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Une Roma redimensionnée ?

Par Éric Maggiori
Une Roma redimensionnée ?

Balayée par le Bayern Munich, mardi soir, au stadio Olimpico (1-7), l'AS Roma a clairement pris une claque dans la gueule. Pourtant, les Romains restent deuxièmes de la poule. Juste un jour sans, ou une alerte pour la suite ?

C’est forcément une défaite qui fait mal à la tête. 7-1 à la maison. Le parallèle avec Brésil-Allemagne est tellement évident que cela en est presque flippant. Une équipe allemande qui mène 5-0 après une demi-heure, dont un but de Thomas Müller, un public abasourdi, l’équipe adverse qui tente de réagir en début de seconde période, mais qui tombe sur un Neuer impérial. Seul changement : face au Brésil, l’Allemagne avait encaissé un but alors qu’elle menait 7-0. Cette fois-ci, la Mannschaft de Munich a pris un pion alors qu’elle avait 5 buts d’avance, mais en a remis deux derrière. Un détail. Le fait est que cette défaite fait mal. Dans les têtes, d’abord. Depuis qu’il entraîne la Roma, c’est la deuxième fois, seulement, en 52 matchs, que Rudi Garcia semble impuissant face à plus fort que lui. La première fois, c’était le 5 janvier dernier, un 3-0 encaissé à Turin contre la Juve de Conte. Depuis le début de l’exercice 2014-15, la Roma semblait souveraine. En championnat, elle a remporté pratiquement tous ses matchs assez facilement (en encaissant un seul but lors de ces six victoires) et ne s’est inclinée que sur la pelouse de la Juventus, 3-2, au terme d’un match aux mille controverses. Même en Ligue des champions, la Louve a impressionné. 5-1 face au CSKA Moscou, un très bon nul 1-1 sur la pelouse de Manchester City. En d’autres termes, rien ne semblait prédestiner les Romains à une telle déconvenue face au Bayern. Et pourtant.

Robot Neuer

Comme pour Brésil-Allemagne, difficile d’analyser un match au résultat aussi absurde. Le score semble dire qu’il y a un monde d’écart entre les deux formations. Le fait est que le match aurait pu prendre une tout autre tournure. Car d’un côté, il y a un gardien qui a tout arrêté, Neuer, et de l’autre, un De Sanctis qui n’a pas touché le ballon, et qui est même parfois coupable sur certains buts (le deuxième de Robben, notamment). Quand le Bayern menait 1-0, la Roma a eu une énorme occasion pour égaliser, mais Neuer s’est dressé en face d’elle. Cela aurait fait 1-1, ce n’était plus le même match. Après, avec des si, on refait le monde. Mais comme l’a admis Guardiola en personne au terme de la rencontre, « le score ne reflète pas un tel écart entre les deux équipes » .

Plusieurs choses, donc, pour expliquer cette défaite. D’abord, Rudi Garcia n’a peut-être pas choisi la bonne stratégie. En Serie A, la Roma a l’habitude de mettre en place un pressing très haut et d’étouffer son adversaire, comme le faisait d’ailleurs la Juve de Conte. Et cela fonctionne : il suffit de revenir trois jours en arrière et de regarder le match face au Chievo, où les Giallorossi menaient 3-0 après une demi-heure, pour s’en convaincre. Contre les Bavarois, Garcia est arrivé avec des ambitions offensives. Problème : le Bayern n’est pas le Chievo. « J’ai été trop ambitieux, j’ai voulu jouer l’offensive, c’est de ma faute » , a admis à chaud le coach français au terme de la rencontre. On pourrait y voir ici un parallèle avec la première manita (5-0) collée par le Barça de Pep au Real de Mourinho. Un Mou qui avait tenté de jouer contre le Barça comme il jouait face aux autres. Résultat, il s’est fait démolir. Lors des confrontations suivantes (et Dieu sait qu’il y en a eu), il avait appris de ses erreurs, et son Real n’a plus jamais coulé à ce point.

