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Un demi-siècle de Didier Deschamps, livre I

Par Mathieu Rollinger

Le sélectionneur français fête aujourd'hui ses 50 ans. Et de Bayonne à Moscou, Didier Deschamps a toujours été guidé par cette quête insatiable de la victoire, pour être aujourd'hui le footballeur français le plus titré. Première partie de l'album de famille, consacré à Deschamps le joueur. Joyeux anniversaire Didier !

#1 - Le Basque

1968-1982. Né à Bayonne, le fils de Pierre, peintre en bâtiment et rugbyman, et de Ginette, vendeuse de laine, s’impose vite comme un OVNI dans le Pays basque. Ayant déjà atteint sa taille adulte à l’âge de 12 ans, le gamin excelle dans tous les sports, du hand à la pelote, en passant par la course à pied, puisqu’il est champion de France scolaire du 1000m. Mais c’est au foot et au club de l’Aviron bayonnais qu’il s’épanouit. « Son premier tir, je l’ai arrêté. Le deuxième, j’ai pas mis les mains, racontait Gérard Parmentier, le gardien de l’équipe, à So Foot (#118). Il était grand et costaud, il avait une puissance de frappe impressionnante, des deux pieds. » La légende raconte que Didier tournait alors à 70 buts par saison. Qui a dit que Deschamps ne pensait qu’à défendre ?

#2 - Le Coco nantais

1983. Repéré par Nantes alors que le gaillard roulait sur les catégories jeunes d’Aquitaine, Didier Deschamps débarque à 15 ans dans le centre de formation des Canaris. Là il tombera sur le meilleur professeur de l’époque : Coco Suaudeau. « J’ai eu la chance d’avoir de grands entraîneurs, confiait-il en 2010. Mais celui qui a sans doute le plus compté, c’est le premier, Coco Suaudeau. Par rapport à sa vision du foot, et aux discussions que j’ai pu avoir avec lui quand j’étais à Nantes, il a été une grande source d’inspiration pour moi. »

#3 - L'ami Marcel

1983. Deschamps-Desailly, Marcel-Didier. Ces deux-là ne se sont plus jamais lâchés, depuis leur rencontre en 1983 au FC Nantes, alors que le Franco-Ghanéen surnommait affectueusement son nouveau pote « Blanchard » . Mais c’est un drame qui a définitivement scellé leur amitié. Le 18 novembre 1984, le demi-frère de Marcel, Seth Adonkor, est tué dans un accident de voiture. Personne n’ose annoncer la nouvelle à Marcel, mais Didier, 16 ans, ne se défile pas. « Je n’ai jamais oublié ce que Didier avait fait par amitié ce jour-là. À quel point ça avait dû être dur, assurait le défenseur. Depuis, il représente tout pour moi. »

#4 - Le Canari déploie ses ailes

27 septembre 1985. Didier effectue ses débuts en Division 1. « C’était à Brest, nous avions gagné 3-1, se remémore la Dèche. J’entre vers la 20e minute, lorsque Vahid Halilhodžić se blesse. Une heure à ce niveau, ça m’a paru bien long ! »

#5 - Reine Claude

1986. À 18 ans, Didier rencontre Claude, de deux ans son aînée et étudiante en psychologie originaire de Concarneau. Il l’épouse sur le champ. « On ne peut pas essayer de comprendre Didier Deschamps si on ne tient pas compte de la personnalité de sa femme, expliquait Jeannot Werth, l’ancien agent de DD. Il ne décide rien sans en avoir parlé avant à Claude. (…) Après chaque rencontre télévisée, il téléphone à Claude pour savoir ce qu’ont dit les commentateurs. »

#6 - Capitaine Dèche

1987. À seulement 19 ans, Didier a mis tout le monde d’accord du côté de Nantes. Au point qu’on lui confie rapidement le brassard de capitaine, fonction qui lui collera toujours au corps, et qu’il est alors considéré comme le successeur de Henri Michel dans le cœur des supporters. Kylian qui ?

