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Une journée au Golden Foot Award

Par Christophe Gleizes, à Monaco
Une journée au Golden Foot Award

Créé en 2003, le « Golden Foot Award » récompense chaque année un footballeur de plus de 28 ans, lors d'une cérémonie de gala organisée à Monaco. Lundi dernier, plusieurs vieilles gloires s'y sont donné rendez-vous, de David Trezeguet à Gheorge Hagi, en passant par Rinat Dasaev et Daniel Passarella. Football champagne et petits fours.

À Monaco, conduire un bus est un métier délicat. Lancé sur les routes en lacet de la Principauté, il convient d’esquiver les bimbos peroxydées qui traversent hors des clous, lunettes de soleil sur le nez, aveuglément guidées par leurs caniches. Sur la route, il faut ensuite piler net derrière un mec en costard, flanqué au milieu du passage, qui exige qu’on déplace les barrières qui l’empêchent de garer sa Porsche Carrera. Dans cette jungle urbaine aussi belle que sauvage, l’imposante silhouette du Grimaldi Forum se dessine enfin, au détour d’un virage. En ce lundi d’octobre, les meilleurs footballeurs de la planète s’y sont donné rendez-vous pour le Golden Foot Award, un prix international créé en 2003 par Antonio Caliendo, un agent très connu dans le milieu.

Le Golden Foot quoi ? Bonne question. De ce côté des Alpes, personne ne connaît vraiment. « C’est un prix très différent du Ballon d’or, cela n’a rien à voir » , entame tout sourire l’ancien agent de David Trezeguet, entre deux petits fours pas mal fichus : « C’est un trophée qui ne juge pas les performances sur l’année civile, mais sur l’ensemble de la carrière. Il ne concerne que les joueurs de plus de 28 ans en activité, à qui le public souhaite rendre hommage pour leur longévité au plus haut niveau. » Bien moulé dans son costume, Mamadou Bakayoko, le directeur France de la compétition, prend le relais du boss : « Inutile de vous dire pourquoi ça fait rêver(rires). Monaco, on le sait tous, c’est une ville qui se veut plutôt accueillante. C’est un événement qui se veut très glamour, très chic, tout en maintenant le côté sportif qui est primordial à nos yeux. »

« Même la reine d’Angleterre ne pourrait pas refuser »

Ces dernières années, la liste des lauréats est plutôt prestigieuse : Baggio, Nedvěd, Ronaldo, Ronaldinho, Totti, Giggs, Drogba, Ibrahimović et Iniesta se sont récemment succédé au palmarès, où chaque joueur ne peut gagner qu’une fois, une autre différence notable avec le prix fondé par France Football. Le fonctionnement du vote est assez simple : chaque mois de janvier, un jury de journalistes dresse une liste de trente candidats potentiels, bientôt ramenés à dix suite à un sondage en ligne. Après un second vote du public, sur le site officiel, le nom du gagnant est à chaque fois dévoilé en octobre. « J’aimerais pouvoir vous l’annoncer en secret, mais vous n’apprendrez pas le nom du gagnant avant 16h30, comme tout le monde » , sourit Mamadou, qui se vante d’avoir reçu « plus d’un million de votes cette année » , un chiffre impressionnant mais impossible à vérifier. En plus de remporter un adorable pied en or, d’où le nom de la distinction pour ceux qui suivent, l’heureux élu est appelé à laisser un moule en bronze de ses empreintes sur la promenade des champions, qui longe le bord de mer de la principauté. Néanmoins, pour accélérer un peu le processus, les organisateurs n’hésitent pas à piocher dans l’immense réseau de l’agent italien pour dépêcher sur place d’anciennes gloires, elles aussi honorées en marge de chaque édition. Cette année, le plateau est assez alléchant : David Trezeguet, Gheorge Hagi, Daniel Passarella et Rinat Dasaev succèdent à Hakan Sükür, Antonin Panenka, Hidetoshi Nakata et Jean-Marie Pfaff, invités l’année dernière. « Un honneur » disent les uns, « une fierté » affirment les autres. Vraiment ?

Pour s’en assurer, direction la conférence de presse matinale, où les stars de la journée sont toutes là, assises en rang d’oignon. Sourire béat et T-shirt échancré, Ilario Calvo fait office d’animateur. Oui, Ilario Calvo, l’ancien chroniqueur de Christine Bravo. Il y a quelque chose de surréaliste à voir l’ex-candidat de La Ferme célébrités traduire maladroitement les plus grandes stars du ballon rond, mais enfin, tout est possible à Monaco. Le plus édifiant reste encore les questions des journalistes italiens, venus en nombre servir la soupe au nouvel ambassadeur de la Juventus : « David, qui est le plus fort selon toi entre Messi et Ronaldo ? » , « David, qui est le meilleur joueur avec qui tu aies joué dans ta carrière ? » , « Penses-tu que la Juventus puisse gagner un cinquième titre d’affilée cette année ? » Tandis que l’international français livre ses réponses, les autres stars délaissées ronronnent. Rinat Dasaev, l’ancien meilleur gardien du monde dans les années 80, est même sur le point de s’endormir, quand une question collective le réveille en sursaut. Suppléé par sa traductrice, son timbre de voix blasé et monocorde suffit à faire frémir l’assemblée d’un rire nerveux. « Il était au match de l’ASM hier, il est très fatigué » l’excusera plus tard Mamadou Bakayoko, qui gère la journée au pas de course : « Il dort un peu c’est vrai, mais c’est à cause du décalage horaire. Et puis il faut aussi penser au changement de température. Il n’a pas le même temps en Russie. Passer du chaud au froid, du froid au chaud, c’est pas évident. » Implacable démonstration. Une autre théorie voudrait que les joueurs viennent essentiellement pour empocher un joli chèque, ce que démend Mamadou, qui insiste : « Ce n’est pas difficile de les ramener, ils sont très contents d’être ici et on les remercie. Vous savez, une invitation du prince Albert, c’est quelque chose. Même la reine d’Angleterre ne pourrait pas refuser. »

