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Villarreal compte sur Raúl Albiol, 35 ans, toujours plus chaud
Raúl Albiol jouera ce soir son 47e match de la saison, et l'un des plus importants de sa carrière. Le défenseur de 35 ans peut mener Villarreal à son premier trophée depuis la Coupe Intertoto 2004. Un accomplissement majeur pour un joueur longtemps dans l’ombre en Espagne, qui se révèle être un commandant de sous-marin encore meilleur que Reda Kateb dans Le Chant du loup. Un submersible jaune, évidemment.
La saison du barbecue est ouverte. Un petit rayon de soleil et on craque les allumettes. Dommage pour le voisin qui en avait profité pour aérer et qui va se retrouver enfumé. Brochettes et côtelettes sont dans les starting-blocks. Forcément, « el Chori » aussi. Long comme une saucisse du haut de son 1,90m, d’où le diminutif de chorizo comme surnom, Raúl Albiol réalise un retour au premier plan remarqué de l’autre côté des Pyrénées. Loin de se dorer la pilule au-dessus des braises, le vétéran a ramené le Sous-Marin jaune vers la surface, alors que l’appareil sortait de son plus mauvais exercice depuis sa remontée dans l’élite, conclu à la quatorzième place. Cinquième de Liga en 2019-2020, Villarreal a définitivement relevé la tête et s’apprête à disputer sa première finale de Ligue Europa. C’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure confiture, et c’est avec un vieux « Chori » que l’on écrit l’histoire.
Arrigo Sacchi est son plus grand fan
Formé à Valence, le natif de Vilamarxant a rejoint le Real Madrid lors d’un été 2009 galactique, débarquant au même moment que Cristiano Ronaldo, Kaká, Xabi Alonso ou Karim Benzema. Albiol a pourtant passé la plupart de sa carrière dans l’ombre des autres défenseurs centraux espagnols. Membre de la génération dorée qui a tout raflé avec la Selección, il a dû squatter le banc la plupart du temps, éclipsé par Carles Puyol, Carlos Marchena, Sergio Ramos et Gerard Piqué. Deux apparitions en phase de poules à l’Euro 2008, aucune au Mondial sud-africain ni à l’Euro 2012, et une seule lors du Mondial brésilien, lors du match pour l’honneur contre l’Australie. Second rôle au Real, il quitte la Liga presque dans l’anonymat en 2013, direction Naples. Avant de s’offrir un retour sous les projecteurs nationaux avec Villarreal en 2019.
« Villarreal est une famille parce que, dès le premier instant où tu arrives ici, tout le monde rend les choses très faciles, racontait-il à Sky Sport. Vous vous sentez chez vous dès le premier jour et c’est fondamental pour travailler au mieux. » Confirmation apportée par la séquence d’une partie endiablée de parchís (une variante du jeu des petits chevaux) dans le train menant à Madrid le week-end dernier. En plus de faire l’unanimité dans le groupe, Albiol est, à 35 ans, le véritable patron de la défense. Pour ne rien gâcher, il marque des buts capitaux. En Liga, lors d’une victoire à Séville en décembre 2019, et en C3, contre Kiev en huitièmes et Arsenal en demi-finales. Il y a deux ans, Arrigo Sacchi avait déclaré que le départ d’Albiol était « la pire erreur de Naples ». Sans trop s’avancer, on peut dire que Villarreal ne regrette pas de l’avoir récupéré. Sur les 84 matchs qu’il a disputés sous le maillot groguet, tous ont été joués en tant que titulaire. Et il est allé au bout de 79 de ces rencontres. La preuve qu’il est plus qu’un second choix.
Papy fait de la résilience
Unai Emery n’a pas remis son statut en question à son arrivée l’été dernier. Seul Dani Parejo a été davantage utilisé cette saison – 4135 minutes de jeu pour le défenseur, contre 4163 minutes pour son compatriote. Une constante puisque Albiol était déjà celui qui jouait le plus sous ses ordres en 2008-2009 à Valence. Grand bénéficiaire de la forme et de la fiabilité de son vieil associé de la charnière centrale, Pau Torres (24 ans) fait preuve de reconnaissance. « J’apprends énormément de Raúl Albiol, pour moi c’est un luxe de faire mes premiers pas en première division à ses côtés », confiait son partenaire à Marca. Avoir à ses côtés un homme qui a disputé des finales, notamment de Copa del Rey (2008, 2013) et de Coupe d’Italie (2014), et qui pèse 56 sélections et 105 matchs européens, ça rassure, forcément.
Encore plus quand se présente une finale comme celle de ce mercredi soir, la plus importante de l’histoire du club, sans faire injure à la Coupe Intertoto, remportée en 2003 et 2004. « Le club a grandi dans sa mentalité, soulignait le capitaine lors du media day la semaine dernière. Nous avons grandi dans notre jeu, notre personnalité et notre mentalité. Tant à domicile qu’à l’extérieur, nous avons essayé d’être entreprenants. Nous avons été capables de nous sortir des moments difficiles pendant la saison. Et nous avons tout vécu : des remontadas, des matchs perdus en cinq minutes, et tout cela nous a fait grandir. » Il y aura du travail face à une équipe de Manchester United qui marque en moyenne deux fois par rencontre cette saison (120 buts en 60 matchs). Mais après avoir brisé le plafond de verre des demi-finales, contre lequel elle s’était heurtée en 2004, 2011 et 2016, l’équipe d’Unai Emery compte passer à table. Ça tombe bien, « Chori » rime aussi avec appétit.
Par Quentin Ballue