#7 - Le bleu en Bleu

1989. Après avoir connu presque toutes les sélections jeunes, Didier Deschamps est appelé pour la première fois avec les A par Michel Platini et honore dans la foulée sa première cape face à la Yougoslavie au Parc des Princes (éliminatoires du Mondial 1990, 0-0), en remplaçant à la 74e minute Daniel Xuereb. Le 11 octobre suivant, il signera son premier but face à l’Écosse (3-0). Le début d’une longue histoire avec les Bleus.

#8 - Minot à la cave

1989. DD ne passe plus inaperçu dans l’Hexagone et c’est l’OM qui s’attache les services du milieu. La première année est cependant loin d’être facile, même s’il remporte le championnat avec les Marseillais. À l’été suivant, il est prêté au Bordeaux de Jean-Marc Ferreri. « J’avais envie de l’emmerder, racontait Bernard Tapie. Il m’avait bien déçu et pas mal gavé pendant ces quelques mois. Je l’ai envoyé là-bas pour lui faire les pieds, et surtout parce que je ne comptais plus sur lui. J’avais beaucoup misé sur ce jeune, mais j’étais désormais certain de m’être trompé. Comme quoi… »

#9 - Bras de fer

1990. De retour en Aquitaine, Deschamps tombe dans une année galère où les Girondins voient défiler trois coachs sur leur banc (Goethals, Rohr et Gili), mais ne se laisse pas marcher dessus. « De suite, il s’occupe de tout, témoignait Christophe Dugarry au micro de Canal+. Il a envie de prendre des responsabilités. Il s’occupe un peu de tout, il participe à toutes les discussions et aux entraînements, il râle quand ça ne va pas et il replace. » Une force de caractère qui lui permet de revenir la saison suivante à Marseille, où il a une revanche à prendre.

#10 - OM, le retour

1991. La seconde sera la bonne. Deschamps s’impose comme un titulaire inamovible du onze phocéen et dissipe tous les doutes. Au bout du compte, l’OM décroche un quatrième titre consécutif.

#11 - Les fleurs du mal

1993. Récupérant le brassard laissé libre par Papin, parti à Milan, Deschamps devient l’homme de confiance de Bernard Tapie. Un statut qui le place dans le viseur du scandale de corruption VA-OM, où Jorge Burrachaga (ici à droite) et d’autres Valenciennois ont été contactés pour laisser filer le match. Une première zone d’ombre dans la carrière du Basque.

#12 - À jamais le premier

1993. Dix jours après le début du scandale de Valenciennes, c’est une page beaucoup plus dorée qui s’ouvre. Deschamps devient le premier capitaine d’un club français champion d’Europe, après une victoire contre l’AC Milan (1-0).

#13 - Yaourt amer

1993. L’ascenseur émotionnel n’a pas fini de fonctionner en cette année et c’est la Bulgarie qui vient doucher les espoirs de Coupe du monde des Bleus. Une défaite qui restera comme une vraie cicatrice pour Deschamps, mais qui sera le terreau d’un cycle beaucoup plus glorieux.

#14 - Le rital

1994. Entre les succès à la chaîne et l’affaire VA-OM, DD cherche à passer à autre chose et traverse les Alpes pour atterrir à la Juventus. À Turin, il fera la connaissance d’un autre technicien qui influencera grandement l’entraîneur qu’il deviendra : Marcello Lippi. « C’est même le seul joueur que j’ai croisé dans ma carrière qui était déjà entraîneur sur le terrain, assurait récemment le Mister dans les colonnes du JDD. Un tel leadership est naturel, ça ne s’apprend pas. » Un tel swagg non plus.

#15 - Deuxième étoile, déjà

1996. Deschamps ne change pas de club pour aller chercher des trophées, ce sont les trophées qui le suivent dans ses différents clubs. Face à l’Ajax, le Bianconero décroche sa deuxième C1 personnelle.

#16 - Fanion

1996. Deuxième phase finale internationale (après l’Euro suédois de 1992) et première avec le brassard. En Angleterre, le groupe d’Aimé Jacquet atteint les demies et se rassure à deux ans du Mondial à domicile.

