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- Les cartons rouges qui ont marqué l'histoire
Top 100 : Cartons rouges de légende (de 100 à 91)
Parce que Cyril Rool n’a pas le monopole des tacles à la carotide, voilà un nouveau top 100 dans un camaïeu de rouge. Au menu : des coups de sang et des simulateurs, des agressions et des injustices. Salade de chevilles servie à volonté.
#100 - Carlos Caszely - 1974
RFA – Chili (1-0), Coupe du monde, 14 juin 1974
Dans sa vie, Carlos Caszely a fait des choses mémorables, comme s’asseoir sur la barre transversale du stade national de Santiago pour le tournage du clip de son hit ou refuser de serrer la main du général Pinochet. Celui que l’on surnomme le roi du mètre carré fut aussi le premier joueur expulsé de l’histoire de la Coupe du monde. C’était contre l’Allemagne de l’Ouest, en 1974. Harcelé par Berti Vogts, Caszely déboulonne. L’idole du Chili répond par un tacle violent et voit rouge. À l’heure de refaire l’histoire, l’attaquant plaidera le fait qu’il y avait un contrat sur sa tête. « Le sélectionneur de cette grande équipe qui a été championne du monde a dit qu’il avait peur de deux joueurs, Johann Cruyff et Carlos Caszely, et il a chargé Berti Vogts de me prendre de manière vicieuse. Si tu regardes le marquage qu’il exerce sur Cruyff en finale, c’est le même que sur moi. La différence, c’est que Cruyff jouait dans la meilleure équipe du monde et moi pour un petit pays sud-américain » , fanfaronnait le Chilien dans les colonnes de So Foot, en 2012. En plus d’une place dans le Guinness, Caszely gagne avec cette expulsion une campagne de presse mensongère à son encontre. Au Chili, le joueur est montré du doigt par la presse de la dictature pour ses sympathies communistes. Certains disent même qu’il s’est fait expulser volontairement pour ne pas avoir à affronter ses frères rouges d’Allemagne de l’Est lors du match suivant. Un mensonge évidemment.
#99 - Gilbert Juilly - 2007
FC Muespach – Kappelen (1-1), Division 1A de la Ligue d’Alsace, 3 novembre 2007
S’il y a bien un geste revisité chaque semaine qui fait le sel du football de district, c’est le tacle glissé. Et s’il y a bien un tacle glissé mythique, c’est celui de Gilbert Juilly à l’encontre d’Eric Wurtlin, posé sur une pelouse grasse du Haut-Rhin, à l’automne 2007. Ce samedi-là, FC Muespach affronte son voisin Kappelen dans un match du groupe D de la Division 1A de la Ligue d’Alsace. Ce qui devait être un match amateur parmi d’autres va faire le tour du web via une séquence de 38 secondes, filmée derrière la main courante. « J’étais jeune et il était balèze, je fais 1,70, lui 1,88, facile, situe Eric. C’était un défenseur à l’ancienne, un bûcheron du dimanche, quoi ! » Mais le bûcheron sort aussi sa hache le samedi. D’abord, il y a ce cri, quand Gilbert Juilly se fait subtiliser le ballon par Eric : « OH PUTAIN ! » La suite, c’est le gros Gilbert qui prend son élan pour un tacle assassin des familles. Heureusement, Eric l’a entendu arriver avec ses gros sabots et saute pour sauver ses chevilles. Le dénouement de l’histoire ? « Ça s’est fini par une bonne bière, tout ça. »
#98 - Federico Valverde - 2020
Real Madrid – Atlético (0-0, 4-1 t-a-b), Supercoupe d’Espagne, 12 janvier 2020
Qui n’a jamais rêvé d’anéantir un but adverse tout fait ? Plaisir coupable et sadique, cet acte d’anti-jeu ne donne qu’une seule solution à l’arbitre : sortir le rouge. Mais il donne aussi et surtout l’agréable sensation d’avoir sauvé son équipe, alors que celle-ci était au bord du précipice. Ainsi, lors de la finale de la Supercoupe d’Espagne 2020 entre l’Atlético et le Real, alors qu’il ne reste plus que cinq minutes avant la fatidique séance de tirs au but, Federico Valverde ne peut s’empêcher de sécher Álvaro Morata, qui s’enfuit à grandes enjambées vers les cages de Thibaut Courtois. Après avoir été malmené par des Colchoneros remontés, puis expulsé, le jeune milieu uruguayen est félicité par Diego Simeone, grand connaisseur de l’art de la découpe. Exécuté de manière à ne pas pouvoir blesser son adversaire, tout en étant certain qu’il déguste la pelouse du stade Roi Abdallah, ce tacle est le geste de cette finale. Les tirs au but couronneront finalement le Real Madrid et le sacrifié Federico Valverde.
