S’abonner au mag
  • France
  • FFF

Concours d’agent de la FFF : le point de la discorde

Par Clément Gavard

Au printemps dernier, cinq recalés à la licence d’agent de joueurs saisissaient la FFF, puis la justice après avoir estimé qu'une erreur de correction lors de l'examen leur avait coûté leur diplôme. Huit mois plus tard, l'affaire est toujours en cours, et les plaignants désespèrent d'obtenir gain de cause.

Concours d’agent de la FFF : le point de la discorde

Dans quelques mois, vers le début du printemps en mars, ils devraient être une centaine à passer la deuxième session spécifique pour tenter d’obtenir leur licence d’agent FFF, essentielle pour exercer sur le territoire français. En 2023, ils étaient 22 à décrocher le précieux sésame, sur 188 candidats. Parmi les recalés, ils sont cinq à avoir fait un recours auprès de la Fédération après avoir constaté une erreur à la correction. Pour être admis, il faut atteindre la note de 14/20, eux sont bloqués à 13 à cause d’une question. « Si je devais avoir mis trois questions sur le podium de celles où j’étais certain de la réponse, elle en faisait partie », assure Antoine Wattier, l’un de ceux qui s’estiment lésés. Xavier en est un autre : « Je m’attendais à avoir 14 par rapport à toutes les corrections faites par les formations. En découvrant ma note, je me dis que j’ai peut-être fait une erreur en rapportant les questions. Je contacte mes correcteurs qui me disent tous qu’il n’y a aucune ambiguïté sur la question concernée, j’ai la bonne réponse. Ils ont fait une erreur et ils ne veulent pas la reconnaître. » Contacté ce mardi après-midi, le service de presse de la FFF n’a pas répondu à notre sollicitation. Ils sont aujourd’hui trois parmi les cinq candidats à conserver l’espoir de voir la justice leur donner raison dans cette affaire, médiatisée en juin dernier et qui n’a toujours pas connu de fin huit mois après les résultats de l’examen.

Le compte à recours

Au centre des débats et de la discorde se trouve la fameuse question 10, qui portait sur la possible suspension d’un joueur dans un cadre très précis (voir ci-dessous) et demandait de se baser sur les règlements généraux de la FFF. Antoine Wattier, Xavier et les trois autres personnes ont coché la réponse E « Aucune réponse n’est correcte », quand la correction a validé la C qui infligeait notamment « au joueur en cause un match de suspension ferme ». Depuis le début de cette histoire, de nombreux avocats spécialisés en droit du sport ont donné raison aux plaignants, en soulignant à chaque fois l’article 226.4 des règlements généraux de la Fédération qui précise que dans cette hypothèse « le joueur encourt une nouvelle sanction ». Ce qui laisse un pouvoir d’interprétation et d’appréciation à la commission. « En droit administratif, on m’a toujours dit qu’il y avait une appréciation littérale des textes, soutient Thierry Braillard, ancien secrétaire d’Etat chargé des sports et représentant de Xavier dans ce dossier. Une interprétation littérale du règlement fait dire qu’on ne sait pas quel est le nombre de matchs requis. Ça se joue sur ce point de droit précis. Et sur les quatre sociétés privées qui préparent à l’examen, les quatre trouvent la réponse E à cette question. »

La question 10 et les choix de réponses lors de l’examen de mars 2023.
La question 10 et les choix de réponses lors de l’examen de mars 2023.

