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Valence-Real 2000, la piste aux étoiles
Convoqués pour un match en retard de la 16e journée de Liga un soir de Ligue des champions, le FC Valence et le Real Madrid étaient pourtant les deux meilleures équipes d’Europe en fin de saison 1999/2000. Retour sur cette finale de C1 où la psychologie a balayé la logique d’un revers de la main.
Afin de garder la tête haute dans les moments difficiles, il faut se dire que les échecs donnent toute la saveur des victoires futures. Perdre pour mieux gagner, en gros. Voilà une philosophie que les supporters du FC Valence connaissent sur le bout des doigts. Si, aujourd’hui, les Murciélagos croupissent à une décevante quinzième place en championnat, et si le club possède tout de même dans son palmarès une Coupe de l’UEFA remportée en 2004, la ville de Valence observera d’un œil nostalgique ce match face au Real Madrid. Parce qu’il se joue le même jour où d’autres équipes jouent leur huitième de finale de la Ligue des champions. Parce que la Ligue des champions lui rappelle une époque faste. Et parce que le Real Madrid, cet ogre national sur l’échiquier européen, s’est permis de leur apprendre à préparer, jouer et gagner une finale de la plus prestigieuse des compétitions européennes. C’était le 24 mai 2000 au Stade de France et, malgré lui, le valencianismo garde cet épisode bien ancré dans sa mémoire.
Angloma : « Nous étions trop favoris »
C’est une journée historique pour l’Europe entière. Pour la première fois depuis 1997 et l’instauration d’une participation nationale plurielle dans la compétition, deux équipes d’un même pays vont s’affronter pour sacrer le 45e vainqueur de la reine des coupes d’Europe. En demi-finale, le Real Madrid s’est défait du Bayern Munich, qui l’avait pourtant malmené plus tôt dans la saison en phase de poules. Mais la Casa Blanca est passée, et elle le doit en partie à son vilain petit canard Nicolas Anelka, auteur de deux des trois buts essentiels à la qualification. De l’autre côté du terrain, Valence s’avance comme la grande révélation de cette C1. En quarts, les Ché ont battu la Lazio Rome, future championne d’Italie, puis renversé le Barça de Louis van Gaal en demies. Face à de tels exploits, Héctor Cúper se veut modeste. « Nous n’avions pas une équipe spectaculaire, explique le technicien argentin au site de l’UEFA. Nous ne pouvions pas divertir les spectateurs avec des gestes incroyables. Dès que nous avions des opportunités, on les convertissait. Peut-être avions nous une formule magique… Ce qui est sûr, c’est que nous étions très solides défensivement. C’était ça notre force, nous avions une unité énorme dans notre équipe. » De quoi envisager la finale face au Real Madrid avec de l’ambition.
Le hic, c’est que Valence, déjà sûr d’accéder à la prochaine C1, n’aborde pas cette finale dans les meilleures dispositions. Avec la suspension de son arrière gauche Amedeo Carboni, le quatuor défensif d’expérience composé de l’Italien, Miroslav Djukic, Mauricio Pellegrino et Jocelyn Angloma – trente-trois ans de moyenne d’âge ! – ne peut être couché sur la feuille de match par Cúper. Cible des grand clubs européens, El Piojo Claudio López entend aussi les sirènes de la Lazio lui chanter une douce mélodie en vue de le faire signer pour la saison prochaine. Et puis, bien sûr, il y a l’adversaire. Bien que décevant en Liga avec une cinquième place au classement, le Real Madrid compte dix finales de C1 jouées dans son histoire, pour sept trophées obtenus. « L’expérience européenne du club a fait la différence ce soir-là, surtout chez nous, retrace Jocelyn Angloma. Nous étions trop favoris, trop pris par l’enjeu, méconnaissables. En face, on savait aussi que des joueurs avaient beaucoup de qualités : Roberto Carlos, Raúl, Morientes, Redondo… » Même son de cloche chez Luis Milla, sur le banc des remplaçants à Saint-Denis : « Les grandes équipes, elles restent toujours au top. En Liga, on les avait vaincus au Bernabéu. On les avait même écrasés l’année d’avant en Coupe du Roi. Tout le monde pensait qu’on allait remporter cette finale… »
La leçon de Paris
Dans les rues de la capitale française, des supporters du FC Valence se promènent avec un T-shirt au message plein d’espoir : « Hola! Je suis valencien et mon jour de gloire est arrivé ! » Pas de pot, la gloire sera remise à plus tard. L’aventure européenne se termine pour les deux équipes ce soir-là, mais une seule existe sur le terrain. Sans pitié, le Real Madrid déferle sur le FC Valence en TGV, pour une Très Grosse Valise. Valence encaisse un premier but venu du côté gauche de la défense, celui délaissé par Carboni. Fernando Morientes claque une tête piquée et vient donner un avantage déjà définitif aux Blancos (39e). Plus sereins, plus organisés et de plus en plus supérieurs, les Madrilènes poursuivent leur marche en avant en seconde période, ponctuée par deux nouveaux buts : une reprise acrobatique de Steve McManaman (67e), puis un face-à-face entre Raúl et Cañizares, remporté haut la main par le premier cité (3-0, 75e). Le match se termine, l’attribution du trophée ne souffre aucune contestation possible. Même si, à Valence, la frustration est immense. « Je me souviens encore qu’après cette finale de Paris, je suis rentré chez moi et je me suis dit : « Mais quand est-ce que je vais pouvoir rejouer une finale de Coupe d’Europe ? »L’année suivante, l’histoire se répète…, évoquera plus tard Cúper dans l’émission argentine Simplemente Fútbol. Pour me remonter le moral, je me dis que pour gagner une finale, il faut déjà être là pour la jouer. Cela veut dire qu’il y a du travail derrière tout cela. » Et ce n’est pas la situation actuelle du FC Valence qui va le contredire.
Par Antoine Donnarieix
Propos d'Angloma et de Milla recueillis par AD