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- Joueur de l'année 2012/2013
Van Persie, l’art de l’annonce
En une saison, il est passé d'Arsenal à Manchester sans période de transition, claquant quasiment le même nombre de buts, et faisant oublier à tout Old Trafford qui était Wayne Rooney.
Dans le football, il y a ceux qui sont modestes. Qui visent le maintien chaque année. Qui se disent à chaque victoire que « ce n’est que du bonheur » , car c’est vrai, après tout, l’important, c’est bien connu, « c’est de participer » . Bien. Il y a aussi ceux qui annoncent clairement leurs objectifs, aussi élevés soient-ils. Ceux qui n’ont pas peur de dire qu’ils vont être les meilleurs, qui prennent des risques, quitte à finir, si ça ne marche pas, dans la même catégorie que Fiorèse qui prend le 11 à l’OM pour succéder à Drogba. En arrivant à Manchester United, Van Persie a, lui, pris le numéro 20. Pourquoi ? Parce qu’il a rejoint les Red Devils pour être champion d’Angleterre et qu’un sacre en 2013 serait le 20e pour le club d’Alex Ferguson. Les fans d’Arsenal, où RVP a passé huit ans auparavant, auraient payé pour que l’annonce du Hollandais ne se réalise pas. Quitte (presque) à ce que ce soit Tottenham qui soit champion. Mais Van Persie a gagné son pari avec le trophée et un compteur monté à 30 buts à la fin. Une victoire qui a donc encore plus de saveur.
Choisir le club qui n’est pas champion
À l’été 2012, Van Persie ne croit plus en Arsenal. Ça fait 18 mois qu’il porte l’équipe sur ses épaules, et il sait pertinemment que personne ne s’en souviendra dans une dizaine d’années. Il veut jouer le titre en Premier League et deux prétendants sonnent à la porte : Manchester United et City, qui se sont déjà déchirés pour faire signer Nasri douze mois auparavant. Van Persie choisit les Reds et évoque pour sa première conf’ une petite voix d’enfant à l’intérieur de lui qui criait United. En vrai, comme « le petit prince de Marseille » au moment de s’arrêter sur un nom, il a juste choisi le club qui n’était pas champion. Pour le redevenir, faire constater son apport, marquer l’histoire. De l’ego, tout simplement. En attendant, si Van Persie démarre par une défaite, il trouve très vite sa place dans le 4-4-2 de Ferguson, plante des buts pour que son équipe empoche les trois points même quand elle n’y est pas et s’installe ainsi vite en tête, comme elle sait le faire. Van Persie marque aussi au bout de cinq minutes de jeu contre Arsenal à Old Trafford, profitant d’une erreur individuelle de Vermaelen, et offre le premier derby qu’il dispute contre City d’un coup franc à la dernière minute, où Nasri n’est pas super bien positionné. Personne n’en doutait, mais Van Persie n’hésite pas à flinguer ses anciens potes pour sa nouvelle vie. Ce qui compte, c’est le présent, où il est désormais indiscutable à United et où son flocage de maillot est le plus vendu (le genre de stat qui l’intéresse, évidemment).
Reste la Ligue des champions
Une fois le titre gagné, il a envoyé son nouveau palmarès aux fans d’Arsenal qui lui reprochaient d’être parti pour l’argent. Le genre de manœuvre puérile qui ne va pas faire grandir sa cote. Van Persie fait semblant de s’en foutre, mais il en est conscient. Il sait que son comportement ne lui donne pas de droit à l’erreur. Au printemps, alors que Manchester filait tranquillement vers son 20e titre donc, les consultants de tout bord sont venus lui chercher des poux dans la tête pour une prétendue série d’inefficacité devant le but. Le Batave était pourtant toujours le même danger devant, provoquant par exemple deux CSC qu’on aurait très bien pu lui attribuer. Mais il ne proteste pas, il sait qu’il devra mettre 30 pions dans une saison, là où les attaquants sympathiques type Giroud n’en auront besoin que de 20 pour parler d’une saison réussie. Reste la Ligue des champions. En huitièmes, il s’est fait sortir par le Real. Non sans une expulsion sévère de Nani au retour et un Mourinho qui dit à la fin que c’est la meilleure équipe qui est sortie, c’est vrai. Mais Van Persie retient le match aller à Bernabéu où, s’il avait été le meilleur joueur, il avait raté une ou deux occases. L’an prochain, il ne pourra se le permettre, notamment avec un Moyes sur le banc qui n’est pas nécessairement acquis à sa cause face à la concurrence (Rooney, Chicharito, Welbeck). Mais plus la barre est haute, plus Van Persie a envie d’ouvrir sa gueule…
Par Romain Canuti