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Top 1000 : les meilleurs joueurs du championnat de France (170-161)

Par Quentin Ballue, Jérémie Baron, Adel Bentaha, Raphaël Brosse, Clément Gavard et Steven Oliveira, avec toute la rédaction de SF

Quel est le meilleur joueur de l'histoire du championnat de France depuis sa création en 1932 jusqu'à 2022 ? Statistiques, palmarès, trajectoires personnelles, classe, dégaine, empreinte laissée : autant de critères qui nous ont permis d'établir notre classement très subjectif des mille joueurs les plus marquants de Division 1 et de Ligue 1. Le credo d'un feuilleton qui va durer précisément 100 jours.

#170 - Frédéric Da Rocha

Frédéric Da Rocha
Nantes (1995-2009), US Boulogne (2009-2010)

Pour ceux qui sont trop jeunes pour avoir connu le regretté Henri Michel et trop sentimentaux pour avoir digéré le départ de Mickaël Landreau en 2006, l’homme qui incarne le plus le FCN s’appelle sans doute Frédéric Da Rocha. Un homme qui a passé (presque) toute sa carrière en jaune et vert, à une époque où, désormais à Nantes, cela veut vraiment dire quelque chose en termes d’amour du maillot et de fidélité : car si le Franco-Portugais a démarré chez les Canaris – avec ses potes Landreau et Nicolas Savinaud – dans une période faste, entre les titres de champions (Da Roch’ fut de celui de 2001), les succès en Coupe de France et les épopées européennes, il a surtout traversé les turbulences, ensuite, sans jamais perdre la foi, ne quittant le club qu’en 2009 après une deuxième descente en Ligue 2. « En 20 ans, j’ai tout vécu au FC Nantes, certainement le plus beau au début, et le moins bien ensuite, nous confessait-il pour le vingtième anniversaire de la formidable saison 2000-2001. Je me rappelle un après-match, sur la table de massage. Je fais à Daguillon, notre kiné historique : « Putain, je crois que sur le onze de départ, je suis le seul issu du centre de formation. Et j’ai 34 ans. Il y a un truc qui ne va pas Dag’, là. Non ? » »

Une chose est sure, sa dalle n’a jamais diminué et Marcel Desailly pourra en témoigner : « À seize ans, je vois pour la première fois Suaudeau dans un couloir de la Jone’, raconte FDR. Je tremble de partout et il me sort : « T’aimes quoi toi, dans le foot ? » « Bah jouer, faire des passes, marquer… » « T’as rien compris ! Faut aimer courir ! » C’est vrai que pour exister à Nantes, fallait aimer ça. En moins de 17, on jouait des petits matchs contre les pros, pour apprendre. Je me coltinais Desailly parfois. Il m’avait fait : « Mais t’en as pas marre de courir, toi ? » » Après un maintien miraculeux accroché à la Beaujoire face au FC Metz le 28 mai 2005 et fêté comme un titre, Da Rocha avait osé cette formule devenue culte : « Les légendes ne meurent jamais ! » Et comment lui donner tort ?

#169 - Ulrich Ramé

Ulrich Ramé
Angers (1993-1997), Bordeaux (1997-2011)

Ulrich Ramé est né à Nantes, mais c’est pourtant chez le rival bordelais qu’il a marqué l’histoire du football français. Indissociable des Girondins de Bordeaux et de la D1 (puis Ligue 1), des années 2000, le gardien de but est parvenu à hisser son nom au sommet de l’Hexagone.

Avant d’arriver en Gironde, le portier s’est d’abord aiguisé les mains à Angers. Lancé en deuxième division, en 1993, il est du groupe qui retrouve l’élite la même année, sans pour autant s’imposer dans l’esprit d’Hervé Gauthier, Alain de Martigny ou André Guesdon. Une éclosion sur le tard, pour celui qui doit attendre ses 25 ans et la saison 95-96 pour gagner ses gallons de titulaire. Suffisant pour séduire Guy Stéphan, qui le convainc de suppléer l’inconstant et vétéran Stanley Menzo, en bout de course.

À l’été 1997, Ramé s’embarque donc dans l’aventure de sa vie, qui le verra enquiller 525 rencontres en marine et blanc, jusqu’en 2011. Les parades réflexe, le plus souvent sur la ligne, deviennent une spécialité, lui, le longiligne. De ces quatorze ans de vie commune, jailliront donc deux titres de champion de France, avec la manière, en 1999 et 2009, mais également des distinctions individuelles évocatrices : élu meilleur gardien du championnat en 99 puis 2002 (en dépit de la sixième place des Girondins au classement). Devenu capitaine de son écurie de (presque)toujours, il s’imposera également sur le plan international, au détour de douze capes en Bleu. Tout cela avec la présence Fabien Barthez, Lionel Letizi, Grégory Coupet ou Mickaël Landreau. Capitaine d’un navire qui a souvent tangué, Ulrich Ramé aura donc surtout été l’artisan des plus belles éclaircies bordelaises :le symbole de la côte atlantique.

