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Top 100 : Les entraîneurs (60 à 51)

Par la rédaction de So Foot
13 minutes
Top 100 : Les entraîneurs (60 à 51)

Qu'il soit tacticien, meneur d'hommes, diplomate ou fou à lier ; en costard, en survet', moustachu ou mal rasé ; qu'il ait la clope au bec ou la touillette sur le bout de la langue ; qu'il fut un grand joueur ou un immense tocard ; qu'il soit belge ou même nantais, l'entraîneur sera toujours un peu sur le banc des accusés, le premier fusible à sauter en cas de panne. Mais c'est aussi de lui que vient la lumière, la vraie. La preuve, avec 100 illuminés.

60. Jimmy Hogan

Ce fils d’Irlandais aurait dû faire carrière dans les ordres. Il préfère grenouiller comme attaquant de seconde zone à Burnley, Bolton, Fulham et Swindon. Même El Hadji Diouf n’aurait pas voulu d’un tel parcours. C’est dire s’il devient urgent de trouver sa vocation. Elle finit par arriver lors d’une tournée aux Pays-Bas. Alors que Burnley vient tout juste de rosser le FC Dordrecht, Hogan promet à ses adversaires du jour de revenir très vite « pour vous apprendre à jouer » . En vrai, Jimmy veut mettre le continent à l’épreuve d’une intuition : plutôt que de récompenser l’équipe qui court le plus longtemps, pourquoi le jeu n’appartiendrait pas plutôt à ceux maîtrisent le ballon ? Le football total tient son premier apôtre et les Hollandais (déjà) sont ses premiers disciples. L’Europe ne tarde pas à le solliciter. D’abord Meisl et sa Wunderteam autrichienne, la sélection suisse, qu’il mène en finale d’un tournoi olympique (1924) et la Metodo de Pozzo, qu’il inspire. Autant de prémices d’un chef-d’œuvre annoncé, celui de 1953, quand Puskás et les siens viennent réciter la leçon et s’incliner devant Hogan avec leur entraîneur Gusztav Sebes : « Nous jouons au football comme Hogan nous a appris à le faire. Quand on écrira la grande histoire du football hongrois, nous inscrirons son nom en lettres d’or. » Total football is coming home.

59. Miroslav Blažević

Une carrière de joueur que l’on peut qualifier de moyenne, sillonnée entre trois clubs de Zagreb, le Dinamo, le Lokomotiv et le NK. Puis le HNK Rijeka, le FK Sarajevo et le FC Sion. C’est là, en Suisse et en 1968, que Miroslav débute sa longue carrière d’entraîneur. Au FC Vevez. Puis à Sion, de 1971 à 1976. Les années et les destinations s’enchaînent. Lausanne Sport, de 76 à 79. La sélection suisse, un an. Un an également à Rijeka, puis trois de retour au Dinamo Zagreb, deux aux Grasshopper, encore deux au Dinamo. 1988-1991, Blažević est à Nantes, pour succéder à Suaudeau. 7e, 7e et 15e, il sera remercié et remplacé par Suaudeau lui-même, sans avoir laissé en Loire-Atlantique un souvenir impérissable, ni tout à fait propre ; il fut mis en examen dans l’affaire des financements de l’OM, et aurait été contacté pour remettre du fric marseillais à ses joueurs s’ils battaient Bordeaux. Puis, c’est le PAOK et à nouveau le Dinamo Zagreb, de 92 à 94. Et là, la sélection croate. Qu’il commence par qualifier pour l’Euro 96, en sortant de son groupe devant l’Italie, puis pour les quarts de finale, malheureusement perdus contre l’Allemagne 2-1. Autour d’Asanović, Boban, Suker, Jarni et Stanić, son 352 fait danser le gonfle durant la Coupe du monde 1998. En quarts, ils prennent leur revanche sur l’Allemagne, en leur collant un 3-0 bien senti, puis c’est la France. Et malgré la qualité de leur jeu, les Croates ne parviendront pas à sauver le football français du sombre destin qui l’attend. Si seulement, au moment de la blessure de Boban, Blažević avait choisi de faire entrer, au lieu de Silvio Maric, son meilleur orfèvre, Robert Prosinečki, la face du football français en eut été changée. Miroslav promènera ensuite ses regrets un peu partout, un peu n’importe comment, entre l’Iran, la Chine, tout plein de clubs de ces deux pays, la Croatie et la Suisse, et la sélection d’un troisième, la Bosnie-Herzegovine (qu’il a failli qualifier pour la Coupe du monde 2010, à un barrage contre les Portos près). Aujourd’hui, celui qui un jour éclata sa nouvelle Rolex devant ses joueurs en leur demandant d’en faire de même avec leurs adversaires, est retourné entraîner le NK Zagreb, dont les joueurs sont justement surnommés les poètes…

