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Un Hunou d’enfer
À vingt-cinq ans, Adrien Hunou s'est enfin fait une place au Stade rennais. Le milieu offensif de formation a profité d'un repositionnement à la pointe de l'attaque pour planter quelques buts importants et gagner le cœur des supporters rennais.
Demandez à un supporter parisien s’il se souvient d’une rencontre jouée le 12 mai 2018, il répondra certainement par la négative. En revanche, si vous posez la question à Adrien Hunou, il devrait pouvoir vous raconter cette soirée en accompagnant son récit de quelques détails. Ce jour-là, le Stade rennais se déplace au Parc des Princes pour le compte de la trente-septième journée de Ligue 1. Déjà en vacances, les champions de France comptent profiter de l’après-match pour fêter le septième titre de l’histoire du club. Sauf que les Bretons se pointent avec l’envie d’en découdre : Bourigeaud ouvre le score sur penalty après la pause, avant qu’Hunou ne plante le deuxième but du soir d’un magnifique enchaînement à la 71e minute. « Gélin me met une balle en profondeur, un peu comme la semaine dernière, je prends le dessus sur Presnel et après j’arrive à me l’amener vers le but et enchaîner rapidement » , racontera l’heureux buteur en zone mixte, pendant que les supporters entonnent la fameuse chanson à son nom dans le parcage. Le numéro 23 peut être fier : son pion permet à Rennes de valider sa cinquième place et ses retrouvailles avec la Coupe d’Europe la saison suivante. À vingt-quatre ans, il était temps de se faire une petite place dans son club formateur.
Sang neuf
Mais alors, pourquoi celui qui avait été élu meilleur joueur du centre de formation rennais en 2012 a attendu si longtemps pour faire ses preuves dans l’élite ? À son arrivée sur le banc du SRFC, Philippe Montanier lui donne pourtant sa chance (20 matchs, 1 but), avant que la direction ne lui offre son premier contrat pro à la fin de l’année 2013. Résultat : Hunou livre des prestations décevantes et part s’endurcir pendant dix-huit mois en prêt à Clermont. Le milieu offensif s’est épanoui dans l’entrejeu en Ligue 2, mais il aura finalement attendu d’être replacé numéro neuf pour véritablement s’intégrer à Rennes. Lamouchi est le premier à tester cette nouveauté, puis le natif d’Évry finit par enchaîner plusieurs apparitions à la pointe de l’attaque – profitant du désert à ce poste au SRFC -, alors qu’il avait effectué une grande partie de sa formation dans un rôle de numéro dix ou milieu axial. « Je n’ai jamais eu à le tester en neuf quand je l’avais en réserve, on avait des vrais profils d’attaquants comme Wesley Saïd à l’époque, se souvient Laurent Huard, l’entraîneur de la réserve rennaise entre 2007 et 2015. Adrien était tout aussi bon plus bas sur le terrain, dans le cœur du jeu et il n’avait surtout pas l’interdiction de se retrouver devant le but pour finir certaines actions. »
Après avoir passé son temps à organiser le jeu chez les jeunes, Hunou découvre un nouveau job en avançant d’un cran sur le terrain, se retrouvant à la finition des actions. Pas une surprise, ni une mauvaise idée selon Huard : « Il a des grandes qualités de déplacement, il sent très bien le jeu et il sent le but, c’est impressionnant. Même quand il jouait milieu offensif, je savais qu’à chaque match, il allait avoir des situations de but. Chez les professionnels, j’ai l’impression que c’est pareil, je le vois rarement jouer un match sans avoir une occasion franche. » Souvent bien placé, Hunou peine tout de même à faire trembler les filets, à l’image de son énorme loupé de la tête à la dernière minute d’un match nul contre Monaco en avril dernier (1-1). « Il a eu un coup de mou après ce loupé, il a pris un peu cher à l’extérieur. On a essayé de le rassurer » , expliquera Gélin quelques semaines plus tard. Mais l’ancien de l’INF Clairefontaine ne lâche pas et se « réfugie dans le travail » pour oublier. Et ça marche puisqu’il termine l’exercice 2017-2018 avec trois caramels en autant de rencontres.
J’entends Hunou, la renard et la belette
Le bon moment pour s’imposer définitivement sur les bords de la Vilaine ? Raté, Hunou voit sa préparation estivale tronquée par une blessure à un ligament de la cheville et manque les deux premiers mois de la nouvelle saison. Pire, le Stade rennais recrute Siebatcheu et Niang pour étoffer son effectif. Fin de l’aventure pour le numéro 23 ? Pas du tout, pour son grand retour début novembre, Lamouchi décide de lui refaire confiance au poste de neuf lors d’un match à Caen (2-1). Et il ne lui faut qu’une petite heure pour débloquer son compteur avec un vrai but de renard des surfaces, pendant que les deux recrues de l’été peinent à être incontestables.
Et l’arrivée de Julien Stéphan sur le banc n’a rien changé, malgré un nouveau petit pépin à la cheville au début de l’année civile. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le technicien rennais a choisi de lui faire confiance lors du match aller contre le Real Betis (3-3) la semaine dernière. Après seulement quatre-vingt-dix secondes de jeu, Hunou a transformé le caviar de Zeffane pour ouvrir le score et faire exploser le Roazhon Park. « Son but contre le Betis est un modèle du genre, juge Laurent Huard. Dans la surface, vous pouvez être sûr qu’il va couper la trajectoire et c’est ce qu’il a fait. Adrien est un joueur qui va vers le but, il ne va pas attendre que le centre soit déclenché. En fait, c’est lui qui déclenche la passe par son appel. Il a tout compris dans ses mouvements. Il sait qu’il ne va pas forcément gagner le duel parce qu’il n’est pas le plus grand, le plus fort, mais il a le bon timing pour passer devant son défenseur. » Il ne lui reste plus qu’à refaire le même coup à la quatre-vingt-dixième minute de jeu au stade Benito Villamarín pour offrir une qualification historique à son club de cœur.
Par Clément Gavard
Propos de LH recueillis par CG.