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Valenciennes, terrain miné

Par Quentin Ballue
5 minutes
Valenciennes, terrain miné

Valenciennes est au bord de la crise de nerfs. Une grande partie des supporters réclame le départ d'Eddy Zdziech, qui ne voit pas les choses sous cet angle. Deux camps presque irréconciliables se font face, et les fans prévoient de se rassembler dimanche pour maintenir la pression. Avec l'espoir prochain d'un nouveau départ, et d'une réponse à la question que tous se posent : mais où VA le club ?

D’ordinaire, les cygnes sont là, juste à côté de nous, sans qu’on y prête vraiment attention. On se contente de leur balancer du pain de temps en temps (ce qu’il ne faut pas faire puisque leur système digestif n’est pas adapté). Depuis une dizaine de jours néanmoins, impossible de passer à côté du volatile fièrement représenté sur le blason du Valenciennes FC. Encore plus après le subtil commentaire posté sur Facebook par Peter Schliesser, actionnaire minoritaire du club : « Dis à tes copains les supporters de merde d’aller se faire sodomiser, le VAFC c’est pas eux, c’est nous car si le VAFC est encore debout c’est grâce à nous et certainement pas à eux. » Des frictions qui rappellent, malgré l’évolution du visage de la région, que le Nord reste un terrain miné.

Le chant du cygne

Un homme cristallise ces tensions : Eddy Zdziech. Aux manettes depuis la descente du club en Ligue 2 en 2014, le président valenciennois présente un bilan sportif pour le moins mitigé avec une septième place comme meilleur classement, tous les autres exercices s’étant achevés entre les douzième et seizième rangs. « Ça fait sept ans qu’on joue le ventre mou, qu’on passe la DNCG avec une masse salariale encadrée, déplore Stéphane, porte-parole des Ultras Roisters. Avec un minimum d’ambitions, avec un minimum de moyens supplémentaires et une union de toutes les forces du Valenciennois, on pourrait faire rêver le public et jouer bien mieux que ça. Pas la Coupe d’Europe, mais essayer de jouer la montée, de jouer les coups à fond en Coupe de France. » Eddy Zdziech n’a pas donné suite à nos sollicitations pour s’exprimer, le club précisant qu’il « n’y aura plus de prise de parole sur le sujet ».

Cette saison encore, les pensionnaires du Hainaut soufflent le chaud et le froid. La victoire héroïque à Toulouse, arrachée grâce à un quadruplé de Joffrey Cuffaut, a été suivie de lendemains qui déchantent. À l’image des revers contre Amiens, malgré 35 minutes en supériorité numérique, et Nancy, après avoir mené 2-0. À mi-saison, le VAFC pointe ainsi à une anonyme dixième place, avec dix points de retard sur le podium et huit d’avance sur la zone rouge. D’où un ras-le-bol des supporters. « On stagne, le club devient un club de Ligue 2 tout à fait quelconque. C’est usant, témoigne Mookie, président de l’association Mentalita Valentiana. On a un président omnipotent, qui a fait le vide autour de lui. Il a beaucoup de mal à fédérer et il dépense peu d’argent à la hauteur de ce que doit être un club de foot pro. Nous, supporters, on en a plein le cul. »

On n’est pas un club riche, on est une petite ville, il y a une sorte d’humilité à Valenciennes, et Eddy Zdziech n’est pas du tout dans ces valeurs.

« Quelque chose s’est cassé, poursuit-il. Quand vous voyez qu’on n’est pas capable de laisser la recette à un club amateur en Coupe de France, tout ça pour gagner 50 000 euros… On n’est pas un club riche, on est une petite ville, il y a une sorte d’humilité à Valenciennes, et Eddy Zdziech n’est pas du tout dans ces valeurs. Beaucoup de gens sont lassés de ses attitudes. Des dossiers emmerdants par rapport à la présidence actuelle, on en a tellement… La fois où l’ordinateur d’un journaliste est tombé en salle de presse, l’histoire de la signature de Nuno Da Costa, à qui il avait fait signer un contrat avec son entreprise de soudure, etc. Dans notre section, on côtoie régulièrement des gens du club, on sent une sorte de mal-être chez les salariés. On a entendu des histoires glauques de prudhommes, de harcèlement… »

« Un président qui ne veut pas lâcher son jouet »

Une crise dont la clef se situe peut-être dans la poche de l’ancien président Jean-Louis Borloo, interpellé par plusieurs groupes de supporters dans une lettre publiée le 10 janvier. « C’est un peu la figure centrale du Valenciennois. Il a permis beaucoup de choses dans les années 1980-1990, il a beaucoup œuvré pour le sauvetage du club quand on est descendus de Ligue 1, souligne Mookie. On sait très bien que ce n’est pas Eddy Zdziech qui a sauvé le club, mais les actions de Jean-Louis Borloo. C’est lui qui est allé à la DNCG, qui a trouvé l’argent, qui a négocié certaines dettes… S’il n’avait pas été là en 2014, le club n’existerait certainement plus aujourd’hui. » La réaction de l’ancien ministre, qui n’a pas non plus souhaité répondre à nos sollicitations, se fait encore attendre.

De son côté, Eddy Zdziech a appelé au calme par le biais d’un communiqué publié le 11 janvier, insistant sur le fait qu’il restait « plus que jamais attaché (au) club et à ses valeurs, ainsi qu’à l’ensemble de ses supporters ». Ce qui fait rire jaune le porte-parole des Ultras Roisters : « Attaché au club, on l’a bien compris. On pense qu’il est très, très attaché, et qu’on va avoir du mal à le faire partir. » Désireux de prendre des parts plus importantes, Patrick Partouche se retrouve pour le moment dans une impasse. Au grand dam de Mentalita Valentiana : « On aimerait bien que ce soit ce type-là parce que ce n’est pas le même réseau, les mêmes ambitions, les mêmes moyens, le même relationnel. C’est l’antithèse de Zdziech, il pourrait rassembler. Lui est demandeur, mais on est bloqué par un président qui ne veut pas vendre ses parts et lâcher son jouet. »

Le 24 décembre, les fans ont alors envoyé une lettre fictive de licenciement à leur président, clin d’œil au courrier reçu la veille de Noël par trois anciens salariés du club en 2014. Ils marqueront le coup de la fin du préavis d’un mois en se rassemblant ce dimanche. « Pour fêter son départ, fictif malheureusement », sourit Stéphane. « On a prévu de venir avec quelques cartons pour qu’il puisse emmener ses affaires, quelque chose de symbolique », précise Mookie. À peu de choses près, être président à Washington ou à VA, même combat.

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