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Top 11 : Eurobrésiliens

Par Javier Prieto-Santos
11 minutes
Top 11 : Eurobrésiliens

Depuis quelques semaines, Clarence Seedorf est devenu le dernier Européen à tenter l’expérience brésilienne en rejoignant le club de Botafogo.

Fritz Essenfelder (Allemagne)Il est arrivé au Brésil avant les deux guerres mondiales, ce qui le disculpe d’un exil douteux. Industriel spécialisé dans la sidérurgie, Fritz débarque de son Allemagne natale pour faire fortune à Curitiba, pas loin, à l’époque, de ressembler au trou du cul du monde. Avec d’autres potes teutons, Essenfelder décide en 1909 de créer le Curitiba Football Club, ce qui lui permet encore aujourd’hui d’être considéré comme l’importateur du football dans l’état du Paraná. En 1917, celui qui s’est fait rebaptiser Frederico devient aussi le premier capitaine étranger à remporter le titre du Paranaense, le premier de l’histoire du Curitiba.

Waldemar Zaclis (Roumanie)Né en Roumanie en 1918, Zaclis émigre à São Paulo avec ses parents. Au Brésil, Vladimir devient Waldemar et intègre la faculté de droit Largo de São Francisco. Comme le « docteur » Sócrates quelques décennies plus tard, le Roumain va avoir du mal à se décider entre sa carrière d’avocat et sa passion pour le football. Il décide finalement d’exercer les deux en même temps. Avec succès, puisque le rugueux défenseur central devient le premier étranger à remporter trois championnats paulista consécutifs sous le maillot des Corinthians. Surnommé le « Juif » ou encore le « Polonais » , Zaclis sera aussi sacré trois fois champion du Brésil de tennis de table. Voilà ce qui s’appelle une intégration réussie.

Anderson Williams Waterman (Angleterre)

Employé d’une compagnie maritime basée à Rio De Janeiro, Anderson Williams Waterman intègre, comme tout bon sportsman de l’époque, l’équipe de la bourgeoisie de la ville : Fluminense. Entre 1906 et 1909, Flu devient le premier tricampeão de l’histoire du championnat carioca, ce qui permet au gardien de but anglais de rentrer à jamais dans la mémoire collective des torcedores. Son nom est ainsi le premier à être gravé dans le mur qui sert de hall of fame au siège du club. Un putain d’honneur pour celui qui restera à jamais comme le premier gardien de but de l’histoire du football brésilien à avoir marqué un but. Le 5 juillet 1908, Waterman exécute un tir au but dans une cage vide après que les joueurs de Riachuelo ont décidé d’abandonner le terrain pour protester contre l’arbitre du match. Non, Rogério Ceni n’a rien inventé.

Henry Welfare (Angleterre)

Avant de traverser l’Atlantique, Henry Welfare fut l’une des premières figures des Reds de Liverpool. En débarquant au Brésil, l’Anglais pensait faire fortune dans l’industrie navale… Loupé. Lorsqu’il débarque à Rio de Janeiro, Welfare a 25 ans et découvre que le football est en plein essor. En 1913, il intègre Fluminense et contribue même au perfectionnement de la technique des locaux. Un Anglais qui apprend aux Brésiliens à taquiner le cuir ? C’est ça. Welfare est ainsi reconnu comme l’importateur de la tabelinha (une-deux très rapide) au Brésil, celle-là même que Pelé et Coutinho rendront célèbre sous le maillot de Santos dans les sixties. Outre son apport technique au futebol brésilien, Welfare fut aussi et surtout un redoutable chasseur de but, marquant la bagatelle de 163 buts en 166 matchs sous le maillot de Flu. Aujourd’hui encore, il détient quelques records qui ne risquent pas de tomber de sitôt : celui du meilleur buteur du Clássico Vovô (Fluminense-Botafogo) avec 17 buts en 20 matchs et celui du meilleur buteur de Fluminense en un seul match (6 buts contre Bangu en 1917). Après avoir raccroché ses crampons, Welfare devient un temps entraîneur du Vasco de Gama, avant de finalement abandonner le football pour les affaires.

Jacinto João (Portugal)

Il partageait la même date d’anniversaire qu’Eusébio et était lui aussi issu des anciennes colonies portugaises. Né à Luanda en 44, Jacinto João est rapidement repéré par des dirigeants du Vitoria Setubal. Il y passera 14 longues saisons, rejetant à maintes reprises les offres de la sainte trinité footballistique portugaise : Benfica, Sporting et Porto. International portugais à 10 reprises, Jacinto João est sans doute passé à coté d’une grande carrière internationale à cause de sa fidélité au club sadino. Avant de devenir dirigeant et d’avoir droit à une statue à l’entrée du stade Bonfim, Jacinto João tente l’aventure brésilienne et rejoint le club de Portuguesa en 75. Problème : il est complètement carbo. Le Portugais n’a plus de coups de reins, plus de feintes, plus d’envies… Pire : il a la saudade du Portugal et de Vitoria, et ne tarde pas à rentrer au pays. Il quitte finalement le Brésil dans l’indifférence générale sans laisser de grands souvenirs. Pour s’en convaincre, il suffit d’aller voir son Wikipédia : aucune mention n’apparaît sur son expérience outre-Atlantique. Triste.