#168 - Alberto Muro

Alberto Muro
FC Sochaux-Montbéliard (1951-1956), Nice (1956-1959), FC Nancy (1960-1962)

Attaquant extrêmement polyvalent avec sa gueule à la Jean Rochefort, l’Argentin Muro est arrivé à Sochaux à 23 ans en provenance d’Uruguay, et n’a plus jamais quitté l’Hexagone. L’artiste inscrira pas moins de 128 pions en 269 matchs de D1, entre le Doubs (18 buts en championnat en 1952-1953 et une place de vice-champion), la Côte d’Azur (21 caramels rien qu’en D1, en 1957-1858) et la Lorraine (quatrième place du classement en 1961-1962), avec surtout un titre de champion avec le Gym en 1958-1959. Et après avoir réalisé l’intégralité de sa carrière de dirigeant en France, il s’éteindra à La Colle-sur-Loup, non loin de Nice, en janvier 1997 à l’âge de 68 ans.

#167 - Michel Stievenard

Michel Stievenard
Lens (1954-1961), Angers (1961-1968)

Vous n’avez jamais vu le moindre match de Michel Stievenard et souhaitez savoir quelles étaient ses qualités sur le terrain ? Voici la réponse de l’intéressé : « J’étais très rapide comme Kylian Mbappé et j’avais un très bon jeu de tête, comme Olivier Giroud. C’était mon point fort et j’étais aussi costaud. » C’est justement grâce à son physique que cet ailier gauche ou attaquant de pointe s’est distingué, lui qui a touché à d’autres sports pendant ses jeunes années. « Avant d’aller au RC Lens, j’avais fait l’École normale car je voulais être prof’ de gym, détaille-t-il. J’étais bon dans tous les sports et celui que je pratiquais le moins au début, c’était le foot. J’ai fait du basket, du hand dans les buts, de l’athlétisme et physiquement, j’étais au-dessus. » La carrière du Nordiste en D1 s’est construite en deux temps : Lens d’abord, Angers ensuite. Deux clubs où il a enchaîné les saisons pleines et noirci les feuilles de statistiques (106 buts en 405 matchs de championnat). Le joueur d’1,81 m a aussi pointé le bout de son nez en équipe de France, avec laquelle il a participé à l’Euro 1960. Devancé dans la hiérarchie par les légendes Just Fontaine et Raymond Kopa, nul doute qu’il aurait comptabilisé plus de deux sélections si les remplacements en cours de rencontre avaient été autorisés à l’époque.

#166 - Oskar Rohr

Oskar Rohr
Strasbourg (1934-1939)

Selon la légende familiale, c’est dans le coffre de la voiture d’un dirigeant du club qu’Oskar Rohr rallie Strasbourg pour y intégrer l’effectif, en septembre 1934. Il faut dire que l’ancien Munichois, qui devient alors le premier joueur allemand professionnel de l’histoire, est vu comme un traître de l’autre côté du Rhin, où les footballeurs ne peuvent être qu’amateurs. « Mais lui avait décidé de faire sa carrière dans le football » , affirme son petit-neveu Gernot dans le So Foot n°161. En Alsace, « Ossi » a la belle vie, entre ses virées au volant de sa Citroën Traction décapotable et ses soirées au bar, sans que cela n’affecte son rendement sur le terrain. 20 buts inscrits (en 22 matchs) pour sa première saison strasbourgeoise, 28 (en autant de rencontres) la suivante… et 30 (en 29 apparitions) en 1936-37, titre de meilleur buteur de D1 à la clé. Fort de cette remarquable performance, le natif de Mannheim a le privilège de rencontrer le président de la République, Albert Lebrun. « Mes chaussures sont certes plus grandes, monsieur Rohr. Mais dans les vôtres, il y a plus de dynamite ! » , lui déclare l’homme d’État, notamment connu pour avoir de très grands pieds.

