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Transfert de Lihadji : c’est le Bronx à Marseille
Le 2 juillet dernier, Isaac Lihadji rejoignait le LOSC en provenance de Marseille pour 300 000 euros. Mais si le transfert du Marseillais fait encore autant parler, ce n’est pas seulement parce que l’OM a perdu l'un de ses jeunes les plus prometteurs, mais bien parce qu'il se retrouve mêlé à une histoire de crime et d’extorsion à en faire pâlir le dernier film d’Olivier Marchal.
Cet été, le LOSC a attiré dans ses filets le jeune Isaac Lihadji, qui avait refusé de signer son premier contrat professionnel à l’OM. Le joueur de 18 ans avait expliqué son choix dans les colonnes de L’Équipe : « Lille fait confiance aux jeunes depuis plusieurs années. Il y a de nombreux exemples de joueurs qui ont réussi ici. Le projet me fait envie, tout comme l’histoire de ce club. » Derrière ce transfert respectable se déroule une incroyable histoire judiciaire. Même si le LOSC n’avait dû verser qu’un faible montant à l’OM pour Lihadji, le club devait en revanche payer une prime de cinq millions d’euros au joueur ainsi qu’une commission pour l’agent du joueur, Moussa Sissoko.
En bande organisée
Le 4 octobre dernier, José Anigo est mis en examen pour des faits « d’association de malfaiteurs en vue de commettre les crimes d’extorsion et d’homicide en bande organisée ». La justice suspecte l’ancien entraîneur de l’OM d’avoir tenté de récupérer une partie de cette commission (environ un million et demi d’euros) pour préparer la vengeance de l’assassinat de son fils, avec l’aide d’une équipe de malfrats surnommée « la bande de la Capelette ». La police venait d’interpeller cette bande après plus d’un an d’écoutes téléphoniques et décide donc de placer José Anigo en garde à vue. Un autre homme connu de l’OM va lui aussi être mis en examen pour extorsion de fonds : Jean-Luc Barresi, ancien agent de joueurs. Le jour de son arrestation, Barresi se balade avec 280 000 euros en billets de 500.
Christian Bandikian au cœur de l’affaire
D’autres personnes occupent un rôle important dans cette histoire. Il y a par exemple Christian Bandikian, gérant d’une boîte de nuit et proche d’Isaac Lihadji. Dans une interview accordée à L’Équipe, il revient sur sa relation avec le joueur du LOSC : « Il est vrai que je suis assez proche, et que j’ai toujours aidé ce gosse. Le tuteur, le père adoptif d’Isaac, c’est un ami.(…)Il devait signer à Nice en 2014. Il faut savoir que ma femme est la cousine de la femme de José Anigo. Il m’a demandé, à cette époque, de tout faire pour que le petit signe à Marseille. J’ai discuté avec Nabil – le père adoptif de Lihadji – et Isaac a finalement rejoint l’OM. » Six ans plus tard, après le transfert de Lihadji à Lille, Christian Bandikian devait lui aussi toucher une partie de la commission. José Anigo et Jean-Luc Barresi auraient fait pression sur lui, afin de récupérer cette somme. Pour se protéger, Bandikian aurait demandé l’aide de Michel Campanella, connu pour être une des dernières figures du grand banditisme marseillais.
C’est pas ma faute à moi
Libéré, mais sous surveillance judiciaire, José Anigo s’est expliqué devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence : « Je n’ai pas l’intention de me soustraire à la justice. Je suis venu de mon plein gré. Cela fait sept ans que mon fils est mort. » Christian Bandikian assure lui que cette histoire n’a aucun sens : « Pourquoi voulez-vous que José me menace ? C’est un entraîneur de football. C’est un voyou depuis quand ? » Et à propos de Michel Campanella : « Je le connais depuis longtemps.(…)Et cela fait au moins deux ans que je ne l’ai pas vu. » De son côté, Jean-Luc Barresi, qui a passé deux mois en prison, va être libéré ce lundi. Lui non plus n’a rien fait : « Je suis complètement étranger à cette affaire, je suis effaré, je ne comprends pas. » Et les 280 000 euros ? « Le remboursement d’un prêt à un ami. »
Pendant ce temps-là, Isaac Lihadji fait sa vie et a même été appelé pour la première fois avec les Espoirs en novembre. Déménager à 1000 kilomètres de sa ville natale était certainement la meilleure décision de sa carrière.
Par Julien Bialot