- E-sport
- Twitch
Twitch : c’est quoi cet engouement autour du FC Silmi ?
Comment 8 streamers arrivent-ils à réunir des dizaines de milliers de personnes sur Twitch chaque lundi soir pour les voir galérer dans les affres des basses divisions du mode Club Pro sur FIFA 21 ? Retour sur l’engouement autour du FC Silmi avec son gardien, Ponce.
Chaque lundi, c’est la même rengaine. Le petit monde de Twitch est en ébullition au moment de retrouver l’équipe du moment, le FC Silmi. Derrière ce nom qui évoque un amour inconditionnel pour les missiles en pleine lucarne, on retrouve 8 streamers renommés : Domingo, DFG, Étoiles, Jiraya, Mister MV, Ponce, Rivenzi et Xari. Ces derniers cherchaient un nouveau titre multi-joueurs pour diversifier leurs lives, et surtout pour rigoler entre eux. Et quand on est nombreux, le choix n’est pas large derrière les redondants Among Us et Gartic Phone. Si l’idée de partir sur FIFA 21 paraissait incongrue pour certains d’entre eux, assez éloignés des simulations sportives, le mode de jeu Club Pro a changé la donne. Ce dernier, qui permet de créer son propre joueur et de le personnaliser (physique, aptitudes footballistiques et poste sur le terrain) est jouable jusqu’à 11 et propose un système compétitif avec des divisions à monter/descendre.
Du pain béni pour ces 8 streamers ? Pas forcément, quand on s’intéresse à leurs communautés qui sont souvent fans d’autres jeux comme des MOBA (League of Legends), des RPG ou d’autres jeux considérés pour les puristes. Ce fut d’ailleurs le cas pour Ponce, gardien émérite du FC Silmi : « Dans ma commu, j’ai très peu de personnes qui jouent à ce jeu qui a une mauvaise réputation. Je pense que j’ai réussi à les initier, et maintenant, ils sont des milliers à regarder le stream du lundi en se disant : « Je déteste le foot ou FIFA, mais le FC Silmi, c’est trop bien. » »
Des pics d’audience à 100 000 viewers
Le succès du FC Silmi est colossal depuis le lancement de cette aventure en février dernier. En cumulant les viewers des 8 lives, la barre des 100 000 spectateurs est souvent dépassée. Mais comme l’indique Ponce, ce n’est pas « tant l’audience qui choque, mais plutôt l’ampleur que ça a pris dans les à-côtés. Des gens ont fait des T-shirts, des fans-arts, et sur Twitter, notre aventure apparaît en top tendance France ».
On peut presque parler de comportements de supporters quand on assiste à ces soirées en voyant certaines réactions sur le chat textuel de Twitch ou sur les réseaux sociaux. Un compte Twitter créé en hommage à l’équipe par un fan réunit plus de 36 000 followers. Mais il pousse le délire bien plus loin que de simples mèmes ou tweets pour supporter son équipe favorite. On y retrouve des statistiques poussées, des montages vidéo de chaque soirée et même la création du FC Silmi sur le jeu Football Manager, pour que les fans les plus hardcore s’adonnent aux joies de la gestion de cette équipe.
Parce qu’au FC Silmi, on aime comparer l’incomparable. Voici les stats de notre club comparées aux stats des clubs des 5 grands championnats ! pic.twitter.com/dmHdu2EOab
— FC Silmi (@FcSilmi) April 2, 2021
Un lundi soir entre potes
Alors, comment expliquer un tel engouement ? Il est facile de répondre que c’est tout d’abord l’aura des streamers qui y contribue grandement, avec des fanbases qui sont déjà énormes. Mais il faut plutôt se tourner vers leur personnalité et la façon dont se déroulent les matchs. Si vous vous posez devant un match du FC Slimi, vous allez avoir l’impression de regarder tout simplement un délire que vous pourriez avoir avec votre bande de potes. Le niveau n’est pas fameux, les avatars des joueurs sont tout sauf sérieux (mentions spéciales à Luc-Arnaud Posée et Conor de Virus), et les blagues fusent sur le vocal commun des streameurs.
Voir Jiraya hurler pendant un penalty que doit arrêter Ponce, des centres qui vont directement en 6 mètres ou des attentats en fin de match pour préserver la victoire a quelque chose de familier pour les amateurs de jeux vidéo.
Jijou s’approche du vestiaire de l’adversaire pic.twitter.com/5NdxgyTCU6
— ???????? ☔ (@eltimouthe) April 3, 2021
Un constat partagé par Ponce. Selon lui, les gens regardent et apprécient le FC Silmi pour ce « mélange entre la Ligue des champions pour les émotions et l’aspect compétitif, les Héros du gazon avec ce côté cassos qui racontent de la merde et font n’importe quoi sur le terrain, mais également Shonen avec cette motivation et cette volonté de progresser ».
Le FC Silmi remplit un certain manque d’émotion collective
À la différence des soirées entre potes sur Club Pro, le FC Silmi a une audience, et surtout des supporters qui veulent les voir réussir entre deux tranches de rigolade. Si les premières sessions étaient un florilège de défaites fleuves dans les plus basses divisions, l’équipe progresse et commence à enchaîner les montées. Et avec l’impossibilité pour les fans de sport de se rendre dans des enceintes sportives pour communier, le FC Silmi arrive à remplir ce rôle pour une frange de l’audience. « Beaucoup de fans de sport sont en manque d’émotion collective où tout le monde est derrière une même bannière. Certaines personnes dans le chat disent qu’ils crient quand on met un but, ils suivent vraiment ça comme s’ils étaient au stade », nous confirme Ponce.
De ce fait, l’engouement autour du FC Silmi pose également la question de l’évolution du supporterisme. L’e-sport avait déjà ouvert une brèche sur ce sujet, mais l’aspect compétitif et le fonctionnement des structures souvent calqués sur le monde sportif facilitent le parallèle. Ici, l’absence de volonté d’arriver à un haut niveau compétitif n’est pas un problème pour des fans qui arrivent à trouver leur compte grâce aux bons moments passés derrière leur écran. Une sorte de retour aux sources où l’enjeu ne prime pas sur le jeu ?
Par Clément Bernard