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Vicky Losada : « Les mecs sont dans leur monde, on n’a rien à voir avec eux »
Elle vient de Terrassa, la ville de Xavi. Elle porte aussi le numéro 6 du Barça. Mais Vicky Losada est le capitaine de l'équipe féminine qui reçoit ce soir Lyon (19h) en quarts de finale retour de Ligue des champions (victoire 2-1 de l'OL à l'aller). La parole est à la première joueuse espagnole à avoir marqué un but en Coupe du monde.
Tu viens de Terrassa, comme Xavi, et tu portes le numéro 6 sur ton maillot. C’est comment la relation entre vous ?En fait, on ne se connaît pas trop. On s’est juste croisés lors de remises de prix à Terrassa et pour prendre les photos des équipes en début de saison. Rien de plus. Franchement, les mecs sont dans leur monde. Nous, on n’a rien à voir avec eux.
C’est donc utopique de penser que dans le futur, le foot féminin pourra être au même niveau médiatique que le masculin ?Tout à fait ! Déjà, les salaires des footballeurs sont exagérés. Mais je crois que petit à petit, ils vont augmenter dans le foot féminin. Il y a quelques années, plusieurs joueuses devaient s’acheter les chaussures pour joueur. Aujourd’hui, on a toutes des sponsors, et ça ne peut que s’améliorer.
Et dans le jeu, en quoi ressembles-tu à Xavi ?(Elle prend son temps.) J’essaie toujours de contrôler l’espace où je joue, j’essaie de regarder autour de moi avant de recevoir le ballon et surtout de prendre les meilleures décisions le plus vite possible. Mais ça, c’est le plus dur dans le foot d’élite.
Tu es née ici. Ensuite, tu es allée aux États-Unis et en Angleterre. Et il y a deux ans, tu es revenue à Barcelone pour y rester en tant que capitaine. Tu te sens comment ?Je suis définitivement une joueuse plus complète.
Avant, j’avais juste du talent. Aller aux États-Unis m’a permis de comprendre que ça ne suffisait pas, surtout dans le championnat américain, le plus dur du monde au niveau physique. Jusqu’à mes 21 ans, je pensais que mon talent serait suffisant. Mais ce n’est pas du tout comme ça que les choses se passent. Aux États-Unis, j’ai appris à travailler et, surtout, à souffrir. Et aujourd’hui, je me sens mieux physiquement dans tous les aspects.
Tu rentres en Espagne et ensuite, tu marques le premier but de l’histoire de l’équipe d’Espagne en Coupe du monde…Oui ! Ce fut un but et un moment historiques !
Maintenant, il te manque un but historique avec le Barça. Ça pourrait être dans le match face à l’OL de ce soir ?Si seulement… Ce serait un exploit extraordinaire. Mais pas pour moi, hein ! Ce serait surtout un grand pas pour le Barça et pour que les jeunes filles puissent croire encore plus dans ce club et son futur.
Comment rattraper son retard face au champion en titre ?Il faut d’abord garder les pieds sur terre. C’est clair qu’à l’aller, on a fait un bon résultat, mais on a aussi terminé le match très fatiguées. Il faudra jouer avec les jambes et le cœur.
À Lyon, vous auriez pu encaisser quatre ou cinq buts. Mais vous n’avez perdu que 2-1 et marqué un but à l’extérieur…C’est ça. La sensation a été bonne, même si, comme je disais avant, on était épuisées à la fin du match. Si on arrive à maîtriser la possession du ballon, on peut tout réussir. Après, il faudra marquer. Obtenir un 1-0, ce n’est pas impossible.
Parmi les footballeuses de l’OL, laquelle t’impressionne le plus ?
Dzsenifer Marozsán. Sans aucun doute. Elle joue pratiquement seule. Elle sait se tourner au bon moment, elle sait chercher le ballon et le gérer super bien. En plus, elle a à la fois un très bon physique et une excellente technique. C’est la classe à l’état pur.
Quelle importance occupe l’aspect physique dans le foot féminin ?C’est primordial, surtout dans les matchs de C1. Quand tu arrives à la 70e minute, tu sens beaucoup la fatigue. C’est pour ça qu’en Espagne et au Barça en particulier, on travaille beaucoup avec le ballon, pour le faire rouler rapidement et combler nos lacunes physiques avec la technique.
Comment définirais-tu la joueuse que tu es ? Je défends à fond. Mais quand je vois que c’est le moment d’attaquer, je fonce ! Il faudrait faire pareil face à l’OL. On joue à domicile, on peut le faire. Il faut y croire.
Quel message le foot féminin actuel envoie-t-il à la société ?Personnellement, je crois qu’on est privilégiés de jouer dans un grand club comme le Barça. Ce qu’on fait a beaucoup de visibilité dans le monde et donc on doit donner un exemple important aux filles qui veulent jouer au foot. La société est en train de changer, et l’éclosion du foot féminin est tout à fait un message contre le machisme, qui est encore très présent dans la culture en général.
En tant que capitaine de l’équipe, à quoi tu renoncerais pour gagner une Ligue des champions avec le Barça ?Ouf… je ne sais pas. J’ai déjà renoncé à plusieurs heures de sommeil dans ma vie. Tous les jours, on commence à s’entraîner à 8h30. Être footballeuse est déjà en soi un grand sacrifice. Mais je ne veux pas me retirer sans avoir gagné une Ligue des champions avec le Barça. C’est mon rêve.
Propos recueillis par Antonio Moschella