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Un Maroc aux accents ibériques
Sur le terrain, jamais une sélection marocaine en Coupe du monde n’a eu autant l’accent espagnol que celle emmenée par Walid Regragui, au Qatar. Que ce soit parmi les joueurs ou au sein du staff, l’imprégnation culturelle ibérique est indéniable.
Six joueurs sur 26. Près d’un quart du squad marocain a été formé, ou a passé la majeure partie de sa carrière, en Espagne. Achraf Hakimi, façonné par la Castilla du Real Madrid, et Yassine Bounou, qui écume les cages de Liga depuis dix ans (Atlético de Madrid, Gérone, Real Saragosse et FC Séville), ne sont pas les seuls à être imprégnés de la philosophie hispanophone. Font également partie de ce contingent l’attaquant du FC Séville Youssef En-Nesyri, le défenseur de Valladolid Jawad Al-Yamiq, ainsi que les binationaux Mounir El Kajoui (le gardien n°2), et Abdessamad Ezzalzouli.
Le ballon est au centre du travail physique
« Connaissant personnellement Regragui, je peux vous affirmer qu’il se renseigne énormément sur le foot espagnol, leurs méthodes d’entraînement, leurs systèmes de jeu, et qu’il les applique si les possibilités le lui permettent », explique Gabriel Hicham Guedira, DG de la FC Barcelone Escola au Maroc de 2014 à 2018. En conférence de presse d’avant-match, le sélectionneur marocain ne dit pas le contraire : « On connaît l’école de foot espagnol, on a des joueurs qui y jouent. J’aime ce foot et j’aime cette culture. » Plus que de l’aimer, le sélectionneur s’en est inspiré, et pas seulement au niveau du jeu. Passé par le Racing Santander de 2004 à 2007, il y découvre la « méthode globale ». Un procédé de préparation où le ballon est au centre du travail physique. « Depuis le début de la Coupe du monde, l’échauffement et le post-échauffement sont toujours sous forme de jeu avec ballon. Une signature de l’école espagnole », remarque Gabriel Hicham Guedira.
Et pour cela, quoi de mieux que de se servir chez les voisins ibériques. « Nous avons des préparateurs physiques espagnols et ils nous aident beaucoup pour la préparation de ce huitième de finale », a-t-il déclaré. Sous la houlette d’Eduardo Domínguez, passé par le Celta de Vigo, l’Espanyol, la Real Sociedad, le Depor ou encore Majorque, les Lions de l’Atlas n’ont toujours pas connu la défaite depuis qu’il est entré en fonction.
La philosophie espagnole dans le vestiaire marocain
Cette culture d’entraînement s’immisce jusque dans les buts, par le biais d’Omar Harrak. L’entraîneur des gardiens, qui a passé la plus grande partie de sa carrière en Espagne (Getafe, Gérone, Alcorcón et Espanyol Barcelone), est celui qui est chargé d’accompagner Yassine Bounou au quotidien. Celui qui a remporté le Trophée Zamora du meilleur gardien de Liga pour la saison 2021-2022 est le parfait exemple de cette acculturation. « Même au niveau de l’aspect physique, il répond aux standards espagnols. Dans ce pays, les gardiens de but ont un physique bien plus filiforme, avec davantage d’élasticité qu’ailleurs en Europe, et proposent toujours une solution dans le jeu », raconte l’actuel directeur de la Juventus Academy au Maroc.
Certes, pragmatisme oblige, le jeu de transition offensive mené durant la phase de poules, face à la Croatie et à la Belgique notamment, n’a pas laissé la part belle au jeu de possession, cher à Regragui. Seule la première mi-temps face au Canada a laissé l’occasion de voir ce dont les Lions étaient capables à ce niveau-là. Nul besoin d’être sélectionneur pour partager le constat de Luis Enrique : « C’est une équipe avec des transitions offensives très rapides et très dangereuses au niveau tactique. » Mais quoi qu’il en soit, aujourd’hui, les caps de la simple proximité géographique et du tropisme des Marocains vers le foot espagnol sont dépassés. Désormais, la philosophie espagnole a véritablement fait son entrée dans le vestiaire des Lions de l’Atlas. Cela suffira-t-il à battre le modèle ?
Par Achraf Tijani