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Valverde, artiste au chevet du Barça
Annoncé en tête des sondages depuis un bon moment, Ernesto Valverde est désormais le successeur attitré de Luis Enrique à la tête du FC Barcelone. Une vraie étape dans la carrière d'un entraîneur qui va enfin savoir si son costard est taillé pour le très haut niveau.
C’était un secret de Polichinelle, mais Sport peut être considéré comme le premier journal à avoir mis une preuve tangible sur la prise de décision définitive du FC Barcelone. Juste après le dernier match de championnat contre Eibar, Josep María Bartomeu annonçait que le prochain entraîneur du Barça serait annoncé le 29 mai prochain. Une date bien trop tardive pour le quotidien qui a expliqué dans ses colonnes le 22 mai dernier, soit un jour avant le départ officiel d’Ernesto Valverde de l’Athletic Bilbao, que le futur coach blaugrana était à la recherche d’une maison sur Barcelone, dans le quartier de Sarrià-Sant Gervasi. Simple résidence familiale secondaire ? Jusqu’ici, pourquoi pas. Le hic, c’est que les parents Valverde se sont aussi renseignés sur l’école Frederic Mistral-Técnic Eulàlia, située près de la propriété en question. Une façon pour le couple de prendre soin de la future scolarisation des enfants sur Barcelone, et de laisser une grosse porte ouverte à l’arrivée de Valverde en Catalogne pour prendre les rênes du FC Barcelone.
L’agent double barcelonais
Plus qu’une simple venue, il est préférable de parler d’un retour en Catalogne pour Valverde. De 1986 à 1990, le joueur passe quatre saisons dans la cité de Gaudi, mais fréquente deux équipes différentes. L’Espanyol de Barcelone d’abord, où cet ailier rapide et technique arrive tout droit du Sestao Sport Club pour intégrer l’équipe de Javier Clemente. « C’était un joueur très habile et véloce pour l’époque, explique l’ancien sélectionneur de l’Espagne. L’Atlético de Madrid était intéressé aussi, mais finalement le club ne l’avait pas engagé. C’est ce qui m’a permis de pouvoir l’intégrer dans mon effectif. J’ai pu compter sur ses qualités pendant deux très belles années. » Avec les Perruches, Valverde parvient à se hisser à la troisième place de Liga dès la première saison, et enchaîne avec une finale de coupe de l’UEFA perdue contre Leverkusen. De quoi attirer les yeux du voisin de toujours, le Barça. « Sa principale qualité sur le terrain, c’était la justesse de son jeu, décrypte Clemente. Il était capable de faire vite et bien malgré sa petite taille. Son bagage footballistique était très intéressant, il nous marquait des buts. » Une justesse dont le Barça, sixième de la dernière Liga, souhaite profiter.
Hélas, son expérience avec le club blaugrana tourne à l’acte manqué. Son potentiel est évident, mais des blessures à répétition finissent par avoir raison de son statut d’attaquant de poche insaisissable. Et si en deux saisons, El Txingurri (La Fourmi, en euskara) voit son palmarès garni d’une Coupe des coupes (C2) et d’une Coupe d’Espagne, son absence dans les finales symbolise ses difficultés à s’imposer. Recruté par l’Athletic Bilbao à l’été 1990, Javier Clemente parvient à redonner du tonus à son poulain, qui passe six saisons chez les Leones. De quoi y revenir en tant qu’entraîneur chez les jeunes d’abord, puis à la tête de l’équipe première, pendant sept années (de 2002 à 2005 d’abord, puis de 2013 à 2017). « Son bilan à Bilbao est bon dans l’ensemble, explique Clemente. Je le vois toujours très tranquille sur le banc de touche. Même si le club ne peut pas terminer champion d’Espagne, son rendement est stable. Il s’est toujours qualifié pour la Ligue Europa, là où le club doit se situer dans le championnat espagnol. » Grâce à la victoire du Barça contre Alavés en finale de Coupe du Roi samedi dernier, Valverde laisse Bilbao à nouveau qualifié pour l’Europe. Une mission accomplie, avant de démarrer la prochaine étape.
Entraîneur photographe
Sous le feu des projecteurs, Valverde s’apprête à vivre le plus grand défi de sa carrière d’entraîneur. Une carrière qu’il aurait pu ne jamais démarrer, à en croire sa seconde passion dans la vie. « Au moment où j’ai terminé ma carrière de joueur, je pensais à me reconvertir dans la photographie, expliquait-il récemment à l’agence EFE. Mais finalement, je suis devenu un entraîneur. » Adepte des expositions où ses clichés connaissent un succès certain, l’artiste Valverde doit à présent développer une nouvelle image dans un Barça qui souhaite se réinventer. Sa tendance au turn-over des ailiers à Bilbao peut cette fois-ci s’avérer périlleuse. « Au Barça, les trois joueurs de devant, Messi, Suárez et Neymar, sont inamovibles, tranche Clemente. C’est le trio offensif le plus efficace au monde, donc les changements importants ne se feront pas dans ce secteur. Le retour de Deulofeu peut lui offrir des possibilités… Dans les grands clubs, plus le nombre de bons joueurs est élevé, plus la saison s’annonce réussie, car le calendrier nécessite une rotation d’effectif. » Dans ce club où une revanche personnelle est à prendre à la suite de son passé malheureux, Valverde va préparer la saison prochaine de façon réfléchie. Cet été, si la MSN est reconduite, des recrues vont surtout être attendues en défense et au milieu de terrain. L’entraîneur possède de bons moyens pour réussir son marché, avant une saison fondamentale. « Le voir au Barça, c’est quelque chose qui ne me surprend pas, conclut Clemente. D’après moi, il peut y réussir. C’est le moment de savoir s’il est capable de remporter des titres majeurs. Le Barça doit être champion d’Espagne ou d’Europe l’an prochain. Si ce n’est pas le cas, on pourra déjà considérer la campagne 2017-2018 comme mauvaise. » Deux titres encore inconnus pour Valverde, c’est vrai. Mais si les provisions pour l’hiver sont faites avec sérieux, la fourmi basque pourra savourer le goût de la victoire depuis la Catalogne, et voler à la cigale madrilène ses rêves d’une hégémonie perpétuelle.
Par Antoine Donnarieix
Propos de Clemente recueillis par AD.