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Tranmere Rovers, l’autre club de Liverpool
Écrasé par le poids de ses deux voisins, Liverpool et Everton, le Tranmere Rovers Football Club n'a jamais su s'imposer comme un concurrent crédible au règne dans le comté du Merseyside. Au lieu de ça, il s'apprête même à rejoindre la cinquième division britannique. Coup de projecteur sur les « Superwhites », pas si supers que ça finalement.
« Il y a trois équipes de football à Liverpool. Moi, je supporte l’autre. » Sans cesse questionné sur son rapport avec le doux cuir, George Harrison, guitariste à moustache des Beattles, avait l’habitude de faire dans le subliminal. Une courbette médiatique qui expose néanmoins un autre fait bien plus substantiel : la ville du célèbre band anglais posséderait donc trois équipes dignes de ce nom. Everton, Liverpool, mais quid de la dernière ? Il s’agit en réalité du Tranmere Rovers FC, club qui se situe à Birkenhead, ville de quelque 80 000 habitants simplement séparée de Liverpool par la Mersey, fleuve mythique et si fondamental au développement du Nord-Ouest de l’Angleterre. La proximité géographique a de fait toujours créé cette analogie dans le comté du Merseyside. Pour autant, les similitudes s’arrêtent là : Tranmere vit continuellement dans l’ombre de ses deux voisins. Et ce n’est pas près de changer.
McAteer encore plus « crétin » que John Barnes
C’en deviendrait presque un comble. Fondés en 1884, les Rovers peuvent se targuer d’être l’un des doyens de la région en matière de ballon rond – les Toffees ont vu le jour en 1878, les Reds en 1892 – sans avoir glané le moindre trophée majeur. À l’origine, l’association sportive se forme après le regroupement de deux équipes de cricket. Mais ce n’est que pendant la période d’avant-guerre, en 1912, que Tranmere obtient officiellement son statut professionnel. Un statut que devrait perdre relativement rapidement l’écurie de Birkenhead. À l’issue de l’exercice qui vient de s’écouler, les « Superwhites » ont terminé bonnet d’âne de League Two, la quatrième division anglaise et se dirigent donc vers la Conference, un échelon semi-professionnel. Le pire bilan depuis près de trente ans.
Bien que cantonné à jouer les seconds rôles dans la Mersey, le TRFC a connu, comme tout bon club britannique qui se respecte, quelques sommets. Au milieu des années 70, Ron Yeats, véritable clef de voute défensive et capitaine de Liverpool, traverse le fleuve large d’un kilomètre pour poser ses valises dans la « troisième équipe de la ville » . « The Colossus » y découvre un rôle de joueur-entraîneur et emmène d’ailleurs les siens conquérir Highbury au second tour de la Coupe de la Ligue anglaise. La légende raconte même que Bill Shnakly, mémorable manager du voisin rouge jusqu’en 1974, serait également passé de l’autre côté du fleuve, histoire de prêter main forte à son ancien protégé. En effet, aucune réelle rivalité n’existe entre Tranmere et les deux ogres qui évoluent actuellement en Premier League, simplement pour des raisons sportives, les Rovers boxant dans une catégorie bien en dessous. Les supporters ont donc jeté leur fanatisme sur Bolton – 40 kilomètres plus au nord-est du Royaume – et ses Vagabonds. Plus récemment, en 2009, deux anciens Reds version nineties s’étaient rendus à Birkenhead : John Barnes et Jason McAteer. L’un en tant qu’entraîneur principal, l’autre en tant qu’assistant. L’aventure sera pourtant courte et calamiteuse. Pour preuve, les deux acolytes gardent le surnom de « Dumb and Dumber » à Tranmere. Pas franchement valorisant.
Un trip vers la lune en sous-marin
Seulement, le roi incontesté dans l’esprit des fans demeure John King, joueur emblématique puis coach à réussite des Rovers, notamment lors de son second passage, de 1987 à 1996. C’est lui qui conduit le TRFC vers la – presque – gloire. Dès son arrivée, King prévient : « Je ne peux vous promettre des succès, mais je peux vous promettre un voyage vers la lune. » Trois années durant, de 1993 à 1995, les « Superwhites » échouent lors des barrages pour l’accession à l’élite du football outre-Manche. Chaque fois en demi-finale. Ce qui inspira une jolie métaphore au manager anglais : « Tranmere ne sera jamais capable de concurrencer Liverpool et Everton. Ce sont d’énormes paquebots, comme le Queen Mary, alors que je nous vois davantage comme un sous-marin mortel. »
Une fois, les Rovers ont tout de même failli piquer la vedette à leurs voisins. En 2001, John Aldridge (encore un ancien de la maison liverpuldienne !) et ses joueurs parviennent à coller un 3-0 aux Toffees en FA Cup, à Goodison Park qui plus est. Aléa du destin, Tranmere rencontre Liverpool en quarts de finale. L’occasion pour une ville tout entière d’attirer enfin la lumière des projecteurs, du moins le temps d’une rencontre. Danny Murphy, Michael Owen, Steven Gerrard et Robbie Fowler se chargeront de rappeler que les Reds contrôlent encore la région (victoire 4-2). Et de renvoyer le sous-marin blanc dans les profondeurs de la Mersey.
Par Eddy Abou Serres