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Une fin amère pour l’ère Guardiola
À quelques jours de son dernier match sur le banc du Bayern Munich, Pep Guardiola voit son bilan réduit à trois demi-finales de Ligue des champions perdues. La preuve ultime que pour marquer l'histoire du club le plus titré d'Allemagne, il faut soulever des montagnes.
« Une fin amère. » C’est ce que titre en substance une grande partie de la presse allemande ce mercredi matin. Moins dure qu’à l’accoutumée avec Guardiola, cette dernière ne tarit pas d’éloges sur le jeu proposé par les Bavarois mardi soir et met leur défaite sur le compte d’un manque de chance et de cette fameuse règle du but à l’extérieur. Mais même si les mots sont doux et respectueux pour la première fois depuis longtemps à l’encontre de cette équipe et de son entraîneur, le bilan reste pour beaucoup le même. « Même si ce match était un superbe exemple de ce que peut être le Bayern, il ne restera de lui qu’une valeur sentimentale » , explique le magazine Kicker. Et lorsque les images de cette rencontre folle s’estomperont dans les jours et mois à venir, le résultat seul restera dans la tête des supporters, joueurs et dirigeants, qui attendaient plus du meilleur entraîneur du monde. Le mandat de Guardiola n’est pas un échec retentissant. « Les championnats et Pokal gagnés ne doivent pas être seulement des lots de consolation pour le club » , argue Kicker. Mais il n’est pas une franche réussite non plus.
Des titres qui ne suffisent pas
Guardiola ne restera vraisemblablement pas comme un entraîneur légendaire du Bayern malgré ses titres nationaux remportés en masse. Son caractère particulier a souvent été pointé du doigt. Son envie de tout réformer aussi. Si on regarde de plus près, peu de joueurs ont vraiment progressé sous ses ordres si on excepte Jérôme Boateng. Et la plupart de ses recrues, achetées en grand nombre, n’auront eu qu’un impact sportif très limité. Que Thomas Müller, si souvent critique envers Guardiola, soit celui qui rate le potentiel penalty de la victoire mardi soir est évidemment le comble de l’ironie – surtout lorsqu’on sait que sa non-titularisation lors du match aller avait provoqué un tollé. Et si les joueurs ont publiquement soutenu leur entraîneur mardi après la défaite, il ne faudra sans doute pas attendre longtemps pour que les langues se délient à Munich. Une spécialité locale veut que quasiment chaque entraîneur soit vivement critiqué après son passage s’il n’a pas rempli sa mission. Guardiola ne sera malheureusement pas épargné. Car même s’il a apporté de nombreuses choses au club, la somme de ses échecs pèsera toujours plus que celle de ses succès dans l’inconscient collectif d’un club qui ne supporte pas l’échec. Et qui, depuis son année cauchemardesque en 2012, ne veut plus connaître la défaite.
L’homme qui n’a pas fait le triplé
Il serait facile de dire que la presse allemande, ainsi que les supporters du Bayern ont été trop durs avec Pep depuis le début. Et que ces derniers ont souvent attendu avec impatience qu’il tombe de haut. Du reste, c’est sans doute un peu le cas. « Je ne suis pas encore mort » , avait déclaré Guardiola la semaine passée lorsque la presse lui était tombée dessus après le match aller contre l’Atlético. Mais en arrivant en Bavière, le Catalan connaissait les règles du jeu. Hoeness and co ne l’ayant pas engagé pour qu’il visite du pays et colle des roustes à Wolfsburg. Guardiola devait faire passer le Bayern dans une autre dimension. En faire le meilleur club du monde de manière incontestée. Absolue. Perdre trois fois en demi-finales de Ligue des champions (une première dans l’histoire du club) ne faisait pas vraiment partie du programme. La malchance de Guardiola aura sans doute été de prendre en main une équipe qui venait de tout gagner sous la houlette d’un entraîneur extrêmement apprécié par tout le pays. Pour être autant aimé que le grand Jupp, Pep aurait dû remporter le triplé trois années de suite. Pour marquer le Bayern, il était condamné à l’exploit, et il le savait très bien. D’exploit, il n’y aura donc pas eu. Si le match contre la Juventus, gagné avec les tripes, a fait croire que cette année était la bonne pour l’Étoile du Sud, les Bavarois ont trouvé sur leur chemin encore plus vaillants qu’eux. Il n’y a fondamentalement rien de mal à ça. Mais le Bayern ne l’entendra plus de cette oreille d’ici quelque temps. Entraîner un club surnommé Rekordmeister n’est pas chose aisée. Guardiola l’a appris à ses dépens. À Ancelotti de maintenant relever le défi.
Par Sophie Serbini, en Allemagne