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Longoria et les maux de l’OM
À la suite de la défaite de l’OM à Auxerre ce samedi, Pablo Longoria est encore monté d’un cran dans la guerre qui l’oppose à l’arbitrage dans le foot français. Preuve en est que l’étape du simple psychodrame est franchie, et que la cassure est plus profonde.

« C’est un championnat de merde, si la Superligue vient nous voir, on y va tout de suite. » Ces propos de Pablo Longoria, rapportés par L’Équipe et dignes d’une vidéo parodique, pourraient presque faire sourire dans le contexte actuel. Mais cette embardée délirante est néanmoins révélatrice d’une crise qui ne cesse de s’aggraver entre le club olympien et ce football français qui lui voudrait tant de mal.
Longoria, De Zerbi, Ravanelli : pas la même fonction, mais la même passion
Si le refrain du complot de l’arbitrage ne constitue certes pas une exclusivité phocéenne, il faut quand même reconnaître au board olympien une ligne de conduite parfaitement respectée par l’ensemble de ses différents protagonistes. Quelques minutes après la deuxième claque infligée par l’AJA cette saison, Roberto De Zerbi a également désigné M. Stinat, l’arbitre de la rencontre, comme étant le principal responsable de la déroute marseillaise : « On n’a pas du tout bien joué, mais l’arbitre conditionne le match. Il n’a pas été serein, il y a le penalty clair et net de Merlin, puis l’expulsion. » Aucune image n’atteste d’une énorme erreur du corps arbitral sur Merlin, tout comme sur le deuxième jaune reçu par Derek Cornelius qui a provoqué la fureur de son président. Reste que De Zerbi a été imité pratiquement au même moment par Fabrizio Ravanelli, légende et conseiller institutionnel et sportif de l’OM, qui a parfaitement récité son couplet victimaire : « On savait déjà que cet arbitre avait fait quelque chose de pas correct avec nous, avec la suspension de Medhi Benatia qui est quelqu’un de très important pour nous. »
S’il peut être audible que la nomination de M. Stinat si rapidement après cet épisode puisse intriguer une frange des fans marseillais, verser dans le complotisme et maintenir une pression sur les arbitres en anticipant la partialité des hommes en noir ne résout rien. Surtout quand on est président de l’OM. Naturellement dans le ballon rond, il existe encore en 2025 des erreurs qui tombent sur le nez. L’exclusion de Benatia en est une. Peut-on en devenir pour autant complotiste de manière aussi caricaturale ? Lorsque Pablo Longaria s’insurge, expliquant que tout « était prévu, organisé, depuis le carton jaune de Balerdi contre Angers », et pointe derrière le spectre de « la corruption, la vraie corruption » , on est en droit de se demander si le président de l’OM, au-delà de se prendre d’un coup pour Roberto Saviano, ne risque pas surtout de ruiner l’image et, d’une manière ou d’une autre, en partie le retour au premier plan de son club ?
Les mots ont un sens
S’il y a indéniablement des progrès à faire autour du sujet de l’arbitrage dans le football, la mauvaise foi camouflée en passion fait parfois trembler tout l’édifice. Tout simplement car le rapport à l’arbitrage reste philosophiquement compliqué : tout le monde désire qu’il soit strict et parfait pour l’adversaire, compréhensif dans l’esprit du jeu et occasionnellement gentiment complaisant pour soi. Actuellement, dans cette petite danse de l’hypocrisie, l’OM ne cesse pas de tourner et de monter dans les gammes.
| Après les polémiques autour d’AJA-OM et l’utilisation du mot « corruption », les arbitres de Ligue 1 prévoient un recours collectif et soutiennent Jérémy Stinat, victime d’une intrusion à son domicile et de dégradations sur ses véhicules. pic.twitter.com/YVknm8LHH5
— DAZN France (@DAZN_FR) February 23, 2025
Enfin dernier aspect et non des moindres, les mots ont un sens et des conséquences, notamment pour le corps arbitral. Objet de toutes les attentions, condamnation, culpabilisation, suspicion – en particulier sur les plateaux télé – les voilà désormais plus que jamais dans l’œil du cyclone, eux devenant la quasi-incarnation du mal, voire des criminels. Si la corruption est un délit, où sont alors les preuves pour étayer les accusations de Longoria ? Le président de la FFF Philippe Diallo a tenté d’alerter sur ce risque, loin d’être seulement virtuel et qui a pu se vérifier une nouvelle fois ce week-end à l’Abbé-Deschamps : « Comment veut-on qu’au niveau amateur, les arbitres soient respectés, quand au plus haut niveau du football français il y a de tels comportements. » Faudra-t-il que survienne un drame envers un homme ou une femme en noir, ce qui est malheureusement arrivé trop fréquemment dans les districts, pour revenir à la raison ? Pour rappel, les pneus des voitures de M. Stinat ont été crevés en marge de la rencontre…
Vers une application du droit de retrait des arbitres français ?Par Nicolas Kssis-Martov