Jorge Silva (Portugal)

Milieu de terrain anonyme formé au Vitória Guimarães, rien ne prédestinait Jorge Silva à faire carrière à l’étranger. En 96, après une bonne saison sous le maillot de Penafiel, le Lusitanien est contacté par les Anglais de Bradford City. Malgré le fait qu’il fréquente tous les jours Chris Waddle à l’entraînement, l’expérience est un véritable calvaire pour Silva. « Le premier choc que j’ai eu en arrivant en Angleterre, c’était au petit-déjeuner. Le deuxième lors du repas. Et le troisième lors du dîner. Les Anglais mangent et vivent n’importe comment. Je n’étais pas fait pour ce pays. » Bien décidé à quitter Bradley, Silva accepte la première proposition venue. Ce sera celle de Bahia et de son président Antonio Pithon, propriétaire de 13 salles de cinéma au Brésil. Le départ du joueur en AmSud fait l’ouverture du journal télévisé de la RTP. Les médias brésiliens s’emballent également, mais ne tardent pas à ranger leurs micros quand ils s’aperçoivent que le joueur n’a rien d’un foudre de guerre. Après une année de vacance passée sur le banc de touche, Silva rentre au Portugal où son agent lui a trouvé un nouveau contrat avec Manchester City. Le Portugais va alors prendre la décision de sa vie : refuser l’offre anglaise, raccrocher les crampons et se reconvertir dans la coiffure. À 28 ans. Superbe.

Dejan Petković (Serbie)

Considéré comme le meilleur joueur européen (voire étranger) n’ayant jamais évolué au Brésil, le Serbe a quasiment tout gagné au pays du joga bonito. Élu meilleur joueur de l’histoire de Vitória, adulé à Flamengo et au Vasco de Gama, c’est peu dire que Petko a réussi son aventure brésilienne. Falcao a dit de lui qu’il aurait pu être titulaire avec l’Auriverde, et même Zico, éternelle légende de Flamengo, y est allé de son petit compliment pour qualifier le crack des Balkans. C’était en 2010, et Petković venait d’apprendre qu’il n’était pas sélectionné par Radomir Antić pour disputer la Coupe du monde 2010 : « Si la Serbie peut se permettre le luxe de laisser un joueur comme lui à la maison, ça veut dire qu’ils sont clairement favoris pour le titre ! » Maître dans l’art du coup franc et capable d’enchaîner les corners directs comme personne, « Rambo » a plus que tenu la comparaison technique avec ses homologues cariocas. Formé à l’Étoile Rouge de Belgrade avec qui il remporte la C1 contre l’OM, Petko s’était pourtant loupé au Real Madrid, puis au FC Séville. En 97, pour changer d’air, il décide de rejoindre le modeste club de Vitória. Il a alors pour mission de remplacer ni plus ni moins que Bebeto, parti à Botafogo. Il devient rapidement une idole du club. Les grands du pays s’intéressent alors à lui. À Flamengo, son association avec Romario et Savio est létale. Celle avec Adriano un peu moins. Peu importe, Petković enchaîne les clubs (Fluminense, Goiás, Santos, Atlético Mineiro) et les prestations de luxe. Des funks cariocas lui sont dédiés, les torcidas chantent sa gloire, le président Lula veut le remercier en le naturalisant (chose qu’il refuse, Ndlr) et même le ministre des affaires étrangères serbe s’en mêle en le nommant comme consul honoraire serbe au Brésil. Pas mal pour le meilleur ambassadeur du football européen au Brésil.

Miodrag Anđelković (Serbie)

Il y a ceux qui ont un plan de carrière précis et ceux qui ont la bougeotte : l’attaquant serbe fait assurément partie de la deuxième catégorie. Il a joué au football sur 4 continents, dans plus de 17 pays différents. Résultat : 23 clubs et 53 buts inscrits en compétition officielle en plus de 15 ans de carrière. De deux choses l’une : soit ce mec avait un excellent agent, soit c’est le plus grand illusionniste que la terre ait connue depuis la mort d’Houdini. Quoi qu’il en soit, dans son odyssée, le Serbe a aussi connu le Brésil. D’abord sous le maillot de Fluminense, puis sous celui de Coritiba. Évidemment, « Andjel » , comme il était surnommé au pays des plumes dans le cul, n’a brillé dans aucun des deux clubs. Surprenant ? Bah non.