Évidemment, Oskar est ensuite emporté dans le tourbillon de la Seconde Guerre mondiale. Il s’engage dans la Légion étrangère, est démobilisé, déporté au camp de Kislau, puis envoyé sur le front de l’Est, où il est blessé à une épaule. « Le problème, c’est qu’il n’y avait plus d’avion pour le ramener, hormis un, rejoue son petit-neveu. Il était au pied de l’appareil, au milieu d’autres blessés, mais l’avion était plein. Il n’avait aucun moyen de faire partie des passagers. Par chance, le pilote, qui était un Bavarois fan du Bayern Munich, l’a reconnu et lui a dit : « Mais vous êtes Ossi Rohr ? Oui ? Alors vous allez monter dans mon avion, quoi qu’il arrive. » Clairement, le football lui a sauvé la vie ce jour-là. »

#165 - Thierry Tusseau

Thierry Tusseau
Nantes (1975-1983), Bordeaux (1983-1986) et Matra Racing (1986-1988)

Cinq fois champion de France (avec le FC Nantes, puis les Girondins), trois fois vice-champion, vainqueur de deux Coupes de France, champion d’Europe 1984 avec les Bleus, demi-finaliste de C1 et de C2 : le polyvalent Thierry Tusseau (milieu défensif, arrière gauche) compte tout simplement l’un des plus beaux palmarès du football français. Et pour ça, Thierry Tusseau a osé quitté Nantes pour Bordeaux en 1983, lui le produit de la formation jaune et vert, à une époque où la rivalité entre les deux équipes est à son comble et où les bastons ne sont pas rares, à Marcel-Saupin comme à Lescure. Avec ce CV, on lui pardonnera aisément son épisode décevant au Racing, en fin de carrière : «  Après coup, le Matra, ce fut un échec, confessera-t-il pour Ouest-France. Je ne m’attendais pas à ce genre de choses. Parce qu’à l’époque Lagardère voulait montrer une grande équipe. Je connaissais pas mal de joueurs, mais ça n’a jamais pris. Je pense que Monsieur Lagardère a pris des grands joueurs mais pas un entraîneur qui pouvait diriger ce genre de joueurs (Silvester Takač). Il a manqué un entraîneur à poigne, qui sache manier des joueurs avec leur ego. Il a été remplacé par Victor Zvunka… C’est dommage parce que ça aurait pu devenir un grand club, il en avait les moyens. » Tusseau, Discover a world of famous fun.

#164 - Jean Djorkaeff

Jean Djorkaeff
Lyon (1957-1966), OM (1966-1970), PSG (1971-1972), Paris FC (1972-1974)

Comment laisser de bons souvenirs à Lyon, Marseille et Paris ? En s’appelant Jean Djorkaeff, par exemple. Avant d’être l’homme des tirages au sort de la Coupe de France, le papa de Youri a surtout été un taulier du championnat de France. Il avait commencé attaquant, il s’est finalement fait une réputation en tant que défenseur. Il y a d’abord eu Lyon, son club de cœur, où il s’est fait un nom en prouvant sa fiabilité et sa régularité, remportant notamment le premier titre de l’histoire de l’OL avec la Coupe de France 1964. Un sacre, puis une place en équipe de France, avec laquelle Tchouki participe à la Coupe du monde 1966 avant de filer à Marseille. Une nouvelle Coupe de France plus tard, il fera partie des pionniers du Paris Saint-Germain, dont il sera le premier joueur professionnel et le premier capitaine. Avant que le bazar en coulisses ne viennent noircir le tableau avec la transformation en Paris FC. « On était bien à Saint-Germain, nous étions chez nous… Quand nous sommes devenus Paris FC, nous sommes devenus du même coup des enfants perdu  » , dira-t-il. C‘est dans cette cacophonie, entre une relégation du PFC et une promotion du PSG, que Jean Djorkaeff mettra un terme à sa carrière. Sans savoir que son fiston revêtirait la tunique parisienne vingt ans plus tard.

#163 - Serge Masnaghetti

Serge Masnaghetti
Valenciennes (1959-61 et 1962-66)

Delio Onnis, Thadée Cisowski, Kylian Mbappé, Carlos Bianchi, Pedro Miguel Pauleta, Zlatan Ibrahimovic, Mamadou Samassa. Le championnat de France en a vu passer des attaquants de grand talent capables d’envoyer buts sur buts. Pourtant aucun n’a réussi à faire ce qu’a réalisé Serge Masnaghetti. Celui qui a fait toute sa carrière à Valenciennes a tout simplement planté au moins un but – 17 exactement durant 13 journées consécutives en championnat du 16 décembre 1962 au 21 avril 1963. Une série record qui n’a jamais été battue depuis. Il faut dire que cette saison-là, le meilleur buteur de l’histoire du VAFC marchait sur l’eau puisqu’il a terminé la saison avec 35 pions en championnat. Pas mal pour un homme qui évoluait en Division 2 la saison précédente puisqu’il n’a pas quitté son club de toujours malgré la descente. Pied gauche, pied droit, de la tête, en finesse, en puissance, c’est bien simple Serge Masnaghetti savait tout faire pour envoyer le cuir au fond des filets. Malheureusement, la carrière du goleador devenu par la suite chauffeur de taxi à…Valenciennes s’est arrêté plus tôt que prévu en raison d’une déchirure au cœur. C’est donc depuis son canapé qu’il a vu Sokrat Mojsov égaler en 1971 son record du triplé le plus rapide du championnat de France (7 minutes) puis Matt Moussilou le dépasser en 2005. Il peut toujours se consoler avec le fait qu’il soit 718 places devant MM dans notre classement.

