- Coupe du monde 2014
- 8e de finale
- Allemagne/Algérie (2-1)
- Tactique
Un seul Hummels vous manque, et tout est dépeuplé
Malade, le défenseur central du BVB s'est vu contraint de déclarer forfait face à l'Algérie. Une absence qui a complètement désorganisé la défense, mais aussi l'attaque de l'Allemagne. À tel point que Neuer a dû livrer un match immense pour compenser, ce que n'ont pas su faire les milieux de terrain.
Si Joachim Löw veut sauver sa tête et donc enfin remporter un titre, il a tout intérêt à investir séance tenante dans un traitement de cheval pour guérir le fiévreux Mats Hummels. Parce que sans lui, la Nationalmannschaft est passée tout proche d’un naufrage retentissant. Pour le remplacer, Jogi a choisi de recentrer Jérôme Boateng et de titulariser Shkodran Mustafi à droite. Une dernière décision qui a fait couler beaucoup d’encre outre-Rhin, et qui s’est avérée catastrophique. Déjà, c’était seulement la quatrième sélection d’un mec d’à peine 22 ans, qui n’était même pas dans les 23, et qui joue à la Sampdoria. Surtout, il est lui aussi défenseur central, mais n’a ni la vitesse de Boateng ni le courage d’Höwedes. Les Algériens lui ont laissé de l’espace dans son couloir, concentrant leur pressing au milieu du terrain. Ses coéquipiers ont aussi rechigné à le servir, comme s’ils manquaient de confiance en ses capacités – un concept qui remonte à la cour de récré. Et lorsque il l’a été, il n’a pas su régler la mire sur ses centres, le rendant proprement inoffensif. Positionné très haut, il s’est aussi souvent retrouvé pris de vitesse sur les contre-attaques des Fennecs. Donc en gros, une vraie boule noire. Le repositionnement de Boateng fait a priori bien plus sens : c’est son véritable poste, et son association avec Mertesacker est rodée. Malheureusement, si le Munichois a pour lui un physique hors du commun, il n’a pas le sens de la relance du Dortmunder.
Neuer plus fort que le monde
Mertesacker s’est ainsi retrouvé en première rampe de lancement, ce qui l’a obligé à jouer plus haut qu’à l’accoutumée, et donc à être prenable dans son dos. Une situation dont les Algériens ont abusée, en balançant de longs ballons devant. Le show Neuer pouvait commencer. En intervenant loin de sa surface, le portier s’est reconverti le temps d’un match en goal volant, presque libéro, véritable sauveur de la nation faisant irruption inopinément dans le cadre pour mettre un terme à toute velléité algérienne, que ce soit d’un tacle rageur ou d’une tête salvatrice. Homme d’hier et de demain, capable de claquer un sprint pour rattraper Slimani, Manuel a aussi souvent été recherché par ses défenseurs pour s’offrir un peu d’air face au pressing adverse. Une nouvelle preuve en creux de l’importance de l’absence de Hummels, habituellement très à l’aise dans ce genre de situation. Doué techniquement et doté d’un sens précis du jeu long, celui qui jouait attaquant en jeunes au Bayern est également capable de prendre le jeu à son compte en remontant le terrain balle au pied, à l’instar d’un Beckenbauer de la grande époque.
Un remède périssable
Un rôle qu’aurait dû remplir l’un des milieux de terrain. Lahm a bien tenté de descendre entre ses centraux. Mais tout métronome de la passe courte qu’il soit, il n’est pas un quarterback longue distance, capable d’aller chercher son receiver derrière les safeties dans la end zone, ni un running back. De leur côté, Kroos et Schweinsteiger ont joué trop haut pour véritablement influer sur la construction du jeu, se retrouvant même souvent aux abords de la surface de réparation adverse pour frapper, alors que, pour une fois, on les attendait à la passe. Et comme Götze et Özil n’ont pas le physique pour jouer en point d’appui et que leurs tentatives de dribbles se soldaient toutes par des échecs, la Nationalmannschaft était complètement étouffée, privée de solution de passes. Löw a fini par trouver la solution, en deux temps. Tout d’abord, l’entrée de Schürrle à la mi-temps à la place de Mario a permis aux siens de retrouver de la verticalité en gagnant ses duels, fût-ce par la grâce d’un contre favorable, et en prenant la profondeur. Ensuite, la blessure de Mustafi a permis à Khedira de faire son apparition. Et tout est – presque – devenu limpide. Lahm a retrouvé son couloir, ses débordements, ses tours sur lui-même et ses centres, offrant ainsi une nouvelle piste d’attaque aux Allemands et un nouveau territoire à défendre aux Algériens. Sami, quant à lui, joueur double par excellence, s’est chargé de la récupération tout en menaçant de se projeter vers l’avant, soulageant Bastian des basses œuvres et le laissant libre d’orchestrer dans un fauteuil. Malheureusement pour Löw, ni l’un ni l’autre ne sont assurés de pouvoir tenir 90 minutes, encore moins 120. Il ne lui reste donc plus qu’à prier pour qu’Hummels soit rétabli pour vendredi.
Par Charles Alf Lafon