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Touré : «Je suis comme Michael Jackson dans un épisode de Colombo»

Propos recueillis par Pierre Henry-Dufeil
Touré : «Je suis comme Michael Jackson dans un épisode de Colombo»

Pendant que le Togo d'Adebayor ballotait l'Algérie le week-end dernier, Kader Touré foulait les froides pelouses du Doubs. Sans club depuis mai 2011, l'attaquant maintient sa forme en s'entraînant avec la réserve du FC Sochaux, où il a évolué entre 2004 et 2005. À 33 ans, le meilleur buteur de l'histoire des Éperviers, passé aussi par Guingamp, nous confie son malaise. Triste fin pour celui qui avait brillé à la Coupe du monde 2006, en inscrivant notamment le seul but du Togo en phase finale.

Kader, tu es sans club depuis un an et demi, comment tu en es arrivé là ?Depuis que je suis parti d’Ajman aux Émirats, je n’ai plus rejoué. En France, dès que tu restes une saison sans compétition, c’est compliqué de trouver un point de chute. J’aurais pu signer aussi dans le Golfe, mais le club en question a pris un autre joueur à ma place. Je sais que je peux jouer encore quelques années, donc je continue à m’entraîner. Le plus dur, c’est de ne pas être sur le terrain et de voir les autres jouer. Je vais faire une confidence, je ne regarde même plus les matchs à la télé. Je n’y arrive plus, je vais juste voir les scores après.

Tu as dit que tu étais prêt à jouer encore. Combien d’années, selon toi ?L’avenir nous le dira, le physique aussi. Il y a quelque temps, j’étais tiraillé entre mon cœur et ma tête. Mais quand mon fils Chaïrane-Chakour-Adam est né (son premier garçon après deux petites filles, ndlr), ça m’a donné encore un peu de force pour essayer de réintégrer une équipe. J’ai vu dans ses yeux qu’il voulait me voir sur la pelouse avant que j’arrête. Arrivé à un moment, si tu ne sors pas du football, c’est le football qui te fait sortir par la petite porte.

Financièrement, c’est compliqué, on imagine.Oui et non. C’est un peu paradoxal, on sait que si ça continue, ça sera plus dur. Je remercie Dieu pour le moment, on tient la baraque, mais qu’y a-t-il de bien dans une fortune qui augmente au cours d’une vie qui diminue ? Chaque jour prédispose à la fatigue, au vieillissement et à la mort. Donc, la santé avant tout !

« T’as beau t’appeler Maradona, si tu n’es pas bien dans tête, ça ne marche pas »

Est-ce que tu as des regrets par rapport à ta carrière ?Je n’aime pas ce mot « regret » , car il a un côté dépressif. Ma carrière au niveau des clubs n’est pas celle dont je rêvais, mais je ne me plains pas. Je suis très croyant et je crois au destin, c’était le mien. En revanche, en équipe nationale, j’ai toujours été présent aux grands rendez-vous. Et d’après les connaisseurs, les grands joueurs sont là dans les moments importants. Ce serait mentir que de parler de regrets. Le rêve de tous les joueurs, c’est de goûter aux grandes compétitions. Non seulement le Bon Dieu m’a fait goûter à la plus prestigieuse, mais en plus il m’a fait laisser des traces indélébiles. Au niveau de l’équipe nationale, je n’ai rien à envier à personne. Sur la globalité, je suis content de moi, mais je pense que mon passage à Guingamp est l’étape qui m’a coupé les ailes.

C’est dommage, car on pensait qu’après ta superbe Coupe du monde, tu allais t’envoler à EAG. Qu’est-ce qui a fait que tu n’aies pas réussi à enchaîner ?Beaucoup de choses. Quand je suis revenu du Mondial, le coach m’a fait jouer milieu droit, ce n’est pas un poste que je maîtrise. Comme je l’ai dit auparavant, je suis croyant et je crois aussi au mauvais œil.

Comme quoi ?Sur le terrain, c’était comme si je n’avais jamais joué au foot ! J’avais l’impression de ne plus savoir faire de contrôle, j’ai perdu tous mes repères, toutes mes armes. Des fois, avant d’entrer sur le terrain, je me sentais très, très mal. J’avais perdu toute ma confiance, j’étais moins utilisé, donc j’étais dans un cercle vicieux. T’as beau t’appeler Maradona, si tu n’es pas bien dans tête, ça ne marche pas.

