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Top 50 : Chants de supporters mythiques – (1er) Brasil, decime qué se siente
Les supporters nous manquent. Les Argentins, les Britanniques et tous les autres. À l'heure où le football se joue dans des stades vides, voilà une sélection de 50 chants de supporters qui hérissent le poil.
#1 - Brasil, decime qué se siente
Brasil, decime qué se siente (San Lorenzo/Argentine)
Brasil, decime qué se siente
Tener en casa a tu papá
Te juro que aunque pasen los años
Nunca nos vamos a olvidar
Que el Diego te gambeteó
Que Cani te vacunó
Que estás llorando desde Italia hasta hoy
A Messi lo vas a ver
La copa nos va a traer
Maradona es más grande que Pelé.
Brésil, dis-moi ce que ça fait
d’avoir papa à la maison
Je te jure que malgré les années
Nous n’allons jamais oublier
Que le Diego t’a dribblé
Que le Cani t’a vacciné
Tu pleures depuis l’Italie jusqu’à maintenant
Tu vas voir Messi
Il va nous ramener la coupe
Maradona est plus grand que Pelé.
Claudio Caniggia l’affirme, il a marqué le but le plus important de sa carrière et vécu l’un des moments les plus forts de sa vie le 24 juin 1990. C’était lors de Brésil-Argentine, en huitième de finale du Mondial italien. Si la Seleçao a dominé la rencontre, le seul but de la rencontre a été planté par l’Albiceleste, sur une frappe du blondinet Caniggia qui, après avoir profité d’un caviar de Maradona, a pris soin de dribbler le gardien et de faire trembler les ficelles. « Sur internet, je l’ai regardé avec des commentaires espagnols, italiens et même brésiliens, énumère Caniggia. La version brésilienne est la meilleure, parce que tu sens que le mec qui commente a envie de se suicider à cause de moi. Quand mes enfants m’appellent pour revoir ce but, je leur dis toujours : « D’accord, mais seulement si vous me mettez les commentaires en brésilien !« »
Une mélodie reprise jusque dans la sphère politique
Cette action a été si marquante pour Cani et tous les Argentins parce qu’elle symbolise une victoire contre le rival brésilien et donc les larmes de ces derniers (qui plus est dans un contexte controversé, un membre du staff argentin étant soupçonné d’avoir offert une bouteille contenant un somnifère au Brésilien Branco, avant le match). Au contraire, les Brésiliens avaient envie de l’effacer de leur mémoire parce que c’est l’Argentine qui les a éliminés. Raté ! Vingt-quatre ans plus tard, les Argentins leur ont rabâché ce souvenir tout l’été, lors de la Coupe du monde 2014 au Brésil, avec les paroles – « Je te jure que jamais je vais l’oublier / Que le Diego t’a dribblé / Que le Cani t’a vacciné / Tu pleures depuis l’Italie jusqu’à maintenant » – d’une chanson qui a fait le tour de la planète foot : Brasil, decime que se siente.
Spécialistes de la reprise des tubes musicaux (voir le #17 du top), les hinchas du club de San Lorenzo sont les premiers à avoir importé cet air en tribune. Il s’agit de la mélodie de Bad Moon Rising, une chanson folk rock de 1969 de Creedance Clearwater Revival. Si les paroles initiales sont profondément sombres ( « Ne viens pas dans le coin cette nuit / Eh bien, c’est destiné à prendre ta vie / Il y a une mauvaise lune qui se lève » ), l’adaptation par les supporters de San Lorenzo ( « Vengo del barrio de Boedo » ) est hyper entraînant. Au point d’inspirer tous les autres stades. Des adaptations, le site Lucarne Opposée en a dénombré au moins 32 rien que pour des clubs argentins ! Même la sphère politique s’est emparée de la mélodie, à l’instar d’un hymne de La Cámpora, mouvement politique mené par Cristina Kirchner, en vue des élections législatives de 2013 en Argentine.
Mais c’est évidemment la reprise à la gloire de la sélection nationale, écrite en février 2014 par Ignacio Harraca, employé chez Unilever, qui a le plus cartonné. En un mois, son adaptation est devenue l’hymne officieux des supporters argentins, puis LA chanson du Mondial 2014. Pourquoi un tel carton ? D’une, parce qu’elle rassemble tout un pays. De deux, parce que rien n’émoustille davantage les supporters argentins que de chambrer les Brésiliens chez eux du matin au soir, et ce n’est pas Caniggia qui dira le contraire.
« La culture footballistique argentine est profondément narcissique »
« La culture footballistique argentine est profondément narcissique, décrypte Pablo Alabarces, sociologue argentin, interrogé par So Foot en 2014. Le football argentin ne tolère pas de se sentir inférieur à un autre. On sait très bien que le Brésil est largement supérieur. Ils ont cinq Coupes du monde, on en a deux, dont une gagnée sous la dictature. Mais la culture n’est pas là pour refléter le réel. Même si c’est faux, on va chanter la « paternité » ; la supériorité sur le Brésil. »
Maradona lui aussi s’en est donné à cœur joie en claironnant après l’humiliation subie par la Seleçao face à l’Allemagne en demi-finale qu’il était « plus fort que Pelé » . Tout comme les joueurs argentins eux-mêmes quand ils célébraient leurs qualifications. On les a moins entendus après la finale. Car, comme lors de l’édition 1990, l’Albiceleste s’est inclinée sur la dernière marche contre la Nationalmannschaft. Alors, certes, Messi n’a pas ramené la Coupe à Buenos Aires, mais la chanson est devenue culte, bien au-delà des stades de la Coupe du monde. Une preuve, il faut bien l’admettre, de la suprématie argentine en terme de chants dans le monde.
propos de Claudio Caniggia et Pablo Alabarces tirés du reportage en immersion avec les supporters argentins au Brésil, pendant le Mondial 2014, à retrouver dans le So Foot #118
Par Julien Duez, Florian Lefèvre et Valentin Lutz