- C1
- Demies
- Barcelone-Liverpool
Vigile Van Dijk
Récemment élu meilleur joueur de Premier League par ses pairs, désormais décrit par certains comme le meilleur arrière central du monde, Virgil van Dijk tentera de justifier sa réputation, ce mercredi face au Barça. Une demi-finale de C1 où celui que personne n'aurait réussi à dribbler en Premier League depuis mars 2018 aura pour tâche principale de museler Lionel Messi. Une baston épique, qui semble à la hauteur d'un type qui conjugue comme personne élégance stylistique et efficacité statistique.
Certains aiment l’assimiler à un monstre. Une sorte de cerbère d’un mètre 93, dont la gueule serait suffisamment large pour gober les uns après les autres tous les attaquants de Premier League. Immobile, les pieds plantés devant les caméras ou micros des journalistes, Virgil van Dijk est de ceux qui imposent une forme de respect, parfois teinté d’une légère pointe de crainte. En mouvement, c’est autre chose. Le colosse semble soudain avoir des ailes chevillées aux gambettes. Des tacles ciselés, des courses de pur-sang, une vision du jeu qui détecte les situations chaudes plus vite que des lunettes thermiques… Oui, il y a de la classe chez ce zozo-là. De la classe et du grandiose, comme en atteste cette statistique qu’Opta a récemment sortie de ses tiroirs : depuis mars 2018, soit plus d’un an, personne en Angleterre n’aurait réussi à dribbler Virgil van Dijk, tout simplement.
Le triomphe du style
Dimanche 28 avril, le Batave était même élu meilleur joueur de Premier League par l’association des joueurs professionnels anglais, devenant le premier défenseur à repartir avec le trophée depuis 2005 et un certain John Terry. Un titre individuel habituellement trusté par les attaquants et milieux offensifs. Mais voilà, comme l’ex-capitaine de Chelsea, Virgil van Dijk est sans doute un peu plus qu’un excellent défenseur. La recette magique du Néerlandais ? « C’est un ensemble, il n’y a pas juste une explication, avance Pascal Plancque, historique adjoint de Claude Puel à Southampton et qui a chapeauté Van Dijk lors de l’exercice 2016-2017. Dans les duels, il est quasiment imbougeable, c’est une armoire normande, le type… Mentalement, il est hyperagressif et surtout, il est excellent dans la lecture des situations de jeu et des intentions de l’adversaire. Souvent, un joueur de son gabarit essaie avant tout de s’imposer physiquement. Mais lui, il a d’autres armes : techniquement, c’est du très haut niveau, et son jeu est exceptionnellement intelligent. » Pour beaucoup, c’est d’abord ce style, unique, qui le distingue : la défense façon Van Dijk, c’est un combat sans fioriture. Un art martial fluide. Une guerre propre. Les cartons se font rarissimes (seulement 1 en 36 matchs de Premier League cette saison), les erreurs de jugement aussi. Subsiste alors l’image de ce grand type, élancé comme une tour de guet, dont les longues jambes fusent comme des missiles à tête chercheuse vers un ballon dont l’adversaire sera bientôt dépossédé.
« Le défenseur axial à ses cotés est bonifié, invariablement »
« Van Dijk, c’est comme voir jouer Roger Federer au tennis, osait Jamie Carragher en janvier dernier.Tout ce qu’il fait a l’air facile, il est toujours là où il faut… Et, oui, c’est le meilleur défenseur en Angleterre. En Angleterre et au-delà. » Alors, stylé Virgil van Dijk ? Sans aucun doute. Depuis son arrivée à Liverpool en janvier 2018, l’international hollandais a paraphé les grandes joutes de la Premier League d’une gestuelle, la sienne, qui marque invariablement les esprits. Sammy Lee, l’entraîneur adjoint de Ronald Koeman lors de la première année de Van Dijk à Southampton, confirme : « Il y avait cette forme d’élégance et de grâce qui émanaient de lui. Ça s’est vu dès son premier entraînement avec nous… » La patte Van Dijk transpire aussi de ce sentiment de maîtrise de soi et de son environnement, qui achève de dessiner le portrait d’un défenseur qui semble comme imperméable à la panique. Pour Sammy Lee, le stoppeur serait porteur de cette forme « d’arrogance positive » très néerlandaise, révélatrice d’une nation petite par la taille, mais grande par son histoire, son art, sa culture et, bien entendu, son football. « Il a une très très grosse confiance en lui, déroule Pascal Plancque. Si on ne le connaît pas, ça passe pour de l’arrogance, mais en définitive, c’est assez néerlandais comme caractéristique, oui. Virgil dégage typiquement ça. Mais ça participe à son charisme. Les joueurs qui sont autour de Virgil sont très bons, car il a un côté hyper rassurant. Le défenseur axial à ses cotés est bonifié, invariablement. »
King of the numbers
Voilà pour la forme, harmonieuse et racée, du bonhomme. Le reste est une affaire de chiffres, que les médias anglais compilent dans une interminable surenchère statistique. La démesure du Hollandais se mesure aussi en nombre : 4015 minutes disputées avec Liverpool toutes compétitions confondues cette saison – plus que tout autre joueur de champ dans l’équipe –, 3200 ballons joués en Premier League (seuls Jorginho et Azpilicueta font mieux), 76% de duels aériens gagnés – le pourcentage le plus élevé en Angleterre – ou encore ce chiffre de 0,55 but par match, à savoir la moyenne de pions encaissés par rencontre par Liverpool en championnat en 2018-2019, ce qui fait des Reds la meilleure défense outre-Manche.
Le Néerlandais de 27 ans peut-il faire encore mieux ? Ce que Van Dijk a accompli en l’espace d’une saison et demie a déjà quelque chose de monumental. Mais ses accomplissements en Rouge resteront peut-être paradoxalement éphémères – au regard de la grande histoire du club de la Mersey – s’il ne couronne pas son œuvre d’un titre majeur. « Il faudra qu’il gagne un grand titre, estime Pascal Plancque. Van Dijk deviendra alors une icône, c’est évident. Liverpool, avant son arrivée, c’était une belle équipe, spectaculaire, mais s’ils ont énormément gagné en efficacité défensive, c’est avant tout grâce à lui. » Pour passer le cap, nul doute que le natif de Breda devra donc enrichir son palmarès d’une Premier League ou d’une Ligue des champions. Une touche finale de perfection qu’il faudra commencer par esquisser ce mercredi soir, en fermant la porte du but d’Alisson à Lionel Messi. Un monstre d’un tout autre genre, qui a, depuis belle lurette, appris à empiler les titres.
Par Adrien Candau
Propos de Pascal Plancque recueuillis par AC, autres propos issus de Skysports.com