814 minutes d’invincibilité

Immédiatement après la défaite, les réseaux sociaux et même les journalistes italiens se sont déchaînés. En cause ? Le niveau du championnat italien. Bah oui, si le deuxième de Serie A, qui se balade dans son championnat, se prend 7-1 par le leader du championnat allemand, c’est forcément que la Serie A est devenu une compétition en mousse. Aussi facile que cela ? Non, évidemment. Tirer des conclusions et des analyses d’une seule confrontation n’a aucun sens. Car dans ces cas-là, on peut reprendre le 7-0 claqué par le Bayern au Barça il y a deux ans (4-0, 0-3) et dire que la Liga est un championnat tout naze, ou ressortir la manita infligée par le Real au Bayern l’an passé (1-0, 0-4) et affirmer que la Bundesliga a un niveau déplorable. Ça ne marche pas comme ça. Chaque match a son histoire bien à lui. Et si l’on prend toutes les confrontations entre Italiens et Allemands depuis 2010, on arrive à un bilan de 9 victoires italiennes, 10 victoires allemandes et 3 nuls. Pas franchement un monde d’écart. Et puis, à tirer des conclusions sur un seul match, on peut aussi suivre la fameuse logique de la cour de récré : la Roma a perdu 7-1 contre le Bayern et City n’a perdu que 1-0, donc City est plus fort que la Roma. Ah, mince, on peut aussi dire que la Roma a gagné 5-1 contre le CSKA et que City a fait match nul 2-2 en Russie, donc la Roma est plus forte que City. Absurde.

Non, tout est une histoire de moment et de dynamique. Le Brésil avait affronté l’Allemagne à un moment précis, à un point précis, avec des conditions précises. Il est pratiquement certain que si les deux équipes s’affrontaient à nouveau aujourd’hui, vu leurs dynamiques respectives actuelles, le score ne serait pas le même. C’est la même chose pour ce Roma-Bayern. Sur ce match, rien à dire, le Bayern était largement au-dessus. Point. On parle là d’une équipe qui venait d’en coller 6 au Werder, et 4 à Hanovre. Face à un tel niveau de confiance, la Roma peut presque se féliciter d’avoir marqué un but à Manuel Neuer, qui n’en avait plus encaissé depuis 814 minutes (1-1 à Schalke le 30 août dernier). Donc, non, la Roma ne sort pas redimensionnée de ce match. C’est une claque, oui, indéniablement. Un crochet du droit, même. Il va falloir quelques jours pour s’en remettre. Mais la vie reprendra dès ce week-end avec un déplacement sur la pelouse de la Sampdoria. Rudi devra remobiliser ses troupes, mais ça, celui que l’on a surnommé « le sergent Garcia » sait le faire. Il l’a prouvé la saison dernière, lorsqu’il avait récupéré une équipe qui avait perdu toute confiance. Et il l’a emmenée en Ligue des champions.

Public exemplaire

De plus, tout n’est pas à jeter pour cette Roma. Si l’on fait abstraction du score (difficile, c’est sûr), la formation giallorossa peut trouver quelques motifs de satisfaction, sur plusieurs points. D’une, sur l’attitude de son public. Tout au long de la rencontre, les tifosi du Stadio Olimpico, qui étaient venus en nombre, n’ont jamais cessé d’encourager leur équipe. Même à 5-0. Même à 7-1. Une attitude extrêmement louable en Italie, où les tifosi ont souvent tendance à siffler leur équipe dès qu’elle perd. De deux, grâce au coup de pouce de ses amis russes, la Roma conserve la deuxième place du groupe. Le classement voit le Bayern seul en tête avec 9 points, la Roma deuxième avec 4 unités, City avec seulement 2 points, et le CSKA avec 1 point. La Louve garde donc son destin entre les mains, et il semble désormais écrit que la qualification pour les huitièmes se jouera lors de la dernière journée, avec la réception de Manchester City. Il se sera alors passé près de deux mois depuis la défaite face au Bayern, et il y aura eu un match retour à l’Allianz Arena. Le temps de se refaire une santé, donc, mais aussi d’apprendre de ses erreurs et de réengranger de la confiance. Mais pas trop quand même, hein. Car un léger excès de confiance peut aussi jouer des tours. Ce n’est pas Rudi Garcia, en ce mercredi matin, qui vous dira le contraire.

Dans cet article :
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