#97 - Lukasz Sapela - 2014
Qabala – Ravan Baku (0-0), D1 d’Azerbaïdjan, 23 février 2014
On appelle ça un coup de chaud. Boosté par l’adrénaline ou le désir de revanche, ou les deux, il arrive qu’après un geste victorieux, un sportif déraille. Le gardien de but Lukasz Sapela en sait quelque chose. Lors d’un match opposant Qabala à son club du Ravan Baku, en 2014, le Polonais stoppe un penalty de Leonardo da Silva. L’arrêt est à montrer à tous les gamins gantés, l’horizontale parfaite. Malheureusement, le portier enchaîne avec un bras d’honneur tendu à ceux qui lui font face. Ses partenaires tentent vainement de le calmer, mais l’affaire dure quand même une petite dizaine de secondes. Évidemment, c’est rouge. L’auteur de ces lignes ne maîtrisant ni le polonais ni l’azéri, impossible d’en savoir plus sur la raison du courroux de Lukasz Sapela. Ce qui est sûr, en revanche, c’est qu’en ce jour de février 2014, l’homme dans les bois du Ravan Baku en avait gros sur la patate. Et le match nul obtenu grâce à son arrêt n’a pas empêché son équipe de terminer lanterne rouge du championnat.
#96 - Polomat & Barreto - 2018
QRM – Auxerre (4-1), Ligue 2, 16 mars 2018
Laurel et Hardy, De Funès et Bourvil, Coluche et Le Luron, Jim Carrey et Jeff Daniels, Chevallier et Laspalès, Eric et Ramzy, Shirley et Dino, Omar et Fred… Les duos ne manquent pas sur la scène humoristique. Mais ce soir-là, le stade Robert-Diochon a fait naître deux nouvelles têtes : Pierre-Yves Polomat et Mickaël Barreto. Alors que l’AJA est menée 3-1 à la 81e minute de jeu, le latéral s’arrête en pleine action pour aller mettre un coup de front à son coéquipier. « Je lui dis d’arrêter de jouer long et derrière, on se prend la tête » , expliquait PYP à But. Il faut l’intervention de Marvin Gakpa, M. Loyal normand, puis d’un membre du staff pour que les deux Bourguignons arrêtent leur sketch. Sous les acclamations, les deux larrons sont renvoyés dans leurs loges. Le spectacle n’a visiblement pas plu à leur employeur. Polomat est renvoyé à Saint-Étienne avant le terme de son prêt, Barreto est mis à pied deux semaines, avec l’obligation de prendre le sifflet pour un tournoi de jeunes. Chapeau, les artistes.
#95 - Oliver Kahn - 2001
Hansa Rostock-Bayern Munich (3-2), Bundesliga, 3 mars 2001
La saison 2000-2001 d’Oliver Kahn est inoubliable pour trois raisons. La première, c’est ce titre de champion d’Allemagne arraché dans les derniers instants de la dernière journée, alors que Schalke 04 faisait déjà la fête. La deuxième, c’est la séance de tirs au but qui a sacré le Bayern en finale de la Ligue des champions grâce à trois arrêts signés Der Titan. La troisième ? Une défaite 3-2 sur la pelouse du FC Hansa Rostock. Monté dans la surface adverse sur un corner de la dernière chance, Kahn boxe le ballon dans les filets adverses, avant de partir se replacer tranquillement. But refusé par l’arbitre et deuxième carton jaune synonyme d’expulsion envers le portier. Qui réussira encore une belle parade pour se justifier de son geste : « Je croyais qu’un gardien avait le droit d’utiliser ses mains dans les seize mètres. »
#94 - Zinédine Zidane - 1998
À 3’23
France – Arabie saoudite (4-0), Coupe du monde, 18 juin 1998
Après une victoire inaugurale contre l’Afrique du Sud au Vélodrome, l’équipe de France se présente face à son public dionysien. Le même qui le verra quelques semaines plus tard décrocher sa première étoile. Face à la docile Arabie saoudite, le chantier se déroule sans accroc. Grâce au coup de main d’Al-Khilaiwi, découpant Lizarazu sur son aile, puis aux buts d’Henry et Trezeguet, les Bleus s’installent sans souci dans leur demeure inaugurée quelques mois plus tôt. Mais c’est compter sans les bonnes manières de Zinédine Zidane qui, à 2-0 et en supériorité numérique, n’oublie pas de s’essuyer les crampons sur le paillasson Amin. Aimé Jacquet avait prévenu la veille : « Attention, n’allons pas prendre un carton rouge bêtement ! » Quand le Double Z passe penaud à côté de son banc, le sélectionneur ne lui jette même pas un regard. Dans le vestiaire, l’intendant Henri Emile entrouvre la porte du vestiaire et souffle « Henry a marqué » . Zidane, lui, a déjà la tête ailleurs. « Aïe aïe aïe… » Il sait déjà qu’il passera les deux prochains matchs à la cave. Avec la suite que l’on connaît…