58. Michel Hidalgo

L’image d’abord… Michel Hidalgo en larmes hissé sur les épaules de joueurs de l’équipe de France : en novembre 77, au Parc, la France vient de se qualifier pour le Mundial argentin 1978 en battant la Bulgarie (3-1). En succédant à son mentor admiré Stefan Kovács en mars 1976, Hidalgo réintègre la France dans l’élite du foot mondial. Le drame injuste ensuite… Novembre 1981, à la veille du match décisif contre les Pays-Bas, toujours au Parc, et qualificatif pour le Mundial espagnol 1982 : Hidalgo est seul, rejeté de tous (médias et supporters). Si Les Bleus échouent à se qualifier le lendemain, il sautera comme un chien galeux. Il le sait, trouve ça immonde. C’est que la Coupe du monde 78 a été effacée par la non participation française à l’Euro 80 en Italie. Heureusement, un autre Michel enverra les Bleus en Espagne, pays d’origine de papa Hidalgo, qui a fui le franquisme dans les années 30. Les fondamentaux, maintenant… Michel Hidalgo était attaquant (ailier droit, parfois à gauche) : tout est dit. Le gars pensait « attaque » , « offensive » , « buts » (il en marquait pas mal). Et la théorie sur le jeu, la tactique, le style ? Avec quels profs a-t-il appris ? Il a appris avec du lourd. Du très, très lourd. Après Le Havre (1952-54), Michel a joué à Reims (1954-57), puis à Monaco (1957-66) : le grand Reims coaché par Albert Batteux et le grand Monaco coaché par Lucien Leduc. La crème des techniciens français, ceux qui ont défini le style « à la française » (le Nantais José Arribas complétera plus tard cette troïka du « beau jeu » franco-français). Hidalgo apprendra aussi beaucoup de Kovács, on le répète. Voilà : bardé de titres avec Reims (finaliste et buteur de la première C1 perdue en 56 contre le Real 3-4) et avec Monaco, il avait aussi acquis la culture de la gagne et la soif de palmarès (Hidalgo n’était donc pas vraiment un « romantique » du foot). Le reste ?… Ben, son coup de génie : le carré magique de 1982. Le quatuor Platini-Giresse-Tigana-Genghini, soit quatre leaders de jeu (plutôt que purs « meneurs de jeu » , ou purs n°10, Platoche excepté) basé sur un 4-4-2 un peu bâtard qui vire sur un 4-2-3-1 plus actuel. Quatre milieux créateurs : un truc insensé à l’époque, devenu évident ensuite et jusqu’aujourd’hui avec le Barça : pas besoin de défendre derrière si on a la maîtrise du ballon dans le camp adverse. Attaquer, c’est déjà défendre… Contre la RFA à Séville, ça a marché à 100 %, question possession, domination territoriale et efficacité (trois buts, quand même !). Seule l’inexpérience au plus haut niveau de la compète, largement possédée par les Allemands, a eu raison des Bleus, comme l’expliquera simplement Platini par la suite. Alors… Hidalgo ou Jacquet ? Platini ou Zidane ? À vous de voir… Ceci dit, revisionnez à l’occasion ce RFA-France 82. L’évidence va vous exploser à la figure : aucune équipe de France n’a jamais atteint, ni avant ni après, cette qualité de jeu. Et y a zéro nostalgie dans le coke. Tactiquement, c’est inouï (foot total avec parfois Trésor et Bossis en position d’attaquants !) et surtout techniquement, c’est artistique (tout le monde joue en exter, à une touche, la tête haute). En langue espagnole, un hidalgo, c’est un Grand d’Espagne, un seigneur. Vous pigez, maintenant ?

57. José Pékerman

José Pékerman est un homme spécial. De ceux qui mettent leur carrière entre parenthèses pour réfléchir, lire, penser le football. De ceux aussi qui aiment regarder trois matchs de foot en même temps : un sur Internet et deux à la télé. Débarqué de presque nulle part à la tête des Espoirs argentins, il remet le toque et le beau jeu au centre du projet national, fait organiser in extremis un match amical bidon pour empêcher l’Espagne de mettre la main sur un certain Léo Messi et arrive tranquillement à la tête de la sélection albiceleste. La suite de l’histoire de José Pékerman sent bon le gâchis et les illusions perdues. Alors que l’Argentine joue le plus beau football de ses quinze dernières années, consacré par le fameux deuxième but du 6-0 infligé à la Serbie lors de la Coupe du monde 2006, l’équipe de José se crashe aux penaltys face à l’Allemagne. La presse l’accuse de ne pas avoir fait entrer Messi alors qu’au fond de lui, Pékerman sait qu’il n’aurait jamais dû sortir Riquelme. Pour se punir, il entraîne au Mexique, refuse toute interview et voit un peu de football. Environ 3000 matchs. Après trois ans sans football, José s’est offert un nouveau jouet pour la prochaine Coupe du monde : la Colombie. L’occasion de montrer que le Spécial One, c’est lui.