« En 2006, on a fait plus de réunions que d’entraînements »

Tu es un joueur qui compte dans l’histoire des Éperviers. Avant ton but contre la Corée du Sud en 2006, ton doublé au Congo avait permis aux tiens de se qualifier pour cette même Coupe du monde. En fait, tu as toujours mieux réussi avec le Togo qu’avec tes clubs.Si tu as remarqué, j’ai fait beaucoup de clubs (13 au total, ndlr) et à part Guingamp, aucun d’entre eux ne m’a fait partir parce qu’il ne me voulait plus. Mais… non, je ne sais pas, à nouveau ! C’est encore quelque chose que je n’arrive pas à expliquer (rires).

Quel regard portes-tu aujourd’hui sur les performances des Éperviers ?Comme dit précédemment, je ne regarde que les scores. On est qualifiés, c’est bien, c’est une bonne chose pour la relève. On m’a dit que le premier match contre la Côte d’Ivoire n’avait pas été trop mal, j’espère qu’ils vont faire un résultat contre la Tunisie et que tout se passera bien sur et en dehors du terrain.

C’est vrai que, de l’extérieur, on a toujours l’impression qu’un climat de polémique règne sur le Togo. Ça a encore été le cas cette année et c’était le cas notamment en 2006 où vous aviez fait une grève à cause des primes. Ça déstabilise une équipe ?Oui, c’est normal parce qu’on avait plus fait de réunions que d’entraînements ! Je crois que c’est une chose dont il faut se méfier. Il faut trouver un compromis, sinon on va rester toujours sur des problèmes qui ne valent pas la peine et on va occulter l’essentiel.

Il vient d’où ce problème, selon toi ?Avant, c’était au niveau de la Fédération, mais maintenant ce sont certains joueurs qui mettent un peu de désordre. Ils ont oublié que ce sont de simples joueurs et pas des dirigeants. Et ça ne vaut pas la peine de donner des noms maintenant, le Togo a une compétition à jouer. Je ne veux pas envenimer la polémique. J’espère vraiment qu’ils vont faire une grande CAN, ils en sont encore capables.
Est-ce-que, honnêtement, tu penses que tu peux rejouer un jour avec le maillot des Éperviers ?Si on m’avait dit un jour après la Coupe du monde que, quelques années plus tard, je serai un an sans club, je n’aurais pas pu y croire. Donc je ne peux pas dire non et je ne peux pas dire oui. Mais c’est insupportable d’être togolais et de voir des frères jouer sans que tu ne puisses faire quelque chose. C’est embêtant, aberrant, désolant de ne pas être là, mais je ne regrette pas parce que j’ai beaucoup de choses à dire à certains. Mieux vaut être seul que mal accompagné. Je n’ai pas envie de passer par téléphone ou par internet, je veux leur dire en face d’abord.
Si tu ne rejoues pas en sélection, est-ce que tu t’imagines un jour à la Fédération ou dans le staff ? Seul l’avenir nous le dira, on ne sait jamais ce qui va se passer. Finir dans le staff, si mon pays a besoin d’aide, pourquoi pas ! J’ai déjà pensé à ma reconversion, j’ai commencé à y penser à la moitié de ma carrière parce que, pour un footballeur, c’est ce qu’il y a de plus dur. Encore plus quand t’es africain. Aujourd’hui, tu peux compter les anciens joueurs africains dans un staff sur les doigts d’une main. Je pense un peu plus à ma reconversion maintenant, mais ça ne sera pas forcément dans le foot.

« Je connais ceux qui veulent me flinguer »

C’est vraiment la naissance de ton fils qui t’a poussé à ne pas arrêter ta carrière ?Oui, c’est la première raison. La deuxième, c’est que je vois certains de mes aînés jouer encore en équipe nationale. Je suis sûr que je peux encore jouer. Si ton corps te dit d’arrêter, tu arrêtes. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Je vais te dire quelque chose : je suis comme Michael Jackson dans un épisode de Colombo (rires).
Qu’est-ce que tu entends par là ?Quand tu entends le nom de Michael Jackson, tu penses à quoi ?
Ben, je le vois danser !Voilà ! Parce que, quand les Togolais me voient, ils parlent de ma vitesse à chaque fois. Ils oublient ma façon de jouer, ils oublient la vision du jeu, le physique… Tu comprends ?
Oui, ce sont des qualités qu’on avait vues notamment au Mondial. Mais quel rapport alors avec un épisode de Colombo ?Colombo, avant même le crime, il connaît déjà l’assassin. Moi, je connais ceux qui veulent me flinguer, et qui voulaient me flinguer avant même que je n’arrive en équipe nationale. Mais comme ma mère m’a toujours dit : « Ne jamais écraser les gens par n’importe quels moyens. »

« D’ici deux ans, le gardien de l’équipe première aura un casque »

Propos recueillis par Pierre Henry-Dufeil

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