- Espagne
- Coupe du Roi
- 8e de finale aller
Top 8 : Exploits en Coupe du Roi
La faute à un règlement moins favorable aux petits, il est rare d’assister à des surprises estampillées « Coupe de France » en Espagne. Mais pas impossible. En huit exploits, So Foot vous retrace les contes de fées et les retournements improbables qui marquent l’histoire de la Copa del Rey.
1/ L’AD Alcorcón en 2009 :
« L’Alcorconazo » : l’expression qui hante tous les socios merengues. Pour rappel, il faut remonter au 27 octobre 2009. Depuis peu à la tête du Real Madrid, Manuel Pellegrini s’en va visiter la banlieue madrilène. Dans le sud de la capitale, c’est le petit Poucet de l’AD Alcorcón qui s’apprête à accueillir ces Galactiques 2.0. Modestes pensionnaires de Segunda Division B – soit le troisième échelon national – personne, ou presque, n’imagine l’exploit possible. A la mi-temps, il en est tout autre. Malgré la présence dans son XI des Benzema, Raúl et van der Vaart, le Real accumule un retard de trois buts. De mal en pis, c’est finalement sur un 4-0 historique que se termine ce 16e de finale aller. La Maison Blanche tâte la dépression et se permet même quelques déchirements face caméra. L’échange de mots doux entre Manuel Pellegrini et Guti reste un modèle du genre. Au retour, pas de miracle pour les Blancos. Malgré un succès minimaliste (1-0), le Real est humilié. Et Manuel Pellegrini ne se remettra jamais, auprès de la presse et des socios, de cet affront. L’Alcorcón, lui, se fera éliminer par le Racing Santander. Question de standing.
2/ Le CD Mirandés en 2012 :
Miranda de Ebro, un nom peu glorieux en Espagne. Symbole de la cruauté de Franco, cette ville de la province de Burgos a accueilli l’un des camps de concentration les plus funestes de la guerre civile. Histoire de redorer ce blason, le club local du CD Mirandés y est allé de sa prouesse. Il y a deux saisons, ce sont trois équipes de Liga qui tomberont face à ces joueurs de Segunda Division B. Première victime, Villarreal. Après un score de parité à l’aller (1-1), les hommes de Castilla y León l’emportent 2-0 au retour. En huitièmes, c’est le Racing Santander qui passe à la trappe (2-0 à l’aller, 1-1 au retour). Mais le meilleur est encore à venir. Défaits 3-2 dans l’antre de l’Espanyol, les Jabatos se la jouent Calais, version espagnole. Au coude à coude tout le match durant, ils inscrivent le but de la qualif’ dans les arrêts de jeu (92e). D’une tête rageuse, Caneda distribue du bonheur dans une ville touchée de plein fouet par la crise. La demie face à l’Athletic Bilbao n’est alors plus que du bonus. Balayé par les Basques (8-3 en deux rencontres), le CD Mirandés est pourtant le vrai gagnant de cette édition.
3/ Le CD Numancia en 1996 :
Au rayon « trois-clubs-de-Liga-à-la-trappe » , le CD Mirandés n’est pourtant pas précurseur. Seize ans plus tôt, un autre CD de Segunda Division B, celui de Numancia, a fait tout aussi bien. Premiers gros poissons, les Basques se font avoir à Anoeta aux tirs au but (2-0 à l’aller, comme au retour). Le Racing Santander, amulette des petits Poucet, ne fait pas un pli en seizièmes de finale. Hautains, les joueurs de Liga rentreront la queue entre les jambes après une défaite au retour, et à domicile, 1-0. Au tour suivant, le Sporting Gijón ne se remettra pas de son revers du match aller (2-1, 0-0 au retour). Cerise, c’est le FC Barcelone qui s’avance en quarts de finale. Les Blaugranas, eux, sont prévenus. L’élimination est donc au rendez-vous. Mais Numancia peut se targuer d’avoir tenu le match nul à l’aller (2-2). Et d’avoir fait souffrir le Barça au retour (1-3). La recette ? « Nous venons pour jouer au football. Ce serait impardonnable de ne pas jouir de cette opportunité et de faire l’imbécile » , dixit Lotina, le Ladislas Lozano local. Cruyff n’aurait su si bien dire.
4/ L’UE Figueres en 2002 :
Figueroas, c’est avant tout la ville de Dali. Son musée éponyme et le château de San Ferran, plus grande forteresse européenne, en sont ses étendards. L’UE Figueres pèse, lui, bien moins lourd sur l’échiquier du football espagnol. En 2002, il est pourtant entré dans son histoire. Alors au troisième échelon national, la Unió frappe fort dès l’entrée en lice des clubs de Liga. Face à elle, le grand voisin catalan du Barça. Un fanion blaugrana qui va connaître son Alcorconazo. Vainqueur 1-0, l’UE Figueres écrit les prémisses de sa légende. En seizièmes, c’est au tour d’Osasuna de tomber lors de la séance de penaltys. Novelda, en huitièmes, puis Córdoba en quarts passeront à la trappe. Dans le dernier carré, c’est l’ogre du Super Depor qui s’avance. Même pas peur, les Catalans ne doivent leur élimination qu’à une courte défaite à l’aller (1-0, 1-1 au retour). A ce jour, l’UE Figueres reste la seule équipe de Segunda Division B à avoir atteint le dernier carré. Et ce, avec un budget tout riquiqui : « Avec ce qu’a payé le Barça pour Saviola, l’Unió pourrait vivre 66 ans » , selon son président d’alors Xavier Xinxó. Douze ans plus tard, le mythe est toujours là.
