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Un Bernardo Silva de perdu, dix de retrouvés?
L'ASM fait face à un dilemme éternel : chaque joueur qu'elle façonne et fait grandir jusqu'à l'envol doit être remplacé par un pari sur l'avenir. Aujourd'hui, elle doit faire oublier Bernardo Silva. Mis à part le phénomène Lemar et le prometteur mais gravement blessé Boschilia, Monaco possède au sein de son effectif quatre candidats crédibles à la succession de son petit maestro : Rony Lopes, Gil Dias, Adama Traoré et Allan Saint-Maximin.
Rony Lopes, l’héritier
Rony Lopes et Bernardo Silva étaient sur la même ligne de départ il y a trois ans. Débarquant tous les deux de la réserve d’un grand club étranger (Manchester City pour Lopes, Benfica Lisbonne pour Silva), on imaginait les voir grandir au même rythme. Mais si l’ancien joueur des Citizens a montré à maintes reprises qu’il était un joueur différent lors de ses prêts successifs au LOSC, il n’a jamais su s’élever au-dessus du marasme sportif qui régnait dans le club nordiste. Peu en vue lors de ses six mois sur le Rocher et gêné par des blessures musculaires récurrentes, il semble néamoins être le favori légitime à la succession de son compatriote. Moins virevoltant, mais plus puissant et doté d’une meilleure frappe, il est lui aussi habitué à briller dans le couloir droit même si, comme Bernardo, il estime avoir un destin de vrai numéro 10 axial. Notons que Manchester City avait négocié une clause de rachat à hauteur de trente millions d’euros au moment de céder le jeune Portugais à l’ASM, misant peut-être sur le fait que Monaco en ferait un cador. C’est raté pour le moment et la clause prend fin au 7 juillet prochain. Allez, soixante millions dans deux ans, c’est cadeau.
Gil Dias, le challenger
Si vous n’avez pas un attrait particulier pour le championnat de CFA ou la Liga NOS, il y a peu de chance que vous ayez déjà entendu parler de Gil Dias. Arrivé en Principauté à dix-sept ans, il s’est très vite imposé avec la réserve asémiste et est ensuite parti s’aguerrir une demi-saison en D2 portugaise, à Varzim. Prêté cette année à Rio Ave, il a confirmé les dispositions qu’on lui prêtait en empilant les buts (8) et les passes décisives (7), ce qui lui vaut d’ailleurs d’être courtisé par Benfica. Gaucher, technique, Portugais et évoluant principalement sur l’aile droite, on pourrait croire qu’il est le clone de Bernardo. À un détail près, il mesure dix centimètres de plus et se rapproche davantage de Nenê dans sa façon de se mouvoir avec le ballon. Un peu moins élégant que « chewing-gum » , il semble néanmoins posséder le profil pour le remplacer à moyen terme. Reste à voir s’il est capable de franchir le cap Liga NOS/Ligue 1 Conforama, car Monaco, « c’est pas Rio Ave, c’est pas Varzim » .
Adama Traoré, la roue de secours
Rio Ave, c’est également le club qui a accueilli Adama Traoré ces six derniers mois. Et si l’international malien, élu meilleur joueur de la Coupe du monde U20 en 2015, semblait prêt à exploser à son arrivée en Principauté, il a depuis pris beaucoup de retard sur la concurrence. Déjà pas aidé par son profil difficilement lisible – ni vraiment dix, ni vraiment huit, pas très à l’aise sur le côté –, l’ancien Lillois a subi une vilaine blessure qui l’a écarté du onze pour sa première saison. Et le passage en 4-4-2 l’été dernier n’a pas fait de lui une option crédible aux yeux de Jardim. D’où ce prêt au Portugal, où il n’a joué qu’une centaine de minutes, pendant que Gil Dias s’éclatait sous ses yeux. Difficile donc d’imaginer Traoré profiter directement de la place laissée par Bernardo, même si une bonne préparation et une éventuelle évolution tactique pourraient convaincre le staff monégasque de remettre en lumière un joueur sur lequel beaucoup d’argent a été investi.
Allan Saint-Maximin, l’imprévisible
Si l’ASM cherche un clone de son ancien numéro 10, Saint-Maximin part du mauvais pied. Son profil rappelle davantage celui de Carrasco, soliste souvent brillant, mais parfois irritant. Salif Sané, milieu défensif qui l’a côtoyé à Hanovre, se souvient d’un talent rare : « À l’entraînement, il était impressionnant. Le problème, c’est qu’il n’a pas trop eu sa chance en match. Mais c’était plus dû à l’entraîneur et au directeur sportif qu’à ses performances. Toutes les fois où il a joué, il a montré qu’on pouvait lui faire confiance même s’il n’a pas exploité tout son potentiel. » Subsistent les doutes sur le tempérament du joueur, parfois maladroit dans ses sorties médiatiques. Salif Sané tempère les « on dit » sur la mentalité de l’ancien Stéphanois : « Il ne faut se fier aux apparences. On peut avoir l’impression qu’il est arrogant, mais, quand tu connais vraiment la personne, c’est un amour. Tout le monde l’adorait dans le vestiaire, il faisait les efforts pour s’intégrer. » Cette saison, à Bastia, il a dévoilé les prémices du joueur de très haut niveau qu’il pourrait devenir et tout ce qui l’en sépare encore. Peut-il assumer rigoureusement un rôle de milieu offensif dans le schéma actuel de Jardim ? Il connaît en tout cas les exigences du poste. Sané toujours : « À Hanovre, il jouait sur le côté dans un 4-4-2. Son problème, c’était surtout le repli défensif, mais il a pris conscience qu’il devait le régler pour franchir un palier. » S’il est encore un peu tôt pour le projeter comme un titulaire de l’ASM 2017-2018, on l’imagine en revanche aisément tirer son épingle du jeu en supersub du quatuor d’attaque, pour que sa folie débloque les matchs trop raisonnables de Ligue 1.
Par Christophe Depincé