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Aupa Athletic : les dessous d’une affaire pédopornographique

Par Jérémy Lequatre-Garat
Illustration générée par MidJourney
Illustration générée par MidJourney

À l’automne 2015, la vidéo d’une jeune fille montrant sa poitrine en soulevant un maillot vert de l’Athletic Club devenait virale. Un peu plus de sept ans plus tard, le procès du magnat du porno à l’origine de cette séquence pédopornographique est toujours en attente.

Les souvenirs remémorés par ce maillot différent qu’on soit supporter de l’Athletic Club ou non. À la fin de la saison 2011-2012, l’équipe basque dispute la finale de la Ligue Europa face à l’Atlético de Madrid dans l’Arena Națională de Bucarest. Les hommes de Marcelo Bielsa s’inclinent lourdement en Roumanie (3-0), mais cela n’empêche pas la tunique verte portée par les Leones d’entrer dans l’histoire. Celle d’un parcours européen comme l’Athletic n’en a plus vécu depuis, marqué notamment par une victoire de prestige sur la pelouse d’Old Trafford (2-3). En 2023, pour célébrer ses 125 ans d’existence, le club de la province de Bizkaia a réédité ce maillot ainsi que cinq autres ayant marqué son existence. L’occasion, pour des personnes généralement très éloignées de Bilbao, de repenser à des images n’ayant rien à voir avec le rectangle vert. Et qui ont gâché l’existence d’une jeune fille alors âgée de 17 ans.

Pour le comprendre, il faut remonter au 12 septembre 2015. Dans un bar de Madrid, deux femmes qui ne se connaissent pas entament la discussion. Le courant passe bien entre elles et quelques shots d’alcool fort viennent finalement casser les dernières barrières de timidité. « Si tu veux gagner de l’argent rapidement et simplement, je sais comment t’aider », finit par lâcher la plus avenante. La technique miracle consiste à s’inscrire au casting d’une agence pornographique. La jeune femme se laisse convaincre. En rentrant à son domicile, elle se rend sur le lien communiqué et y joint trois photos d’elle entièrement dénudée, son nom complet ainsi que son numéro de téléphone. La machine est lancée.

« Tu as beaucoup de potentiel »

Dès le lendemain matin, elle reçoit un appel d’un homme l’interrogeant sur ses motivations et limites. La jeune femme dit qu’elle n’aurait aucun problème à faire des vidéos pornographiques devant une webcam, aux seules conditions que ses informations personnelles ne soient pas divulguées et que son visage n’apparaisse pas à l’écran. Son interlocuteur ne semble pas y voir d’inconvénient et lui donne rendez-vous pour une rencontre physique. Malgré l’appât du gain, la fille prend peur et décide finalement de ne pas s’y rendre. Elle bloque immédiatement le numéro de téléphone, mais reçoit un appel d’un nouvel individu. Ce dernier lui offre un tout autre arrangement, qu’il finit par lui détailler par message lorsqu’elle raccroche, rapidement apeurée. Le contenu de l’échange est publié en août 2016 par les journalistes du média El Español :

« Salut. On aimerait que tu fasses des scènes avec nous et que tu gagnes beaucoup d’argent. Mais je ne sais pas trop comment y parvenir si tu refuses de nous parler. Si le problème est que tu ne veux pas le faire avec Torbe, pas de problème, tu ne le fais pas avec lui. Si le problème est que tu ne veux pas que Torbe tourne tes scènes, pas de soucis, il ne le fera pas non plus. Mais laisse-nous te parler parce que tu as beaucoup de potentiel. Tu peux gagner beaucoup d’argent avec nous. »

Là encore, la jeune femme ne répond pas. Recevant des appels incessants, elle finit par décrocher et tombe sur « Torbe », l’homme dont il était question dans les précédents échanges. De son vrai nom Ignacio Allende Fernández, il est l’un des grands noms de la pornographie en Espagne. Pas question pour lui de laisser s’échapper cette fille en qui il voit « beaucoup de potentiel ». L’homme né à Portugalete (Biscaye), à une quinzaine de kilomètres de Bilbao, à la toute fin des années 1960, lui propose donc 200 euros en échange d’une simple rencontre. L’enquête policière et les rapports qui en sont sortis montrent que les choses ne se sont pas passées comme prévues. « Il lui a dit qu’il avait des photos d’elle nue et que si elle ne couchait pas avec lui, il les mettrait sur Internet en prenant soin de l’identifier sur ses comptes Facebook et Instagram », peut-on lire dans le document consulté par El Español.