#162 - Claude Puel

Claude Puel
Monaco (1978-1996)

Arrivé sur le Rocher en 1977 en provenance de Castres, le milieu de terrain y est resté deux décennies. Le temps de disputer 601 matchs, dont 486 en D1, et de devenir le deuxième joueur le plus capé de l’histoire de l’AS Monaco, derrière Jean-Luc Ettori. Dans l’ombre, malgré tout. « J’étais un joueur de devoir. Mais il en faut, pour faire briller les autres » , expliquait l’intéressé sur le site du Gym. «  Un joueur comme Claude, c’est de l’or  » , dixit Arsène Wenger himself. «  Claude, il voulait tout le temps gagner, que ce soit dans les jeux à l’entraînement, les ateliers, les séances, les matchs amicaux, glissait Marcel Dib à So Foot. Il prenait la parole dans le vestiaire, il criait souvent. Il ne fallait pas trop l’emmerder sur le terrain. (…) Il était juste, rigoureux, même dans la vie ! Il ne débordait pas, dans tout ce qu’il faisait. Il était sec, avait une hygiène de vie hors du commun. Il faisait gaffe à ce qu’il bouffait. Je ne l’ai vu boire que du vin rouge, du Bordeaux, alors que nous, on ne faisait pas trop attention (rires). C’est Wenger qui a amené son savoir et on a tous pris le pli, mais Claude l’avait déjà fait avant.  » Un joueur exemplaire et déterminant dans la conquête du titre de champion de France en 1988. Le juste milieu.

#161 - Mathieu Valbuena

Mathieu Valbuena
OM (2006-2014), OL (2015-2017)

Passé directement du National à la Ligue 1 en 2006, Mathieu Valbuena a dû ronger son frein pendant un an avec Albert Emon, avant d’exploser sous les ordres d’Eric Gerets. Petit Vélo passe sur le grand plateau et s’impose comme le détonateur marseillais, au point d’être nommé dans l’équipe-type du championnat en 2008 au bout de sa première saison pleine. Moins utilisé par Didier Deschamps, le meneur de jeu se rebiffe et réussit à inverser la tendance. Le coach phocéen réinstalle son meneur de jeu dans le onze après une défaite à Montpellier qui laisse l’OM à 12 points du leader bordelais. Résultat ? L’OM reste invaincu pendant 15 matchs, refait son retard et va chercher le titre 17 ans après. Le maestro prend encore plus d’épaisseur en 2011-2012 en sortant une impressionnante saison à 5 buts et 13 passes décisives. La couronne de meilleur passeur lui échappe au profit d’Eden Hazard, mais Valbuena se rattrape en se l’offrant l’année suivante avec 12 offrandes – qui le placent une nouvelle fois dans l’équipe-type du championnat. Au moment de son départ en 2014, son mythique numéro 28 est temporairement retiré par Vincent Labrune. « C’est un joueur emblématique de l’OM, qui a marqué le club sur toute cette première partie du 21e siècle, lors d’un bail très très long – l’un des plus longs de l’histoire du club. Il a donné une très grande preuve d’amour à ce club » , insistait le président olympien à l’époque.

De retour en Ligue 1 en 2015, mais désormais à l’OL, Valbuena se rend encore indispensable, contre vents et marées. En 2016-2017, il est, derrière Alexandre Lacazette, le Lyonnais le plus décisif en championnat avec huit buts et cinq passes dé. « À mon arrivée, les Bad Gones ont été clairs avec moi et m’ont dit qu’ils n’étaient pas favorables à ma venue. Et à la fin, quand je fais mon dernier match contre Nice, j’ai reçu la standing ovation du Parc OL et plusieurs groupes de supporters des Bad Gones m’ont dit qu’ils ne voulaient pas que je parte. Pour moi, c’était une grande victoire de pouvoir retourner cette situation » , confiait-il à So Foot. « Un bonhomme exceptionnel, louait Jean-Michel Aulas après que son joueur ait envoyé une merveille de frappe enroulée au fond des filets contre Nancy, malgré une blessure aux ischios. Je sais qu’il avait mal, et il est allé marquer alors que la situation était vraiment bloquée. Mathieu, c’est quelqu’un de fantastique. Il démontre sa grande force de caractère et son talent inimaginable. » Une carrière à fermer des bouches.

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