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Tu sais que t’es devenu un peu gros pour jouer au foot quand …
Jeune, tu étais beau et svelte. Tu faisais partie du groupe des sportifs au collège, ce qui, d'ailleurs, t'avait permis de coincer la petite Sonia, qui faisait baver tout le monde à l'époque. Seulement voilà, quelques années ont passé depuis cette belle période. Et, malheureusement, le temps a fait des dégâts. Comme souvent. D'ailleurs, en toute honnêteté, t'es même devenu un peu gros pour jouer au foot. Et c'est pas les exemples qui manquent.
… tu n’oses même plus t’échauffer, car tu ne pourrais pas jouer derrière.
… quand des mecs te prennent dans leur équipe, tu sens clairement un peu de tristesse dans leurs yeux.
… tu vois toujours cette tristesse après quelques minutes de match.
… et à la fin, également.
… t’as déjà fait un semblant de malaise. L’une des ces fameuses fois où l’on flirte avec la mort.
… d’ailleurs t’as fait chier tout le monde, car le match a dû être interrompu alors qu’il y avait 10-10.
… il est loin le temps où tu jouais torse poil en espérant que des meufs te voient.
… maintenant, quand c’est les torses nus contre les autres, bah, tu fais partie des autres. Eh ouais, tu n’es pas encore dans la catégorie des gros décomplexés.
… et même habillé, t’espères qu’aucune meuf ne regarde.
… bizarrement, ça te fait beaucoup moins chier de passer goal en cours de match.
… tu as déjà vomi pendant un match. Et tu n’avais même pas pris de taule la veille.
… t’as déjà essayé une trentaine de fois de vraiment te remettre au sport. Espérons que la 31e soit la bonne.
… quand tu recules tellement sur le terrain que tu encourages ton gardien, derrière les buts.
… quand tu penses que l’échauffement, c’est un truc de prof d’EPS, alors t’envoies que des reprises de volée, à froid.
… quand tu dis à toutes les personnes qui doutent de ton talent : « Si j’avais un physique, tu me regarderais à la télé. »
… quand tu regrettes d’avoir demandé du M le jour où ton équipe a renouvelé les équipements.
… quand tu te dis que finalement t’es fier d’avoir suivi la trajectoire de ton idole, Ronaldo. Les travelos en moins.
… quand tes potes ont posté la vidéo de Pierre Ménès qui fait 10 jongles sur ton mur Facebook.
… il te reste bien ta belle frappe. D’ailleurs, c’est la seule qui ne s’est pas barrée. Enfin, pas encore.
… tu aimerais bien jouer avec ton maillot de Liverpool saison 2004-2005. Seulement voilà, tu le mettais il y a huit ans. Soit dix kilos.
… au fond, si tu joues encore un peu au foot, c’est juste pour avoir moins de remords quand tu te pètes un grec.
… malgré ton physique, tu ne te gênes pas pour parler du « gros Ménès » .
… tu préfères jouer sous la pluie, au moins, tu n’as plus honte de ta sudation excessive.
… tu as des problèmes aux genoux.
… tu te rappelles cette époque où tu ne voulais jamais prendre le petit gros dans ton équipe, au collège. Putain de routourne, hein.
… quand tes potes te voient partir avec ton sac de sport, il y a toujours beaucoup de surprise dans leur regard.
… et de la moquerie, aussi.
… après un foot, il te faut plusieurs jours de récup’. Pire qu’une cuite.
… avant, tu ne croyais pas les mecs qui disaient que ton jeu dépendait grandement de ta condition physique. Aujourd’hui, tu comprends mieux ce qu’ils voulaient dire.
… avant un soccer, il y a toujours un pote marrant qui te dit : « C’est bon, il y a un défibrillateur au bord du terrain » . Ça ne te fait pas forcément rire, mais, honnêtement, ça te rassure un peu. Beaucoup, même.
… quand les gars contre qui tu joues sont polis, ils parlent de toi comme « le costaud de l’équipe en face » .
… des fois, tes potes parlent du foot qu’ils ont fait hier. Tu sais, celui où tu n’étais pas convié.
… tu penses que ta vision du jeu fait la différence.
… après dix minutes de jeu, tu redécouvres la folie de l’eau. Ça ne vaut pas le coca, hein, mais c’est quand même un bon moment.
… malheureusement, après ton litre d’eau englouti, tu es encore plus lourd. Eh oui, c’est possible.
… quand tes potes t’appellent « gros » , ce n’est pas forcément un synonyme de « mec » .
… à la sortie d’un crochet extérieur, tu vois en crypté.
… les adversaires que tu croises tous les ans y vont de leur petit « T’as pris un peu non? » , mimes a l’appui.
… tu redoutes plus que jamais de prendre la douche.
… tu vois plus le bout de tes Kipsta.
… tes potes te disent « heureusement qu’il te reste un peu de technique » .
… tu es le seul à toucher aux bananes et aux oranges à la mi-temps.
… tous tes shorts étaient sales sauf un très vieux, et tu t’es rendu compte qu’il était plus serré que tes boxers.
… tu as regardé en douce tous les épisodes de l’émission où Ronaldo devait perdre du poids sur Youtube.
… t’as l’impression d’avoir trop mangé avant le match alors que t’es à jeun depuis 24 heures.
… on t’a offert un maillot de la Roma pour ton anniversaire et tu n’as jamais osé le porter.
… toutes les balances sur lesquelles tu es monté dernièrement déconnaient.
… il y a un autre mec qui porte le même prénom que toi dans ton équipe : pour vous distinguer, pour toi on précise « le gros » .
… on te surnomme de moins en moins souvent George Weah. Et beaucoup trop souvent Jean-claude Darcheville.
… tu viens de te faire les croisés, mais tous tes coéquipiers se foutent de ta gueule en te disant que t’avais qu’à courir un peu plus à l’échauffement.
… quand tu vas au city stade, on te met gardien parce que tu couvres 75% de la surface des cages.
… t’as envie de gifler le gringalet de ton équipe qui dit qu’il voudrait « prendre un peu de masse » mais qu’il n’y arrive pas.
… en soirée, les gens te disent que tu as mûri parce que tu as décidé d’arrêter la bière pour te mettre au vin et aux alcools forts.
… en lisant cet article, tu te dis que demain, cette fois c’est la bonne, tu te remets au sport. Et si tout se passe bien, tu rappelles Sonia d’ici quelques mois.
… ton visage est tout rouge au bout de 10 minutes.
… tes mollets sont ceux d’une danseuse étoile, et ton bide, celui d’un camionneur.
… tout le monde boit de l’eau à la mi-temps, sauf toi. Ton truc, c’est le Coca ou le Gatorade.
… tes chevilles de grand-mère ne rentrent plus dans les crampons.
… quand on fait une faute sur toi, le sol tremble.
… et il faut deux mecs pour te relever.
… tu sues beaucoup trop.
… t’as les cuisses qui se frottent l’une à l’autre. L’irritation ne te permet plus de courir.
… tu mets des coups d’épaules d’enculé à tous les maigrichons qui se prennent pour Neymar.
… t’es le premier à critiquer les « fatballeurs » .
… tu fais plus de passements de jambe.
… ta protection de balle est tout juste magnifique.
… tes mensurations, c’est 130 – 130 – 130. Oui, tu ressembles à une botte de foin.
Par Gaspard Manet, avec Pierre Boisson, Thomas Pitrel, Michael Simsolo et Javier Prieto-Santos