L’affaire aurait pu être réglée depuis de nombreux mois, notamment après les premières actions engagées par les candidats s’estimant floués. Il y a d’abord eu une demande de conciliation auprès du CNOSF, qui a estimé que le jury de l’examen était souverain et qui n’a pas retenu la qualification « d’erreur matérielle ». Puis deux recours gracieux auprès de la Commission fédérale des agents sportifs (CFAS) en avril et juin 2023, en vain, avant de saisir le Tribunal administratif de Paris, une procédure toujours en cours. Bruno Satin, agent reconnu qui siège comme suppléant de Stéphane Canard à la CFAS, où l’on trouve par exemple Vincent Ponsot ou Jean Lapeyre, le directeur juridique de la FFF qui se retrouve au centre des critiques dans cette histoire, estime lui que leur pouvoir était limité au sein de cette commission « en formation disciplinaire » pour les inciter à modifier leur décision. « Le problème, c’est que la FFF, comme toutes les institutions, a beaucoup de mal à reconnaître ses erreurs, mais elle a respecté toutes les procédures prévues, admet-il. Ça représente en tout cas un très, très gros préjudice pour ceux qui ne sont pas reçus. » 

Si j’avais eu 10 ou 12, je me serais tu et j’aurais fait profil bas. On accorde le point à ceux qui ont eu la bonne réponse, ça fait quatre agents en plus, ça ne va pas changer le marché et ils ont ce qu’il mérite.

Xavier, un des candidats s’estimant lésés

Antoine Wattier, qui a envoyé « un dossier d’un kilo » à tous les membres du comex de la Fédé, n’est pas très optimiste. Thierry Braillard se veut plus confiant et répète qu’il n’est pas demandé au Tribunal administratif « de dire si la note est bonne ou pas, mais si l’erreur est matérielle ». La FFF ne respecterait en tout cas pas les délais de dépôts de mémoire, « on a l’impression d’être face à un mur », désespère l’avocat. À plusieurs reprises, des erreurs avaient été reconnues, notamment en 2016 dès les recours gracieux lors d’une situation similaire, a fouillé Antoine Wattier. L’année dernière, un point des règlements généraux aurait même été modifié après un recours. « Je pense qu’il s’agit d’un entêtement. On nous a même dit qu’à la suite d’un papier dans la presse, le directeur juridique de la FFF a dit : “Si c’est ça, on ne discute plus” », indique Thierry Braillard. « Ce n’est pas un passe-droit qu’on demande, c’est juste une reconnaissance, enchaîne Xavier. Si j’avais eu 10 ou 12, je me serais tu et j’aurais fait profil bas. On accorde le point à ceux qui ont eu la bonne réponse, ça fait quatre agents en plus, ça ne va pas changer le marché et ils ont ce qu’il mérite. »

« On a voulu se mettre dans les règles… »

Si l’inscription au concours coûte seulement 300 euros, la note grimpe plus rapidement au fil des formations, des allers-retours et de l’aspect logistique. Cela peut aller de 10 000 à 20 000 euros. « Pour certains, c’est des projets de vie, l’aboutissement de quelque chose, c’est pour ça qu’ils ont des recours sur tout et n’importe quoi chaque année. Ils sont tellement habitués qu’ils balancent tout », explique Antoine Wattier. Ils sont deux parmi les cinq candidats à ne pas avoir saisi le tribunal administratif, peut-être en raison des coûts d’avocat. Xavier est dans le foot depuis longtemps, il a entre autres été préparateur physique de Nantes et de Troyes dans les années 2000. En 2010, il souhaite se lancer dans une carrière d’agent, il obtient la licence FIFA en 2014, avant de se décider à passer celle de la FFF : « C’est un vrai sacrifice familial, financier, ça demande beaucoup d’énergie sur trois ou quatre ans, surtout qu’on n’apprend pas à 45 ans comme à 25. » Il faut dire que l’examen est considéré comme très exigeant, « la formation la plus difficile à suivre » pour Antoine Wattier. Bruno Satin parle de « questionnaires devenus de plus en plus alambiqués et machiavéliques afin de faire en sorte que moins en moins de candidats ne soient reçus ». Avant de poursuivre : « Si je devais le passer aujourd’hui, il n’y a aucune chance que je l’ai, il faut être honnête. Ce qu’il faudrait aussi, c’est que les personnes qui font les questionnaires ne soient pas les mêmes que les correcteurs, c’est une suggestion que l’on a d’ailleurs faite. »

Si je devais le passer aujourd’hui, il n’y a aucune chance que je l’ai, il faut être honnête.