Le Hall of Fame du football

En attendant la cérémonie, les festivités se poursuivent au septième étage du Fairmont hôtel, où les ringards sont heureux de ne pas avoir oublié leur « pass VIP » . Solidement disposé, le buffet cinq étoiles achève de convaincre les derniers sceptiques. Ici, on parle vraiment football champagne. « Le football, c’est du spectacle, et c’est important pour nous de véhiculer cette idée » , reprend Mamadou sans finir son dessert, puisque c’est déjà l’heure d’aller chercher le grand gagnant de la journée, qui vient d’atterrir à Nice. L’occasion de s’intéresser un peu à Jim Totime, qui prend des photos avec vue sur la mer et yatchs de milliardaires. « Il y a un très beau soleil, on a de la chance » , sourit l’assistant de Mamadou, très utile aujourd’hui puisqu’il parle cinq langues : « Le Golden Foot, j’aime bien voir ça comme le Hall of Fame du football, il n’y a ici que des joueurs qui ont marqué leur génération. Il faut en profiter. Là, j’ai parlé à Passarella pendant le repas. Il est supporter de River, moi je suis supporter de Boca, c’était assez tendu. Mais tant pis(rires). On peut changer de femmes, on peut renier ses enfants, mais la passion pour un club, c’est éternel. » Tandis que les stars s’échappent loin des regards et des questions, l’après-midi s’écoule doucement. Bien calé sur les fauteuils en terrasse, on échange numéros et anecdotes entre journalistes, recruteurs et anciens pros.

L’heure tant attendue arrive enfin. Après quelques minutes d’attente, Samuel Eto’o déboule tout sourire sur le tapis rouge, au bras de sa compagne ivoirienne. Il est le grand gagnant. Les flashs crépitent sous les applaudissements mollassons de l’assemblée, tandis que le bégayant Louis Ducruet, qui remplace pour l’occasion Albert II, lui remet son pied teinté d’or. Dans son costume bleu satiné, le « plus grand joueur africain de tous les temps » , comme l’annonce au micro un Ilario Calvo ivre de bonheur, se livre à l’exercice de l’interview publique, répondant avec une belle authenticité aux questions préparées à l’avance dans sa chambre d’hôtel numéro 5066 : « Pour un jeune garçon africain comme moi (sic), remporter ce prix, c’est forcément une émotion particulière. Chez nous, en Afrique, le rêve est pratiquement interdit. Partir de là où je suis parti et être maintenant un des lauréats du Golden Foot, c’est une grande fierté. Même après ma mort, les gens viendront toujours se promener à Monaco et se rappelleront de moi grâce aux empreintes. » Un exercice auquel le Camerounais s’est livré avec une belle agilité, au contraire de ceux qui l’ont précédé. Visiblement pas au courant du protocole, Daniel Passarella a compris au bout de très longues secondes qu’il lui fallait enlever ses chaussures trop serrées, ce qui n’a rien arrangé. Le double champion du monde argentin a néanmoins eu l’honneur de recevoir son pied des mains de l’immense Titi Camara, tandis que David Trezeguet a pu claquer la bise sur scène à son ancien coéquipier José Cobos, « très honoré de représenter le maire de Nice et de remettre ce prix à un incroyable joueur de football » .

« Samuel Eto’o en hélicoptère »

Après une brève visite de la promenade, où Pelé a posé la première dalle, la soirée se termine enfin. Coucher de soleil sur la Méditerranée et cocktail de crevettes dans la main, il n’y a vraiment pas de quoi se plaindre. Sauf pour Jim, qui doit suivre partout les allers et retours de Samuel Eto’o, sa sculpture dorée dans les bras : « Je ne peux pas m’éloigner de lui à plus de cinquante mètres, c’est du boulot. » Lancé dans son tour d’honneur, le Camerounais profite du moment, tandis que les supporters locaux hèlent désespérément David Trezeguet, de retour à la maison. Ce dernier finira comme tout le monde sa soirée en charmante compagnie au Nikki Beach, où débarque Mamadou sur les coups de 22 heures : « Je suis épuisé, j’ai dû raccompagner Samuel Eto’o en hélicoptère pour qu’il puisse reprendre son jet pour la Turquie. » . Faute de budget, la soirée s’éteint toutefois rapidement. Les plus chanceux la poursuivront au restaurant, entre initiés de la Principauté, tandis que les moins fortunés quittent les lieux, direction le kebab le plus proche. Fini le faste du Fairmont et les lumières factices. Mais bon, c’est bien aussi, l’hôtel Ibis. Juste à coté de la gare de Nice.

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