- France
- Décès de George Floyd
Un genou à terre lors des finales de coupes en France en hommage à Georges Flyod ?
À défaut d’une reprise de la Ligue 1, deux finales de coupes vont se disputer. Si beaucoup dissertent sur la présence et la jauge du public, une autre question mérite d’être posée : comment le foot français va-t-il se comporter, face à l’actuelle mobilisation répandue a travers le monde depuis le décès de George Floyd ? Autrement dit, les joueurs français doivent-ils et vont-ils poser un genou à terre ?
C’est un rituel qui s’est imposé en Premier League, avec évidemment sa part de communication bien pensée. Avant le coup d’envoi du match entre Tottenham et Manchester United par exemple, les joueurs se sont agenouillés. Un geste fort et symbolique, qui accompagne la vague de soutien et la prise de conscience qui traverse actuellement une partie du monde, afin de témoigner contre le racisme et les violences policières.
Il ne faut surtout pas imaginer que ce type d’expression va de soi, dans le sport. Le CIO l’interdit pour l’instant, officiellement au nom de la charte olympique. Pour mémoire, les deux athlètes noirs Tommie Smith et John Carlos qui avaient levé en 1968 leur poing à Mexico avaient vu leur carrière brisée par les instances sportives pour avoir osé affirmer leur conviction et leur droit à la dignité.
Foot à genoux, footballeurs debout ?
Toutefois, le foot est un monde à part. De fait, très tôt, des individualités (telle que Marcus Thuram, en Bundesliga) ont réagi lors des rencontres auxquelles elles participaient. Désormais, la problématique est bien plus vaste puisqu’il s’agit bien en quelque sorte de la reconnaissance « officielle » de cet acte de solidarité avec la bénédiction des clubs et des ligues. Or, même s’il demeure pour l’instant à l’arrêt, le foot tricolore a quand même deux dates importantes qui l’attendent : les finales de Coupe de France et de Coupe de la Ligue, sans parler du mini-tournoi de Ligue des champions à Lisbonne pour le PSG et le déplacement de l’OL en Italie (deux événements disputés à l’étranger).
Il est, en effet, impossible d’esquiver la question. Tout d’abord parce que certains joueurs concernés par ces rencontres, et pas des moindres comme Kylian Mbappé, se sont exprimés à ce sujet sur les réseaux sociaux. Ensuite, la France a connu une série de manifestations extrêmement importantes autour de ces problématiques qui renvoyaient cette fois au contexte spécifique de l’Hexagone (avec l’affaire Adama Traoré, mais pas seulement). Les deux finales ne vont certes pas se dérouler tout de suite, puisque les dates évoquées sont le 21 et le 24 juillet. Il n’empêche, l’enjeu est malgré tout présent et il renvoie à la sempiternelle interrogation autour de l’engagement dans le foot et de la part des footballeurs.
De l’acte isolé au soutien institutionnel ?
Il faut souligner la présence de Kurzawa au milieu de 20 000 autres personnes, rassemblées devant le palais de justice de Paris. Ces choix individuels demeurent fort respectables, même si aucun n’a pour l’instant monté son implication au niveau de ce qu’a pu réaliser politiquement Rashford. Toutefois, ce qui est en perspective outrepasse cette petite dimension du name-droping dans les dépêches de l’AFP. Il s’agit bien de savoir comment instances et clubs vont se positionner, ce qu’ils vont autoriser avec leur bénédiction : la FFF et la LFP (dont le fonctionnement a été largement ébranlé ces derniers temps, avec les batailles juridiques et médiatiques autour de la reprise ou non de la L1), mais aussi Paris, Saint-Étienne et Lyon.
Car il existe un autre paraître. Ces deux coupes, et surtout la Coupe de France dont on connaît la place dans notre culture nationale, marqueront le grand retour du foot « à domicile » en présence comme de coutume du président de la République et d’une partie du gouvernement. L’instant sera attendu, scruté, solennel. Or, si Emmanuel Macron ou Castaner n’ont rien contre les tee-shirts en anglais condamnant ce qu’il se passe aux États-Unis, les mobilisations et les polémiques – au sens noble du terme – en relation avec la situation nationale les laissent beaucoup plus fébriles. Voire, pour tout avouer, hostiles. De quelle manière vivraient-ils un moment qui rappellerait inévitablement un problème spécifiquement made in France, que ce soit sur le versant du racisme (y compris systémique) ou de celui de la dénonciation des violences policières (le cas de Steve étant finalement assez emblématique de l’ampleur du déni, du côté des autorités) ? Il reste un mois pour savoir, et pour choisir.
Par Nicolas Kssis Martov