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56. Bela Guttman

« On m’a viré alors que je ne suis ni un criminel, ni un homosexuel » . Arrogant, grande gueule, obsédé par l’argent mais irrémédiablement génial, Bela Guttmann n’est pas l’une des idoles de José Mourinho par hasard. Le Portugais connaît son histoire du foot et sait ce qu’elle doit à ce Hongrois dont la vie tient d’un roman du XXe siècle. Sioniste convaincu, Guttmann a connu la montée de l’antisémitisme dans son pays, l’exil à New York, la ruine après la crash de 1929, le retour au pays pour entraîner le Honved de Puskás, l’insurrection de 1956, l’exil de nouveau vers le Brésil et la gloire avec Benfica. Précurseur du 4-2-4, il met fin à l’hégémonie du Real Madrid en Coupe d’Europe et remporte la C1 avec en 1961 et 1962 avec un certain Eusébio. « Tu m’en mets trois, on verra bien après » , lui glisse-t-il avant chaque match. Trop gourmand financièrement, le Hongrois est congédié par le club qu’il a porté au sommet de l’Europe. « Même un siècle après mon départ, Benfica n’aura toujours pas gagné une autre Coupe d’Europe. » La malédiction tient toujours, sa légende aussi.

55. Manuel José

Si vous allez au Portugal et que vous demandez à un local qui est Manuel José, il vous dira que c’est un bon entraîneur, mais sans plus. Peut-être même qu’il ne saura pas répondre à la question. De fait, Manuel José n’a pas vraiment marqué les esprits dans son pays natal. Son truc, c’est l’Afrique. L’Égypte, plus précisément. Le technicien portugais a tout gagné avec Al-Ahly : quatre Ligues des champions africaines, autant de Supercoupes d’Afrique et un nombre incalculable de titres nationaux. Sur le plan comptable, personne ne fait mieux que lui au Portugal. Pas même Mourinho. Son brillant parcours a valu à Manuel José d’être décoré par Cavaco Silva et Hosni Moubarak, avec lequel il entretenait de bonnes relations. Aujourd’hui, le héros d’Al-Ahly n’entraîne plus en Égypte, marqué à vie par la tragédie de Port-Saïd où il pensait « qu’il allait mourir » et finir comme « ces cadavres qui s’empilaient les uns sur les autres » à cause des « soldats et policiers qui avaient pris la fuite » . Pourtant, le technicien lusitanien a essayé d’oublier. Après un exil de deux semaines en Algarve, il est retourné en Égypte pour disputer la Ligue des champions, avant de jeter l’éponge et de se barrer en Iran (Persépolis), résidence secondaire des entraîneurs portugais – Carlos Queiroz est sélectionneur de l’équipe nationale et Toni entraîne le Tractor.

54. Robert Herbin

N’en déplaise à Guy, Robert fut le premier à prouver que les Roux pouvaient être de grands entraîneurs. Sous l’incroyable épaisseur de cheveux couleur feu se cachait en effet un génie. Car un mec qui, après avoir entraîné Saint-Étienne pendant onze ans, se fait recruter par l’OL, avant de finalement revenir sur le banc de Geoffroy-Guichard, chez des Verts qui l’accueillent à bras ouverts, ne peut être qu’un génie. Joueur, Herbin fut l’un des piliers de la première version dorée de l’ASSE, avec six titres de champion et trois Coupes de France. Entraîneur dès l’âge de 33 ans, il a la lourde tâche de succéder à Albert Batteux. Mission réussie : il glane quatre titre nationaux et trois nouvelles Coupes de France. Sans oublier une finale européenne face au Bayern. Depuis, Robert a un peu moins de cheveux, et refuse les coupes au carré pour mettre en valeur sa toison rousse.

