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Un stade, peu de lumières
Le craquage d'un supporter lyonnais, dès la troisième minute de jeu, a complètement ruiné un dimanche soir qui s'annonçait palpitant. Si les fans rhodaniens s'étaient déjà distingués par certains comportements plus que discutables en Coupe d'Europe, les antécédents de débordements en Ligue 1 ne sont pas nombreux. Malgré tout, Aulas, qui avait réclamé de lourdes sanctions après Nice-OM, devrait être pris à son propre jeu. Même s'il assure qu'il ne s'agit pas du tout d'un cas similaire.
« Je fais partie des gens qui pensent que la seule sanction possible pour freiner cet état de fait, que ce soit au niveau des joueurs, des dirigeants, des supporters, c’est la pénalité en points. C’est la seule qui fait vraiment peur. » Voilà les recommandations de Jean-Michel Aulas après les incidents de Nice-OM, le 25 août dernier. Sans doute ne pensait-il pas que cette demande allait se retourner contre sa propre équipe. Le président de l’OL, après l’arrêt définitif du match, a eu beau défendre le fait qu’il ne s’agissait pas du tout du même cas que sur la Côte d’Azur, Lyon va sûrement être sanctionné par la commission de discipline.
En lançant une bouteille d’eau en direction de Dimitri Payet, ce supporter – si on peut vraiment l’appeler ainsi – a trahi son propre club et probablement sa propre passion. Qu’un match de l’OL soit gâché, du moins émaillé, par les débordements de fans lyonnais n’est pas une première. Toutefois, c’était surtout sur la scène européenne que les Rhodaniens se distinguaient de cette bien triste manière.
Vraiment l’œuvre d’un homme seul ?
Le plus marquant reste peut-être la réception de Beşiktaş, en quarts de finale de Ligue Europa au printemps 2017. Jean-Michel Aulas s’était carrément rendu au cœur du virage sud, au sein du groupe majoritaire de cette tribune, Lyon 1950, pour calmer le jeu. Un an plus tard, certains supporters s’en étaient violemment pris aux policiers déployés aux abords de l’enceinte avant la rencontre face au CSKA Moscou. Résultat de ces débordements à répétition : l’OL avait dû jouer son match de Ligue des champions face au Shakhtar Donetsk à huis clos, en 2018. Hors pandémie de Covid-19, c’est la seule rencontre sans supporter qu’a abritée le formidable outil.
Est-ce pour autant un accident ? L’œuvre d’un seul homme, d’une brebis galeuse comme le laissait entendre le speaker du stade lorsqu’il a justifié la reprise de la rencontre ? Pas vraiment. Déjà, à moins que ce seul homme soit venu au stade armé d’une demi-douzaine de bouteilles d’eau, il ne semble pas être le seul à s’être lancé dans un chamboule-tout pour dézinguer Payet. Finalement, le fautif est peut-être le seul qui soit juste parvenu à régler la mire. Malgré tout, le patron de l’OL a continué d’insister sur le caractère solitaire de l’auteur du jet et à louer l’excellent service de sécurité. « Il ne s’agit pas du tout d’un groupe de supporters, il s’agit d’un individu seul qui, bon, dans un geste de folie… », expliquait-il chez le diffuseur, sans finir sa phrase. En revanche, les Bad Gones finissaient les leurs en scandant « Payet, Payet, on t’encule », alors que le joueur était encore au sol. Un acte isolé, mais qui n’a pas semblé déplaire à la majorité.
Des tribunes qui s’extrêmisent
En plus d’être un personnage très clivant – « on m’aime ou on me déteste », s’analysait-il dans L’Équipe, il y a un mois -, Payet porte le lourd fardeau de ses années stéphanoises auprès des fans de l’OL. Mais également d’avoir prononcé quelques phrases post-Olympico bien osées, et d’avoir souvent été un des acteurs principaux de ces rencontres régulièrement électriques. Le Réunionnais ne s’est pas privé non plus de tourner en ridicule Aulas sur les réseaux sociaux, lorsque celui-ci réclamait une saison blanche alors que la saison 2019-2020 était foudroyée par la pandémie. Et alors ?
« Dimitri Payet a été également la cible d’insultes à caractère discriminatoire », pouvait-on lire dans le communiqué publié par la LFP, après plus d’une heure d’interruption. Parle-t-on ici des « on t’encule » au titre de propos discriminatoires, ou des insultes davantage liés à la couleur de peau de Dimitri Payet sont apparues ? S’il s’agit du dernier cas, on peut penser que la montée de certains groupes extrémistes – jusque-là discrets dans les travées lyonnaises – n’y est pas étrangère. On peut, entre autres, citer la Mezza, groupuscule d’ultra-droite qui ne se prive plus de montrer sa bâche en déplacement où figure notamment l’emblème de la 33e division SS. Ce fut le cas lors du match à Prague, en octobre dernier. À croire que le coronavirus a mis trop de gens à l’aise…
Par Léo Tourbe