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Un homme, un stade : Saint-Symphorien
Souvent, derrière le nom d'un stade, se trouve celui d'un homme. Une figure éminente de la ville ou du club. Saint-Symphorien, lui, n’est rien de tout ça. Avec les Messins, le martyr d’Autun partage la fidélité. Celle à Jésus-Christ pour Symphorien et celle au FC Metz pour les Grenats.
La légende a véritablement débuté vers 450, près de trois cents ans après la mort de saint Symphorien. En érigeant une abbaye Saint-Symphorien à Autun, en Saône-et-Loire, saint Euphrône a alors remis en lumière l’histoire du martyr Symphorien. Le début d’un culte qui lui sera voué, par la suite, partout en France. Après cette première abbaye, de nombreux autres édifices religieux se sont construits en prenant le nom de Saint-Symphorien. Pour preuve, en 2016, on trouve pas moins de quinze églises Saint-Symphorien en France, et vingt-trois villages qui comportent le nom de Saint-Symphorien, de l’Ille-et-Vilaine au Rhône en passant par la Gironde et la Charente-Maritimes. Mais pour comprendre pourquoi Symphorien est devenu ce saint si connu, il faut remonter au IIe siècle, un temps que les moins de deux mille ans ne peuvent pas connaître.
La naissance à Augustodunum
Au IIe siècle, loin d’être cet État où nous vivons actuellement, la France n’était alors qu’une partie de l’Empire romain. De son côté, la ville d’Autun, Empire romain oblige, se faisait alors appeler Augustodunum (et non Auguste Delaune). Empereur depuis le 8 mars 161, Marc Aurèle accepte les différences religieuses, mais est totalement opposé au christianisme. Ce philosophe stoïcien émérite laisse alors les chrétiens se faire persécuter, ou pire, se faire massacrer. C’est dans ce contexte que naît le petit Symphorien, vers 159 à Autun. Issu d’une famille de nobles, Symphorien grandit avec ses parents, Faustus et Augusta, qui lui transmettent très vite la foi chrétienne. Une foi qui va faire de lui un véritable marginal dans cette ville d’Autun encore païenne.
La mort en martyr
On est alors vers 179, et Symphorien d’Autun est devenu un adolescent. Et, comme tout adolescent, il refuse de se plier à l’ordre, quitte à mourir avec ses idées. C’est exactement ce qui lui arrivera en ce jour de fête en l’honneur de la déesse Cybèle. Celui dont le nom grec signifie « utile, avantageux » refuse de se joindre au cortège et se permet même de se moquer ouvertement de la statue de la déesse phrygienne. Flagellé par la foule, le jeune Symphorien est alors emmené aux cachots où il n’a ni nourriture, ni eau, ni lumière.
Au bout de quelques jours, le jeune homme est déposé devant Héraclius, gouverneur de la province, qui lui propose un marché : « Rendez honneur aux dieux immortels et vous recevrez une gratification et une place dans l’armée. » Après avoir reçu un non de la part de Symphorien en guise de réponse, Héraclius le fait condamner à mort. Le dernier mot du jeune homme qui se fait alors couper la tête devant sa mère, fière de l’acte de son fils. Les quelques chrétiens de la ville déposent par la suite le corps du martyr près d’une fontaine. À l’endroit même où, en 450, saint Euphrône érigera cette fameuse abbaye du nom de celui qui depuis s’est vu sanctifier en saint Symphorien.
Cercle athlétique messin et Johnny Hallyday
On quitte alors le Ve siècle pour le VIIe et l’an 609. Évêque de la ville de Metz, saint Papoul y fait construire une abbaye Saint-Symphorien. La première trace du martyr d’Autun en Moselle. Des années et des années plus tard, en 1923, le Cercle athlétique messin, ancêtre du FC Metz, fait construire sur ce qui est devenu l’île Saint-Symphorien un stade qui prendra tout bêtement le nom de… Saint-Symphorien. Quelques aménagements plus tard, le stade est donc devenu cette belle enceinte de 25 000 places, comme nous la décrit parfaitement Pierre Théobald, auteur de deux livres sur le FC Metz : « Metz est connu pour sa cathédrale, et quelque part Saint-Symphorien est la deuxième cathédrale de la ville. C’est l’un des derniers stades « en ville » de France. Où que tu sois à Metz, à quinze minutes maxi à pied tu es au stade. Et c’est l’un des seuls a ne pas avoir de virages comme les stades typiques anglais. »
S’il faut alors trouver un point commun entre Saint-Symphorien et les Messins, il peut se trouver dans la définition d’un mot : la fidélité. C’est par fidélité à Jésus-Christ que Symphorien est mort en martyr, pour ne pas trahir son Dieu. Et c’est aussi par fidélité au FC Metz que les Messins ne sont jamais partis supporter le voisin de Nancy lorsque le club végétait en Ligue 2, ou pire en National. Une fidélité à toute épreuve qui connaîtra son état de grâce le 7 décembre 1991 lors de la réception de l’Olympique de Marseille. 28 766 spectateurs pour ce qui reste à ce jour la plus grosse affluence à Saint-Symphorien. Seule une personne a réussi à battre ce chiffre : Johnny Hallyday, qui a rameuté près de 35 000 personnes lors d’un concert en 2009.
Comment aurait pu s’appeler le stade Saint-Symphorien :
Le stade Carlo Molinari : Président du FC Metz de 1967 à 1978 et de 1983 à 2009. Prends-ça, Jean-Michel Aulas. Le stade Philippe Hinschberger : Quinze ans au club en tant que joueur et désormais entraîneur du FC Metz. Patron. Le stade Robert Pirès : Seul joueur messin à avoir été sacré champion du monde. #king #legend Le stade de l’avenue de Nancy : À trois rues près, le stade aurait pu prendre le nom de son éternel rival. Le stade Der Heilige Symphorianus : À une bataille près, le FC Metz aurait joué en Bundesliga.Par Steven Oliveira