#93 - Hakan Ünsal - 2002
Brésil – Turquie (2-1), Coupe du monde, 3 juin 2002
« C’était notre premier match de Coupe du monde et on jouait la plus forte équipe du Brésil depuis 20 ans, rappelle Reçber Rüstü, le gardien aux peintures de guerre. On ne pensait pas gagner. On se disait que peut-être avec un peu de chance, ça pourrait passer, mais c’est tout. » Pourtant, pour leur entrée en piste dans un Mondial asiatique qui les verra toucher le dernier carré, les Turcs font plus que résister. Menés 2-1 et réduits à dix dans le temps additionnel à cause d’un penalty injustement concédé à la 87e minute et transformé par Rivaldo, les potes de Hasan Şaş peuvent l’avoir mauvaise. Mais quand une équipe qui cherche à rattraper le temps tombe sur une autre qui joue la montre, c’est souvent la plus roublarde qui triomphe. Et, à ce jeu, Rivaldo n’est pas le plus mauvais. Se roulant au sol en se tenant le visage, comme s’il venait d’être fauché par la déflagration d’un obus, la gueule cassée pousse M. Young-joo Kim à exclure l’artilleur Hakan Ünsal. Certes, le latéral a bien appuyé sa frappe vers le tireur, qui tardait à exécuter son corner. Mais c’est bien au niveau des hanches qu’il l’a touché. « On s’est dit que les arbitres avaient été « piégés » par le nom de Rivaldo, souffle Rüstü. Et puis lui… Il était prêt à tout pour gagner… » Une comédie qui coûtera tout de même au futur champion du monde une amende de 7350 dollars, pour avoir simulé une douleur excessive. D’ailleurs, la Turquie et le Brésil se retrouveront en demi-finale. Cette fois, Ronaldo mettra tout le monde d’accord.
#92 - Preston Edwards - 2011
Ebbsfleet United– Farnborough (0-3), Conference South, 5 février 2011
La vie est parfois une affaire de secondes. Pour quelques secondes de trop à tremper son museau dans le houblon au pub avant de se rendre au stade, on peut par exemple louper un penalty et un carton rouge. C’est l’expérience faite, un jour de février 2011, par les spectateurs de Stonebridge Road, à Northfleet, à la pointe sud-est de l’Angleterre. Ce jour-là, leur équipe d’Ebbsfleet United accueille Farnborough en Conference South, le sixième échelon du foot anglais. Les plus ponctuels pour la grand-messe dominicale assistent à l’une des expulsions les plus rapides de l’histoire du football. Dès le coup d’envoi, un joueur d’Ebbsfleet remet le ballon à un défenseur. Celui-ci, respectueux des traditions en vigueur outre-Manche, s’apprête à balancer une mine devant. Mais il se fait contrer, et décide d’effectuer une passe en retrait vers son gardien. Encore faut-il s’appliquer à la réaliser… La passe est foirée, le gardien Preston Edwards contraint de sortir à contretemps vers l’attaquant de Farnborough. Bilan ? Carton rouge et penalty. Et une grosse colère du gardien des locaux contre son partenaire qui rend son tablier en jetant un gant sur la pelouse.
#91 - Diego Costa - 2016
Everton-Chelsea (2-0), FA Cup, 12 mars 2016
La brute et le truand dans le même corps : Diego Costa. En quarts de finale de la Cup 2016, Everton mène 2-0 contre Chelsea. Il reste à peine quelques minutes à jouer, l’arbitre siffle une faute de Gareth Barry sur l’attaquant des Blues. Mais ce coup de sifflet, l’international espagnol – déjà averti d’un premier carton jaune – s’en cogne. Il commence par se ruer sur Barry, le ceinture au niveau du ventre et colle son front contre le visage de l’Anglais. Et puisque celui-ci n’a pas l’air de réagir à ses avances, Costa le mord, mais discrètement, dans le cou. Le tout avant de lui câliner gentiment la tête pour faire croire à une fraternisation aux yeux de l’arbitre. Carton jaune pour les deux hommes, le deuxième à l’actif de Costa, qui sort du terrain, non sans lâcher quelques mots doux à l’oreille de Michael Oliver. Histoire de répandre encore un peu de parfum Sauvage dont il a le secret.
Par Arthur Jeanne, Florian Lefèvre, Maxime Renaudet et Mathieu Rollinger