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Trezeguet, héros monumental
Samedi, le Français a inscrit un doublé synonyme de remontée en première division pour River Plate. L’aboutissement d’un rêve de gosse.
Il en a rêvé. Il l’a fait. David Trezeguet a expédié River Plate en Primera à l’issue d’une demi-saison idéale : « Treze » a inscrit samedi après-midi ses douzième et treizième buts en dix-neuf matches sous la tunique des Millonarios. Une rencontre formidable pour l’ancien goleador des Bleus, qui a toutefois manqué un pénalty en cours de route. River a mal joué, comme la plupart du temps cette saison, mais River a gagné grâce à son numéro 7, toujours aussi opportuniste. En première période, dans une ambiance de feu – et ce, malgré la fermeture du virage des Borrachos del Tablón, la barra brava millonaria (suite à l’assassinat d’un supporter il y a quinze jours) -, il alerte la défense d’Almirante Brown sur une occasion en trois temps qui termine en corner.
Mais Trezegol a très envie de marquer, d’entrer dans l’histoire de ce club qu’il supporte depuis son enfance, de boucler la boucle, après une carrière bien remplie sur le Vieux Continent. À la 50e minute, après un long dégagement, il réalise un une-deux aérien avec Rogelio Funes Mori, entré à la mi-temps à la place de Fernando Cavenaghi, avant de déclencher une frappe sèche du gauche à ras de terre qui vient se loger dans le petit filet du gardien adverse. Un à zéro et le stade qui chavire dans le sillage du « Franchute » (le Français), sur lequel se jette aussitôt l’ensemble de ses coéquipiers.
Sous les yeux du clan
Il se frappe le torse et adresse des baisers en direction de la loge où sont installés sa maman, ses oncles, ses cousins et ses amis d’enfance. Comblé de bonheur, à l’instar des dizaines de milliers de supporters hystériques, il sait qu’il est à deux doigts de reconduire en première division le club qu’il vénérait enfant, après une année en enfer. Une demi-heure plus tard, Martin Aguirre est fauché sur le côté droit de la surface. Tandis que les joueurs d’Almirante Brown se précipitent sur l’arbitre, Trezeguet récupère le ballon. Il se concentre à l’écart. Il sait qu’un second but mettrait quasiment River Plate à l’abri d’un retour.
Il s’élance, avec ses petites foulées à la Roberto Carlos, mais le gardien se couche parfaitement. Les démons de sa finale perdue avec la Juve contre le Milan en 2003 et de la Coupe du monde 2006 ressurgissent. Le Monumental a froid dans le dos. Les minutes passent et River n’est plus sûr de rien, même si deux de ses trois adversaires directs pour la montée trébuchent (Rosario Central perd 3-2 contre Desamparados de San Juan, et Instituto de Córdoba chute 3-0 contre Ferro Carril Oeste, tandis que Quilmes assure contre Guillermo Brown 2-0).
Il aurait pu repartir avec le ballon…
Mais Trezegol ne peut pas rester sur un échec. Sur une offrande de Rogelio Funes Mori, il allume le gardien au six mètres. Délivrance à deux minutes de la fin du temps réglementaire. Le Monumental explose de joie : River va retrouver la Primera. Trezeguet a signé un retour gagnant dans le pays de son enfance, il s’est consacré en héros d’un club dont il est hincha depuis toujours. Il y a un an, il observait depuis les tribunes le naufrage de ceux qui allaient devenir ses coéquipiers. Hier, il a vengé le peuple riverplatense de deux golazos. En l’observant faire le tour d’honneur tout autour de la piste d’athlétisme du Monumental, savourer son pari gagné au milieu des supporters qui ont envahi la pelouse, on se dit que l’expression « boucler la boucle » n’a jamais été aussi bien illustrée.
Florent Torchut, à Buenos Aires