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Tunisie, les aigres de Carthage

Par Mathieu Rollinger, au stade Al-Janoub
4 minutes
Tunisie, les aigres de Carthage

Regonflés par un bon nul inaugural contre le Danemark, la Tunisie n'a pu confirmer contre l'Australie. La faute certainement à un trop-plein d'émotions.

Il n’y a pas toujours besoin de regarder en direction du terrain pour comprendre la physionomie d’une rencontre. Pour ce qui est de ce match entre l’Australie et la Tunisie, il suffisait de se tourner vers les supporters des Aigles de Carthage, pour suivre l’évolution de leurs émotions. Deux heures avant le coup d’envoi, les centaines de navettes déposaient sur le parvis du stade Al-Janoub des dizaines de milliers de visages radieux, les sourires n’étant que plus illuminés par le rouge des tuniques. On chante, on se maquille, on s’embrasse, on se retrouve, on demande des nouvelles de la famille. Ses lunettes Aviator sur le nez, Samir a lui aussi plongé la tête la première dans cette ambiance, avant de se rappeler qu’il devait ensuite faire tout le tour du stade pour rejoindre sa place. « Je ne sais vraiment pas à quoi m’attendre, souffle-t-il, instantanément plus tendu. Le premier match contre le Danemark(0-0)a déjà montré que nous avons du cœur, mais on sait très bien que ça ne suffit pas toujours. L’Australie, c’est costaud. Je veux bien nous voir aller loin dans cette compétition, mais il faudra déjà proposer du jeu. » Comme un mantra, ce sont exactement les paroles qui tournent en boucle dans les chants tunisiens. Jouer, les hommes de Jalel Kadri l’ont fait. Mais ils se sont surtout cognés à une équipe australienne bien plus consistante que face à la France. Le 4-4-2 d’école britannique a fait son effet et a étouffé toutes les tentatives d’une équipe qui avait obtenu son premier point à l’énergie. Celle de son public déjà, encore une fois ultra majoritaire, celle insufflée par les miracles défensifs de Talbi ou les tacles dévastateurs de Laïdouni ou encore les rushs de Youssef Msakhni.

L’énergie de l’espoir

Ce samedi midi, sous le soleil de Doha, le réservoir de carburant était plein, mais il a manqué l’étincelle pour faire réellement démarrer la machine. Et quand Duke a profité d’un coup de flipper pour placer sa tête, celle des 30 000 supporters tunisiens s’est assombrie. Le jeu, celui qui aurait dû sortir d’affaire cette équipe, s’est alors englué dans un océan d’imprécisions, où chaque pion tente son propre mouvement. Un bazar tactique certainement occasionné par la pression de voir un début de Mondial prometteur s’évaporer d’un claquement de doigts, ainsi que par la frustration de voir les Australiens gagner de longues minutes à chaque contact ou sortie de balle. Dräger, Msakni, Jebali, Khazri, Sliti, Khenissi ont tous eu leur carte à jouer, mais aucun n’a su faire le geste juste. « On a perdu le match en première mi-temps, c’est sûr. On voulait bien faire, on a reconduit un système qui avait marché contre le Danemark, mais il a fallu revoir nos plans, analyse Naïm Sliti. Le début de seconde période est bien mieux, avec un autre dispositif, après, ça n’a pas suffi. Il aurait fallu marquer sur nos occasions. »

Dans les gradins, au fil des minutes qui s’égrainent, les drapeaux finissent de s’agiter. Certains essayent d’écraser leurs larmes, d’autres disparaissent sous leur chéchia. Fin du match. Ce qui transparaît, c’est qu’il a manqué à cette équipe un homme pouvant dire aux siens de garder la tête froide, de saisir la bonne opportunité plutôt que de foncer tête baissée, histoire de ne pas perdre pied une fois menés. Quoi qu’il en soit, c’est contre la France que se jouera l’avenir de la nation. « C’est la loi du très haut niveau, et je veux garder le positif, continue Sliti. Les exploits dans le foot, ça existe. On va jouer contre les champions du monde et j’y crois, inch’allah. On a ce rêve, et ce n’est pas fini. » La donne changera forcément si les Bleus commencent ce duel avec la certitude d’être qualifiés pour les huitièmes ou s’il s’agira d’un match à couteaux tirés. La Tunisie, elle, devra se remettre les idées au clair si elle ne veut pas voir ces si beaux visages sombrer pour de bon dans la tristesse.

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Par Mathieu Rollinger, au stade Al-Janoub

Tous propos recueillis par MR.

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