Trajkovski, roi de Palerme

À la 92^e minute d’un duel très tendu entre l’Italie et la Macédoine dans le stade de Palerme, un nom bien connu des amateurs du Calcio inscrit son nom dans l’histoire. Pour mieux faire plonger le pays qui l’a révélé. Aleksandar Trajkovski, 29 ans, vient de renvoyer la Nazionale dans ses heures les plus sombres, en la privant pour la deuxième fois de rang d’une Coupe du monde. L’attaquant arrivé à Al-Fayha cet hiver sonne la révolte des Lions rouges, qui ont passé 90 minutes à repousser l’ennemi, pour mieux achever une bête déjà blessée de n’être qu’en barrages, d’une frappe qui se niche dans le petit filet d’un Gigio Donnarumma dont les bras ont subitement paru très courts. Au coup de sifflet final, l’ailier gauche célèbre « chez lui » cette victoire 1-0 obtenue sur le fil qui qualifie la Macédoine du Nord en finale des barrages, où elle affrontera le Portugal.

« Palerme m’a fait tomber amoureux de la vie »

Les supporters siciliens s’arracheront sans doute plus les cheveux que d’autres devant le tableau d’affichage, avec ce « Trajkovski, 90^e+2 ». Ce nom a en effet résonné pendant quatre saisons dans les travées du Stadio Renzo Barbera, antre du Palermo et théâtre des plus belles années en club de l’international macédonien. En 2015, lorsqu’il débarque du côté de Palerme, le club est en Serie A, aligne une attaque avec Andrea Belotti et Robin Quaison, tous deux 22 ans à l’époque. 113 matchs et 20 buts plus tard, le Macédonien, qui enchaîne les saisons pleines entre Serie A et Serie B, quitte le navire quand le club est exclu de deuxième division. Il s’agit de sa seule expérience en Italie, mais le natif de Skopje ne l’oublie pas lorsqu’il est interrogé par la Repubblica le mois dernier sur son retour à Palerme avec le maillot rouge et jaune. « La Sicile est restée en moi, Palerme m’a fait tomber amoureux de la vie, de la cuisine de rue, des atmosphères particulières, des gens, racontait-il alors innocemment. Je vivais à Mondello et je me sentais comme un roi. Un été, au lieu de rentrer en Serbie, j’ai passé mes vacances à la plage. Nous vivions à Fondo Anfossi, nous allions à l’Ombelico del Mondo, avec Jajalo, Nestorovski et Posavec… »

« Je vais me sentir chez moi »

S’il s’étend autant sur son amour de l’Italie, c’est que lorsqu’il découvre une autre île, celle de Majorque la saison suivante, les choses tournent beaucoup moins bien pour lui. Après 28 matchs pour un seul but, toutes compétitions confondues, l’ancienne promesse du football macédonien est invitée à plier bagages. Direction le Danemark à Aalborg pour six mois, puis Al-Fayha en Arabie saoudite à l’hiver, cédant aux sirènes du gros chèque alors qu’il avait clamé vouloir revenir en Italie dix jours plus tôt. Les retrouvailles attendront finalement ce match du 24 mars, spécial pour de nombreux joueurs macédoniens, dont le rêve est souvent de jouer en Serie A. Mais qui a une saveur particulière pour Trajkovski, dont le pays est « toujours dans son cœur ». « Quand j’ai appris que le match se jouerait au Barbera, j’étais heureux. Je vais enfin voir les lieux où j’ai vécu quatre merveilleuses années, s’enthousiasmait-il cette semaine dans une vidéo diffusée par la fédération macédonienne. Je vais me sentir chez moi. Le stade sera plein, et les supporters accompagneront l’Italie. Ce sera un stimulant pour nous : nous battre ne sera pas facile, je peux vous l’assurer. Nous montrons aussi de la qualité et nous avons déjà écrit une page d’histoire en nous plaçant en barrages. » Entre Palerme et Trajkovski, l’amour aura donc duré quatre ans et 92 minutes.