53. Rado Antić

1996. Le meilleur millésime de Radomir Antić. Avec une escouade qui pue le talent (Caminero, Pantic, Simeone, Santi, Molina, Penev), Rado braque une Liga et une Coupe du Roi. On appelle ça un doublé. Et comme le Serbe ne fait rien à moitié, il s’adjuge également le prix du meilleur entraîneur de l’année. Une folie. Cette année-là, les Matelassiers s’amusent et envoient du jeu à travers toute la péninsule ibérique. C’est rapide, fluide, efficace et terriblement solide derrière puisque Molina est élu meilleur gardien du championnat. Pendant un an, le club marche sur l’eau. C’est le plus beau coup de l’entraîneur. Sur son CV, c’est la seule ligne qui mérite d’ailleurs le respect. Au-delà de ce formidable coup de génie, Antić a plutôt passé son temps à essuyer les plâtres. Il est le seul mec au monde à avoir posé son fessier sur les bancs du Real, du Barça et de l’Atlético Madrid. Sans jamais être vraiment le premier choix. Dans ce jeu de chaises musicales, on aperçoit l’une des facettes du mec : il ne renonce jamais. Ainsi, il fera deux autres passages à l’Atlético (1999 et 2000), un intérim ridicule au Barça (2003) et deux détours à Oviedo (1992 et 2000). Pour autant, il ne gagne rien. Rien de rien à l’exception du doublé de 1996. Mais un mec façonné par l’école du Partizan (joueur puis entraîneur) ne pouvait pas passer à côté de la sélection nationale. C’est ainsi qu’en 2008, Rado hérite du contrôle de la Serbie avec le Mondial allemand en ligne de mire. Sans réussite puisqu’il termine bon dernier de son groupe derrière le Ghana, l’Allemagne et l’Australie. Depuis, le papy se la coule douce en Chine où il a pris en main la destinée de Shandong Luneng, l’ancien club de Nicolas Ouédec. Pas suffisant pour oublier sa meilleure année. Même dix-huit ans plus tard. Pour en revenir à cette folle année 1995-1996, Antić balance des uppercuts verbaux dans les colonnes d’El Mundo sur Hermann Tertsch, un chroniqueur politique d’El Pais. Dans son envolée lyrique, Antić qualifie Tertsch de « nazi » et l’accuse d’être ouvertement « anti-Serbe » . Forcément, l’entraîneur prend un procès au cul et une condamnation (12 000 euros). Décidément, cette année-là, Rado était injouable.

52. Ottmar Hitzfeld 28 mai 1997, finale de la Ligue des champions entre le Borussia Dortmund et la Juventus Turin. Kalle Riedle a mis un doublé en cinq minutes en 1re mi-temps et le BVB mène tranquille. Seulement voilà, peu après l’heure de jeu, Alessandro del Piero réduit la marque à 2-1 d’une talonnade folle. Ottmar Hitzfeld réfléchit. Il fait sortir Lars Ricken du banc et le fait entrer à la 70e minute. Quelques secondes plus tard, le jeune joueur de 21 ans marque le but décisif (le but du siècle chez les Schwarzgelben) d’un lob splendide sur son premier ballon. Le génie du « General » , c’est ça : être capable d’avoir une influence sur la rencontre à n’importe quel moment. Pas un hasard si la moisson fut bonne avec le Borussia Dortmund (2 titres de champion, 1 C1, la Coupe intercontinentale étant gagnée par Nevio Scala). Forcément, le Bayern viendra le chercher, et Herr Hitzfeld se découvrira un appétit de géant: 5 championnats, 3 Coupes, une C1 de nouveau (et une Coupe intercontinentale). À ce jour, Ottmar Hitzfeld est (avec José Mourinho et Ernst Happel) le seul à avoir gagné deux Ligues des champions avec deux clubs différents. Aujourd’hui sélectionneur de la Suisse, Ottmar Hitzfeld n’a pas dit son dernier mot. En 2014, il faudra compter avec la Nati. Si si.

Vidéo

51. Luis Aragonés Surnommé Zapatones, soit « les grandes bottes » , Luis Aragonés est surtout célèbre pour deux choses. Son aversion de la couleur jaune, qu’il ne peut pas voir en couleur (il aurait ainsi refusé un bouquet du maire de Dortmund, ville d’accueil de l’Espagne lors de la Coupe du monde 2006, parce qu’il se composait majoritairement de fleurs jaunes). Et son prétendu racisme, comme lorsqu’il motiva Reyes en lui parlant de son partenaire en club, Thierry Henry, en des termes fleuris. Une réussite, d’autant que la France colle 3-1 à l’Espagne en huitièmes et l’élimine de cette Coupe du monde. Sauf qu’Aragonés n’est pas homme à se démonter. Toujours en poste lors de l’Euro 2008, il mène ainsi Barcelonais, Madrilènes et compagnie au sacre final aux dépens de l’Allemagne. Avec un joueur à la peau noire, Marcos Senna, au milieu de son système en 4141. Et une victoire référence (3-0) aux dépens de la Russie, en demi-finale, avec une Roja en maillot jaune. Que Luis continuera jusqu’à son dernier souffle à qualifier de moutarde.

À lire : La suite du top 100 des entraîneurs

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