5/ Le Real Madrid Castilla en 1980 :
Une finale OVNI : le Real Madrid contre sa réserve de la Castilla. Cette situation inédite, la version 1980 de la Copa del Rey l’a connue. Car oui, fut un temps, les équipes B des clubs professionnels pouvaient encore prendre part à la coupe nationale. Mais cette exception réglementaire n’explique pas tout. Pour tutoyer ses illustres aînés du Real Madrid, les joueurs de la Castilla ont réussi un parcours à conjuguer au plus que parfait. Alors en Segunda Division, la réserve merengue élimine successivement le CF Extremadura, le Racing Santander puis, son premier gros poisson, l’Herculés Alicante. S’en suit alors un grand Chelem basque. En huitièmes de finale, l’Athletic Bilbao passe à la trappe (0-0, 2-1). Au tour suivant, le voisin de la Real Sociedad, futur champion d’Espagne en 1981 et 1982, est sorti après un match retour d’anthologie durant lequel Arconada a longtemps repoussé l’échéance. La demie, elle, est du même acabit. Défaits dans les Asturies (2-0), les hommes de la Castilla font sauter le Sporting Gijón au retour (4-1). En finale, c’est donc le grand Real qui s’approche. En coulisses, il se murmure que le cœur du président d’alors, Luis de Carlos, balancerait pour ses canteranos. Sans pitié, les Del Bosque et autres Juanito écrasent cette finale (6-1). Qu’importe, le Real sera à jamais le grand gagnant de cette édition pas comme les autres.
6/ Le FC Barcelone en 1997 :
La Quinta del Buitre n’a pas le monopole des Remuntadas. Le Barça de Bobby Robson a également connu sa folle nuit pour ce qui reste comme le plus beau match de l’histoire de la Copa del Rey. Contraints au nul sur la pelouse du Vicente Calderón à l’aller (2-2), les Blaugranas partent favoris pour ce quart de finale retour. Problème, un Serbe répondant au nom de Pantic porte la tunique des Matelassiers. Ainsi, en 31 minutes, le milieu de terrain colchonero a déjà inscrit un hat-trick. Avec ce 3-0 dans la musette à la mi-temps, il faut quatre buts au Barça pour espérer une qualification. Du rêve à la réalité, Ronaldo sort les griffes. En un triplé, il remet son monde à égalité (4-4) – entre-temps, Figo d’une somptueuse reprise et Pantic y sont allés de leur banderille respective. A neuf minutes du terme, c’est Pizzi – l’actuel entraîneur de Valence – qui arrache le but de la victoire. Fou, le Camp Nou vient de voir l’un des plus beaux exploits de son existence. Mieux, lui sera offert la Copa del Rey quelques semaines plus tard suite à une victoire en finale face au Betis Séville.
7/ Le Novelda CF en 2002 :
2002, une année à oublier pour le Barça. Déjà sorti par le modeste UE Figueres lors de l’édition précédente, le FC Barcelone remet ça l’année suivante. Cette fois, le bourreau répond au doux nom du Novelda CF. Équipe de la région d’Alicante, les Verdiblancos évoluent alors en Segunda B – ils militent actuellement au premier niveau régional. La réception des Catalans en 32e de finale a tout de la fête du village. Pourtant, l’impensable va se réaliser. En 20 minutes (de la 58e à la 78e), la défense hollandaise de Boer-Reiziger va totalement céder. Par trois fois, l’anonyme attaquant Madrigal pousse Enke au supplice. En face, les Riquelme, Saviola et Mendieta n’y pourront rien. Euphoriques, les joueurs de Novelda ne lâcheront pas leur avantage et sortiront le grand FC Barcelone de Luis van Gaal. Au tour suivant, ils tomberont face à d’autres anonymes, ceux du Terrassa FC.
8/ L’UD Levante en 1937 :
L’une des plus grandes polémiques du football espagnol : le Levante et la Copa de 1937. Alors en pleine guerre civile, l’Espagne est fragmentée en deux. Côté républicain, le président du FC Valence, Josep Rodríguez Tortajada, lance l’idée d’une Copa de la España Libre, également connue sous le nom de Trophée du Président de la République. Problème, seuls les clubs des communautés de Valence et de Catalogne, territoires sous régime républicain, peuvent y participer. Au final, Levante, Valence, Gérone et l’Espanyol Barcelone sont les uniques participants. Après une phase de poules, Levante et Valence se retrouvent en finale. Une victoire 1-0 des Granotas leur offrira la coupe. La prise de pouvoir de Franco en 1939 fera annuler tous les résultats sportifs de la zone républicaine. Depuis, l’UD Levante ne cesse de réclamer son dû. L’argument avancé : le fait que l’Espagne républicaine était l’Espagne légitime. Entre 2007 et 2009, les recours officiels sont même actionnés. Finalement, l’argumentation ne trouvera grâce aux yeux de la RFEF. En pleine guerre fratricide, l’exploit d’avoir organisé une compétition méritait, sans doute, meilleur sort.
Par Robin Delorme, à Madrid