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« Tu te promènes en Chine, tu vois des maillots de Boca »
Carlos Muguruza a débarqué en France au milieu des années 80 pour « jouer au tennis ». Mais comme il l'admet lui-même, il n'était « pas assez bon », alors il s'est lancé dans une carrière de commercial dans les photocopieurs. Il y a trois ans, il a monté Volver, un restaurant argentin dans le XIe arrondissement de Paris, devenu la cantine préférée des Argentins du PSG. Puis un deuxième Volver dans le plus chic VIe il y a quelques mois. Là où il vient de créer la Pena de los Xeneizes de Francia, la troisième association de supporters hors Argentine, après celles de l'Espagne et du Mexique.
Pourquoi avoir créé une Pena Boca Juniors en France ? Mon fils est né en France, mais il s’est rendu souvent à la Bombonera. Et il m’a dit un jour : « Pourquoi on ne monterait pas quelque chose ici ? Il y a tellement de supporters de Boca. » Donc, c’est comme ça qu’on a lancé cette idée. Parce que, quand on diffuse les Clásicos Boca-River ici, on doit avoir trois gars qui supportent River et le reste, c’est pour nous. Après, c’est pas seulement pour boire des coups et regarder des matchs. Chaque personne qui s’associe ici à notre Pena aura les mêmes droits qu’un socio de Boca qui habite en Argentine. Les gens auront une carte de membre et quand ils se présenteront à la Bombonera, ils pourront aller voir le match comme n’importe quel socio. On ne fait pas ça pour l’argent, mais surtout pour promouvoir notre club, que les gens connaissent ce que Boca représente. On est la troisième Pena créée en dehors de l’Argentine, après le Mexique et l’Espagne.
Est-ce que la Pena regroupe pour l’instant surtout la diaspora argentine à Paris ? Pas seulement. Le jour du lancement officiel, j’ai vu un gars, un Français, qui a pris une journée de repos pour venir en train de Suisse. On a officiellement cinq millions de supporters de Boca dans le monde, mais je crois qu’on est en fait beaucoup plus nombreux. Tu te promènes en Chine, n’importe où, tu vois des maillots jaune et bleu. À Paris, je croise souvent dans la rue des gens avec notre maillot, je leur parle en espagnol, je leur lance un « Che bostero » parce que je crois que ce sont des Argentins et ils me répondent : « Qu’est-ce que tu dis ? » Des gens qui ne sont jamais allés à la Bombonera, mais qui sont subjugués par le maillot, le stade, la ferveur, l’ambiance.
Pourquoi cette ferveur perdure-t-elle à la Bombonera alors que partout ailleurs les stades deviennent de plus en plus assoupis ?Je ne sais pas, cela ne s’explique pas. C’est Boca. Depuis le début de notre histoire. Les Gênois qui se sont installés dans ce quartier et qui ont pris les couleurs du drapeau suédois. Depuis, c’est une légende perpétuelle. C’est le peuple. C’est la grande différence avec River Plate. On les appelle les millionnaires, pas parce qu’ils sont riches, mais parce qu’on les a chassés d’ici vers le quartier de Núñez. S’ils avaient pu rester, ils seraient restés. Ils se prennent pour des millionnaires, mais je sais pas comment ils vont faire pour rembourser leurs 200 millions d’euros de dettes. Ils n’ont aucune star, à part Trezeguet qui vient d’être viré par leur coach Ramón Díaz. Ils ont même viré les joueurs comme Cavenaghi qui leur avaient permis de remonter. Ils sont différents. Pour les Clásicos, on leur jetait des poules, du maïs, des couches… Bon maintenant, c’est un peu encadré, il y a plus de contrôle. Par contre, on les appelle toujours les pecho frio, car ils ont le cœur froid, ils n’ont pas de courage et pas de charisme.
Pourtant certains de vos propres supporters qualifient Riquelme lui-même de « pecho frio » … Oui, peut-être… Il est spécial. Il n’aime pas beaucoup ses coéquipiers. Mais bon, on peut dire ce qu’on veut, il nous a fait gagner trois Copa Libertadores, plus que River à lui tout seul. C’est un génie. Et puis c’est peut-être à cause de la polémique avec Maradona, des histoires d’égo qui ne m’intéressent pas. Moi, je ne peux pas choisir entre les deux. Diego, il a peu joué pour nous. Une seule saison, mais quelle saison ! Diego, je ne suis pas objectif, je l’ai tellement aimé. Quand il a joué avec notre maillot, en 1981, j’ai vu tous les matchs au stade, à la Bombonera et à l’extérieur.
Et Lavezzi et Pastore, ils en pensent quoi de Boca Juniors ?El Pocho, il me chambre. Il est supporter de Rosario Central. El Flaco, c’est Talleres. J’ai rencontré David Beckham aussi. Je l’avais beaucoup insulté en 1998, à Saint-Étienne, pendant le match de Coupe du monde entre l’Angleterre et l’Argentine. Depuis, il y a prescription. Nous, les Argentins, on n’aime pas beaucoup les Anglais, mais on a fait la paix.
Et vous supportez quel club en France ? Saint-Étienne. Parce que j’étais ami avec Osvaldo Piazzia (ndlr : le stoppeur argentin de l’ASSE de 1972 à 1979), c’est lui qui m’a aidé à m’installer en France. Il m’avait donné le contact de Bernard Caïazzo qui n’était pas encore président du club. Partout où tu vas en France, tu retrouves des supporters de Saint-Étienne. Il y a beaucoup de ferveur aussi. Piazza me racontait que dans les années 70, les mineurs commençaient à boire à midi les jours de match.
Par Pierre Boisson et Joachim Barbier
Pour contacter la Pena de Boca Juniors en France : [email protected] Page Facebook de la Pena de Boca Juniors en France
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