Mariusz Piekarski (Pologne)

Le milieu de terrain polonais est repéré en sélection olympique par l’agent uruguayen Juan Figer. En 96, Piekarski et son collègue Krzysztof Nowak s’envolent alors pour Coritiba afin d’évoluer sous les couleurs de l’Atlético Paranaense. Les deux premiers Polonais de l’histoire du championnat brésilien font office d’attraction aux yeux des supporters et journalistes du coin. Kelly Vieira, élue Miss Monde en 95 et devenue journaliste pour Rede Globo, fait alors la rencontre de celui qui deviendra quelques mois plus tard son mari et le père de son premier enfant. Entre elle et Piekarski, c’est l’amour fou. La jeune femme claque tout pour suivre Piekarski qui, malgré une saison un peu décevante à Curitiba, est transféré à Flamengo, puis à Mogi Mirim. En 98, Piekarski décide de mettre fin à son aventure brésilienne et rejoint le Sporting Club Bastia. Sans sa femme. Il ne la reverra jamais. Et pour cause : Piekarski a recollé les morceaux avec la femme polonaise qu’il avait quitté, sans divorcer, au moment de partir pour le Brésil. Résultat : en 2003, le joueur est accusé de bigamie par un tribunal de Cracovie. Le Brésil, pays de football, mais aussi de telenovelas…

Marco Osio (Italie)

La fin du foot à papa et le début du foot 2.0. Voilà en substance ce qu’a connu l’ancien attaquant de Parme. Osio, surnommé « Il Sindaco » , a tout connu avec le club d’Émilie-Romagne, qu’il a lui-même catapulté en Serie A grâce à un but contre la Reggina. L’attaquant aux cheveux longs a marqué contre le Naples de Maradona, mais a aussi participé à l’avènement d’un club devenu une référence du calcio grâce au soutien de la Parmalat. Justement. Pour devenir un grand d’Italie, Osio ne faisait pas l’affaire. Les dirigeants de Parme décident alors de lui offrir une belle porte de sortie en rejoignant un autre club sous le joug de la Parmalat : Palmeiras. À l’été 95, Osio devient alors le premier joueur italien à porter le maillot d’un club brésilien. Léger problème : Osio atterrit dans la meilleure équipe de l’histoire du championnat paulista (Palmeiras est champion en remportant 83 points sur 90 et en marquant la bagatelle de 102 buts en 30 matchs. Fou !) Ses compagnons s’appellent Rivaldo, Flávio Conceição, Cafu, Djalminha, et son coach Vanderlei Luxemburgo n’est pas vraiment séduit par son style plutôt pataud. Au final, l’Italien marquera un seul petit but, et rentrera l’année suivante au pays avec un titre de champion paulista en poche. Et l’amère sensation que le football qu’il a connu jadis va désormais beaucoup trop vite pour lui.

Damlaba Mendy (France)

Formé en Floride au sein de l’IMG Academy, le Franco-Sénégalais de Trappes fait ses premiers pas dans le football professionnel tardivement. Il a ainsi 22 ans lorsqu’il rejoint le Grêmio Porto Alegre d’un certain Ronaldinho. Premier Français de l’histoire à évoluer sous les couleurs d’un club brésilien, Mendy dispute seulement trois matchs officiels avec Grêmio avant de rejoindre Troyes, dans l’Aube, et la joie de vivre d’Alain Perrin. Ses débuts sont encourageants, puis il disparaît sans donner de nouvelles. On évoque alors un kidnapping. En réalité, le joueur était au Sénégal, pour accompagner son père sur son lit de mort. Quand il revient au club, Mendy chauffe le banc de touche. En 2003, le joueur quitte l’Aube, ses magasins d’usine et la D2 sans qu’on ne sache vraiment ce qu’il est devenu depuis…

Tous les Européens ayant évolué dans un club brésilien :

Serbes : Osmanović (Vitória), Vlad Petković (Botafogo), Tandić (Londrina, Fabril et Uberaba), Nikola (Fluminense et Coritiba) Allemands : Mohrdieck (Grêmio), Schuback (Grêmio), Hermann Friese (Germânia)Hongrois : José (São Paulo, 1957)Néérlandais : Du Martter (Paraná), Seedorf (Botafogo) Espagnols : Rubén Mariño (Galícia), Norberto Sanches (Bangu), González (Palmeiras et Galícia), Joaquim Martin (Britânia), Elias Martin (Britânia)Anglais : Sidney Pullen (Fluminense), Hardy (São Raimundo), Alex Hutchinson (Americano), Bargamaschini (Sport), John Tibbitz (Juventude et Cruzeiro), Archibal French (Bangu et Fluminense), Bill Hopkins (Scottish Wanderers et AA São Bento)Croates : Ratovancić (Operário) et Jovićević (Guarani)Bosniaque : Pintul (Atlético Paranaense)Italien : Spagnulo (Vitória Bahia)Français : Jean-Pierre Bechir Junior (Bangu), Khaled Farid Kharroubi (Bangu), Gijo (Bangu)Portugais : Paulo Madeira (Fluminense), Peres (Vasco de Gama), Lito (Vasco de Gama), Rui Carneiro (Vitória Bahia), Jorge Silva (Vitória Bahia), Rogério (Botafogo), José Dominguez (Vasco de Gama)

P.S : Les naturalisés type Deco et Liedson ne font partie de cette liste.

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