Des vidéos d’une fille de 17 ans

Terrorisée par ces menaces, la jeune fille est contrainte de pratiquer une fellation à « Torbe », avant que celui-ci ne la pénètre avec ses doigts et son pénis. Tout cela aurait également été filmé. Ignacio Allende Fernández lui donne les 200 euros initialement promis en échange d’une discussion et lui ordonne de revenir quelques jours plus tard. Toujours par crainte de voir ses photos être publiées, elle se rendra au second rendez-vous le 30 octobre 2015. Sur place, elle est incitée à fumer de la marijuana et à boire un liquide qui n’a pas pu être identifié. Elle assure avoir été pénétrée par le godemiché d’une fille à peine majeure, le tout devant la caméra d’un « Torbe » qui prendra ensuite part à la scène. Avant de lui remettre 250 euros, le réalisateur pornographique lui demandera de réaliser trois vidéos devant son téléphone portable. Pour l’une d’elles, la jeune femme est vêtue d’une culotte et d’un maillot vert du club de Bilbao, qu’elle soulève pour dévoiler sa poitrine en criant : « Aupa Athletic ».

Moins d’une semaine plus tard, la vidéo de quelques secondes fait le tour des réseaux sociaux. Sur Telegram et Twitter, la séquence est partagée des milliers de fois et une amie de la principale concernée finit par l’avertir. Si l’agence de presse espagnole EFE affirme qu’elle était consentante au moment de réaliser la scène, la jeune femme ne souhaitait pas que les images inondent les réseaux sociaux. Raison pour laquelle elle téléphonera à « Torbe » pour lui demander des explications. Au moment d’essayer de couper définitivement les ponts, elle l’informe également d’un détail qui refroidira soudainement le réalisateur pornographique : elle n’a pas encore fêté ses 18 ans. Pour sa défense, Ignacio Allende Fernández précise que la jeune femme a indiqué être majeure au moment de s’inscrire sur son site de casting. Il prendra néanmoins le temps d’envoyer des mails, demandant à des plateformes spécialisées de supprimer la vidéo. Trop tard.

Procès en attente depuis le printemps 2016

Le père de la fille ayant fini par découvrir la vidéo, il se rend avec elle au commissariat de la police nationale d’Alcobendas (Madrid) le 4 novembre 2015. Une plainte est déposée et la jeune femme est placée comme témoin protégé dans l’affaire. Un « trouble de stress post-traumatique d’intensité moyenne-élevée » est détectée chez elle. Tout cela a « gravement affecté la jeune femme dans sa sphère personnelle, familiale et sociale. Elle a dû abandonner ses études, ne pouvant pas poursuivre son processus de formation », précise le parquet de Madrid dans un document qu’a pu consulter l’agence EFE. Ignacio Allende Fernández était déjà dans le viseur de la justice pour d’autres affaires similaires. En avril 2016, il est placé en détention provisoire pour – entre autres – traite d’êtres humains, blanchiment d’argent et publication de vidéos à caractère pédopornographique. Pour ce dernier chef d’accusation, le parquet réclame sept ans et demi de prison.

Libéré après versement d’une caution de 100 000 euros en octobre de la même année, « Torbe » remet la faute sur d’autres. Il assure que la vidéo du « aupa Athletic » a été partagée sur les réseaux sociaux par les joueurs du club basque à qui il l’avait envoyée. Mais des éléments retrouvés dans son téléphone par les enquêteurs aggravent son cas. Sur WhatsApp, un long message envoyé à une certaine « Amiga Madrid » le 20 novembre 2015 est sans appel. « C’est la folie, je reçois des offres du monde entier. Je peux faire de toi une millionnaire. […] Dénoncer c’est faire un pas en arrière. Si tu veux, j’en parle avec tes parents et je leur expose la situation », y assure « Torbe » à une fille qu’il savait âgée de 17 ans. Le procès, considérablement retardé par la pandémie de coronavirus, devait se tenir à l’automne 2021. Aucune nouvelle date n’a été communiquée.

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Par Jérémy Lequatre-Garat

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