Bruno Satin, agent

Antoine Wattier a la possibilité de le passer une deuxième fois, mais il espère toujours obtenir gain de cause, comme Xavier, pour qui c’était déjà la deuxième chance et qui ne pourra plus se représenter à cet examen. Les deux hommes peuvent continuer de travailler, mais ils sont bloqués quand il s’agit de traiter avec des clubs français. « On a voulu se mettre dans les règles, soupire Xavier. Le concours n’a rien à voir avec la fonction ou la profession. Cela leur permettrait de mieux contrôler le marché où l’on trouve souvent des mecs sans licence. La première chose, ce serait de légiférer la profession. » Philippe Diallo, le président de la FFF, aurait été alerté du souci. Bruno Satin : « Dans l’océan de problèmes du foot français, j’ai envie de vous dire que c’est une quantité négligeable pour ces gens-là. Ils ne se rendent pas compte des efforts fournis pour essayer de se mettre en règle. » Pour Xavier, ce serait une occasion pour la FFF d’en « sortir grandie » et de « se rendre humaine ».

Dans les colonnes du Parisien en juin dernier, Jean Lapeyre avait assuré être très ouvert : « Si c’est une évidence et qu’on s’est trompé, on fait amende honorable et on donne le point. On verra. Si la commission estime qu’elle a un doute, elle donnera le point et la licence aux personnes. Si elle n’a pas de doute, elle refusera le recours gracieux et cette affaire se terminera dans les tribunaux. » On ne sait si la probable élection de Jean-Michel Aulas à la vice-présidence de la Fédé dans les prochains jours changera le cours de cette histoire, mais un arrangement à l’amiable semble désormais difficilement imaginable. «  On ira au bout de toute façon », prévient Me Thierry Braillard. En cas de décision négative du Tribunal administratif dans les prochaines semaines, il restera la possibilité de déposer un recours devant la cour administrative d’appel ou même d’aller jusqu’au Conseil d’État.

Dans cet article :
Tchouaméni : un brassard et après ?
Dans cet article :

Par Clément Gavard

Tous propos recueillis par CG, sauf mention

À lire aussi
Logo de l'équipe France U23
Magnétique Akliouche
  • Euro espoirs 2025
  • Qualifs
  • France-Autriche
Magnétique Akliouche

Magnétique Akliouche

Magnétique Akliouche
Articles en tendances
12
Revivez Belgique-France (1-2)
  • Ligue des nations
  • J4
  • Belgique-France
Revivez Belgique-France (1-2)

Revivez Belgique-France (1-2)

Revivez Belgique-France (1-2)
14
Revivez Israël - France (1-4)
  • Ligue des Nations
  • J3
  • Israël-France
Revivez Israël - France (1-4)

Revivez Israël - France (1-4)

Revivez Israël - France (1-4)
Logo de l'équipe Belgique
Les notes des Bleus
  • Ligue des nations
  • J4
  • Belgique-France (1-2)
Les notes des Bleus

Les notes des Bleus

Les notes des Bleus
Logo de l'équipe France
Les notes des Bleus
  • Ligue des nations
  • J3
  • Israël-France (1-4)
Les notes des Bleus

Les notes des Bleus

Les notes des Bleus

Votre avis sur cet article

Les avis de nos lecteurs:

Dernières actus

Nos partenaires

  • Vietnam: le label d'H-BURNS, Phararon de Winter, 51 Black Super, Kakkmaddafakka...
  • #Trashtalk: les vrais coulisses de la NBA.
  • Maillots, équipement, lifestyle - Degaine.
  • Magazine trimestriel de Mode, Culture et Société pour les vrais parents sur les vrais enfants.
  • Pronostic Foot 100% Gratuits ! + de 100 Matchs analysés / semaine

France