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Tuchel câline l’institution

Par Matthieu Pécot
4 minutes
Tuchel câline l’institution

Bien plus qu’un coup tactique, le choix de démarrer au Vélodrome avec Mbappé et Rabiot sur le banc marque la profonde intention de Thomas Tuchel de faire grandir le Paris Saint-Germain.

Ce dimanche 28 octobre 2018 restera à jamais comme le dernier jour de la vie de Philippe Gildas. L’ancien animateur culte de Canal+ est mort à 82 ans, et les nostalgiques ont le droit de profiter de cette triste occasion pour se rappeler que « Canal, c’était mieux avant » . Pour en être un peu plus certain, il suffisait de ne pas aller chercher de rafraîchissement à la mi-temps de ce Marseille-PSG. Rester scotché au fond de son canapé, mettre le volume un peu plus fort et ne rater aucune miette du festival Pierre Ménès.

Ménès : « On est tous là à se palucher sur l’institution… »

Parce qu’il y avait 0-0 à la pause et que la seule culture dont est pourvu ce chroniqueur est celle de l’immédiateté, il a décidé de faire blobloter ses lèvres pour mieux flinguer Thomas Tuchel. Le crime de l’entraîneur parisien ? Mettre Kylian Mbappé et Adrien Rabiot sur le banc. Une punition qui – l’Allemand l’a confirmé au coup de sifflet final – s’explique par le fait que les deux internationaux français s’étaient pointés en retard à la causerie d’avant-match. « C’est un choix complètement aberrant. Moi ce que je vois, c’est le résultat. Là, tu te retrouves devant avec Choupo-Moting qui est quand même un tracteur… On est tous là à se palucher sur l’institution, mais à un moment, il faut gagner des matchs » , a débité Ménès avec assurance. À un moment, oui, il faut gagner des matchs. Ce soir, le PSG a d’ailleurs remporté son onzième match en autant de journées de Ligue 1…

Bien au-delà de cette bêtise mathématique, Ménès fait un mauvais procès à Tuchel. Dans une semaine européenne qui a montré que le PSG cherchait encore son identité, le coach allemand a eu le mérite de remettre l’institution au-dessus de tout le reste. S’il y a bien une critique formulée à l’égard du PSG de l’ère QSI qui fait à peu près l’unanimité, c’est cette impression que n’importe quel joueur au nom ronflant qui débarque à Paris a toujours tendance à regarder le PSG de haut. Personne n’ose faire ça à la Juve, au Bayern, au Barça ou au Real. Il est autant évident que l’effectif parisien a la qualité pour soulever la Ligue des champions (son objectif avoué) dès cette année qu’il n’est, jusqu’ici, qu’un club comme un autre aux yeux de ses concurrents. En d’autres termes, l’équipe du PSG est respectée, mais son blason fait doucement rire les grosses écuries européennes, qui se plaisent à lui rappeler à chaque printemps.

Tuchel : « Je déteste jouer sans Kylian »

Thomas Tuchel a 45 ans, et son pedigree est moins impressionnant que ceux de Carlo Ancelotti, Laurent Blanc ou Unai Emery. Mais quatre jours après avoir bégayé face à Naples (2-2), et dans un contexte où Cavani, Thiago Silva et Kimpembe étaient absents, seul un gros courage pouvait permettre à un entraîneur de se priver de Rabiot et Mbappé. La prise de risque était-elle vraiment si énorme ? Il ne faut pas sous-estimer ce qu’il y a dans la tête de Tuchel. Qui sait ? L’ancien tacticien de Dortmund avait peut-être mesuré l’écart entre le niveau actuel de l’OM et celui d’un PSG privé de la moitié de ses titulaires habituels. Peut-être avait-il aussi anticipé le fait qu’en cas de situation gênante (comme un 0-0 à l’heure de jeu, par exemple), libérer la bête Mbappé suffirait à repartir du Vélodrome avec les trois points.

Kylian Mbappé est bien trop intelligent pour ne pas savoir qu’il a déconné. Thomas Tuchel est bien trop intelligent pour ignorer qu’il a besoin de son attaquant français pour faire grandir le PSG et son armoire à trophées. Il n’a d’ailleurs pas fanfaronné à l’issue de la rencontre : « Je n’aime pas jouer sans Kylian. Je déteste jouer sans Kylian pour un match comme ça. Pour moi ce soir, ce n’est pas une bonne soirée. » Reste que cette gaminerie de Mbappé et Rabiot est une aubaine pour Tuchel, qui a récupéré les clés du vestiaire et réalisé son premier gros coup, mettant fin à la punition de Kylian à la 62e minute et à celle d’Adrien à la 79e. Inutile d’imaginer ce qui se serait passé si le PSG avait perdu à Marseille, puisque cela n’a pas eu lieu.

Pierre Ménès peut définitivement remercier Tuchel. Grâce à lui, on en oublierait presque cette sortie grotesque digne d’un dérapage de Jean-Marie Bigard. La scène se passe donc à la mi-temps, et Hervé Mathoux commente les images de Lewis Hamilton, qui célèbre son nouveau titre de champion du monde de Formule 1 en cramant les pneus de son bolide. Ménès : « On dirait Laure (Boulleau) qui sort de son parking. » RIP Philippe Gildas.

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