#17 - Double Z et Double D

1996. Didier accueille à Turin un autre prodige français : Zinédine Zidane. Et c’est encore Marcello Lippi qui résume le mieux leur relation : « Un jour, (Didier) m’a dit : « J’ai trouvé la meilleure tactique pour ne jamais avoir de problèmes sur le terrain : dès que je récupère le ballon, je le donne à Zidane. Après, je suis tranquille. » Zidane était un leader technique, Didier un leader moral. » Des fois qu’il y ait un doute…

#18 - Double lose

1997 et 1998. Une sensation rarement connue par Didier Deschamps. Pour la deuxième fois consécutive, la Juve laisse échapper la coupe aux grandes oreilles. La première au bénéfice du Borussia Dortmund, la seconde du Real Madrid. Les seules de ses trois finales perdues dans sa carrière de joueur (avec celle avec Valence en 2001).

#19 - Le petit père du peuple

1998. Pas le temps de rester sur ces échecs, le capitaine tricolore a une campagne à domicile à mener. Et elle débute à Marseille contre l’Afrique du Sud.

#20 - Fratelli d'Italia

1998. En quarts, la Dèche et ses compatriotes jouant dans le Calcio sortent l’Italie… à l’italienne. « Ils s’étaient foutus de nous toute l’année, tous les jours, en disant que l’équipe de France, c’était bien beau, mais qu’on n’avait jamais rien gagné… Alors… Je me souviens avoir dit : « Si je perds, je demande mon transfert… », avouait DD à Paris-Match. Heureusement, on savait comment les jouer puisque nous étions sept ou huit à évoluer en Italie…  »

#21 - Histoire

1998. Quand tu entres au Panthéon du sport français par la grande porte.

#22 - Mourir tranquille

1998. Les gars sûrs de toujours et les petits jeunes. Le capitaine offre la Coupe du monde à la France, incarnant le capitaine idéal. « Mon rôle n’était pas de porter le brassard et d’échanger les fanions avant le match, débriefait-il, toujours pour Paris-Match. Il y avait un message à faire passer dans le groupe, sur le terrain, et si ça n’allait pas, je devais intervenir. Je l’ai fait naturellement ! Quand des jeunes comme Trezeguet ou Henry avaient quelque chose qui ne leur plaisait pas, ils venaient me le dire en face, ce n’était pas un problème. »

#23 - Un Bleu chez les Blues

1999. « Cette année suivant le titre suprême a été pénible à vivre, souffle Deschamps. Les résultats ont été décevants avec la Juve. On n’a rien remporté et puis, il y a eu les enquêtes judiciaires liées aux affaires de dopage. Bref, j’ai ressenti une lassitude physique, mais aussi mentale. » Les lendemains du sacre sont difficiles pour Deschamps. Libéré par la Juve, il se lance un nouveau challenge en partant à la découverte de l’Angleterre. À Chelsea, il retrouve Lebœuf et surtout Marcel Desailly.

#24 - Centenaire

2000. Les Bleus n’ont jamais été aussi dominants que lors de cet Euro en Belgique et aux Pays-Bas. Et en demi-finales face au Portugal, la Dèche devient le premier joueur français à dépasser les cent capes. Qui d’autre que lui ?

#25 - Déjeuner sur l'herbe

2000. L’exploit est majeur. Avec Deschamps, les Bleus sont les premiers à enchaîner les titres de champion du monde et d’Europe. Le temps de se poser et faire le point. Pour Deschamps, le clap de fin sera proche. Le 2 septembre, face à l’Angleterre, il fait ses adieux à la sélection (les crispations autour de son omnipotence dans le groupe l’ayant aussi poussé à ne pas rempiler). Encore une saison en club, à Valence, et Didier raccroche les crampons pour de bon à l’été 2001. Peut-être parce qu’il n’y avait plus grand-chose à mettre dans son armoire à trophées.

Par Mathieu Rollinger

Photos : Iconsport

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