en faire un sur le dos et ça fait très mal. Dans le creux du bras, c’est douloureux. Sur le coude et tout ce qui touche à l’os, ça te fait vibrer un peu le corps. Un peu sur la colonne aussi. Mais c’est bien, ça permet de se durcir un petit peu la tête.
La souffrance ne fait-elle pas finalement partie du plaisir de se faire tatouer ?Ce que j’aime, c’est bien entendu le résultat, encore faut-il que ça soit bien fait. Il y a peut-être aussi, ouais, le fait de tenir contre la douleur. C’est le plaisir de trouver un dessin, d’une certaine correspondance avec un évènement de sa vie. C’est un tout.
Parlons rapidement des supporters nantais. Ne crois-tu pas qu’ils sont en train de tuer le game des tribunes en France ?
Je pense qu’on a la meilleure ambiance de France. C’est extraordinaire ce qu’ils nous donnent. C’est pour ça que la moindre des choses, c’est de s’arracher le cul sur le terrain. Ce qui m’impressionne le plus, c’est que sur le terrain, tu n’entends pas de sifflets. Que ta prestation soit bonne ou pas. Ça, c’est fou. Je sais que tu as beaucoup de joueurs dans les équipes adverses qui nous envient pour cette atmosphère.
Comment expliques-tu cette ferveur nouvelle, qui n’existait pas vraiment, d’ailleurs, quand Nantes était encore un grand de notre championnat ?Ces années Ligue 2 ont tellement été difficiles que de s’en sortir et de proposer autre chose – des mecs qui se battent les uns pour les autres -, ça permet aux gens de s’identifier. Puis il y a eu un renouvellement de génération, de supporters plus jeunes qui n’ont pas connu tout ce qui s’est passé avant. Dans un sens, tant mieux. Si on devait nous rabâcher tous les jours le « jeu à la nantaise » , ça ne nous aiderait pas à avancer. Mais ça va revenir. Dans les quatre ou cinq ans, tu vas voir, ça va rejouer l’Europe. J’en suis certain. Après, tout est une question de gestion.
Justement, mardi soir, après la qualification, tu es passé sur le plateau d’Eurosport avec le président Waldemar Kita. On a eu l’impression que l’ambiance était un peu tendue. Tu avais la tête baissée, comme si tu n’étais pas heureux d’avoir gagné.Mais non, tout va bien (sourire).
C’était peut-être le fait d’avoir été mis devant les caméras tout juste après le match, fatigué, pas encore douché…Ouais, on va dire ça… Après si tu veux parler de ma prolongation de contrat, je peux te dire que j’ai envie de rester à Nantes. J’ai ma maison ici. Ma fille est née ici. Je me suis inscrit dans un projet avec la remontée, puis en pérennisant le club en Ligue 1. Maintenant, j’aimerais participer à la reconstruction de ce club au très haut niveau. Mais si on ne veut pas de moi, je ne forcerai pas les choses.
Tu penses réellement qu’on ne veut pas forcément de toi ?Je ne sais pas. Peut-être que la direction estime que je ne suis pas utile sur le long terme. Mais moi, j’ai 29 ans, j’ai une famille. Quand je suis venu ici, j’ai accepté de faire des efforts financiers pour venir. Quatre ans plus tard, et après deux renégociations de contrat, je suis à l’heure actuelle toujours sur les mêmes bases salariales.
Le club te propose un an de contrat alors que tu en souhaiterais deux ou trois, c’est ça ?Ouais, et avec une revalorisation salariale. Après, je ne demande pas 100 000 euros non plus. Il ne faut pas me faire passer pour ce que je ne suis pas, puisque j’ai lu tout et n’importe quoi dans la presse. Mais à l’heure actuelle, je refuse. Je n’accepte pas ces conditions. Il n’y avait pas de discussion à avoir : c’était j’accepte ou non. Bah, je n’ai pas accepté. De leur côté, ils n’ont pas l’air de vouloir bouger non plus. On attend, et on verra.
Propos recueillis par Victor Le Grand