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Top 10 : Les Waterloo des Bleus
Il y a tout juste deux cents ans éclatait la bataille de Waterloo (au cœur de l'actuelle Belgique). C'était le 18 juin 1815. L'empereur Napoléon Ier s'inclina face à une coalition de Britanniques, Allemands et Néerlandais. Plus qu'un revers, c'est un véritable traumatisme pour la France. La défaite la plus célèbre de notre histoire certes, mais pas la dernière… Récits entre Séville et Berlin, l'Afrique du Sud et la Corée.
10 – France – République tchèque (0-0, 5 t.a.b. à 6), Manchester, 26 juin 1996
Dire que les Français attaquent cet Euro revanchards est un bel euphémisme. Vaincus dès le premier tour en 92 et privés du Mondial 94, les Bleus sont en Angleterre pour faire couler le sang. La campagne se déroule à merveille, jusqu’aux portes de la finale. À Old Trafford, théâtre des rêves et de combats épiques, les Français se jettent sans merci dans la bataille face aux Tchèques, mais personne ne parvient à faire flancher l’ennemi. C’est donc aux tirs au but, en combat d’homme à homme, que l’affrontement se poursuivra. Les tireurs d’élite sont de sortie, et les cinq premiers coups de chaque équipe perforent les gardiens. Jusqu’à ce que Reynald Pedros ne tremble au moment d’exécuter son vis-à-vis. La fin du rêve bleu.
9 – France – Brésil (2-5), Solna, 24 juin 1958
Le capitaine Jonquet a été un meneur d’hommes parfait lors de cette Coupe du monde suédoise, et son escouade se retrouve en demi-finale face au Brésil. Les Français peuvent être confiants. Les champs de bataille septentrionaux réussissent souvent mal aux armées des pays chauds, et le soldat Fontaine abat méthodiquement tous les gardiens qui croisent sa route. Mais peu avant le demi-heure de jeu, une escarmouche coûte son péroné à Jonquet. Les conventions de l’époque n’autorisaient pas les joueurs à être changés sur blessure, et il doit poursuivre le combat. Le bilan final est lourd, et le Brésil de l’intraitable Pelé file vers sa première conquête du monde.
8 – Pays-Bas – France (4-1), Berne, 13 mai 2008
La France ne perdra pas, l’affaire était entendue. « Pourquoi ? On n’est pas l’Italie » , justifie l’orgueilleux Abidal. Erreur fatale. Mépriser les Transalpins est une chose, sous-estimer la flotte batave en est une autre. Le jeune Éric allait le découvrir, la France en faire les frais. Le Hollandais volant s’était retiré, mais son successeur, Marco van Basten, avait pris les commandes. Ainsi, l’Invincible Armada infligea une correction au navire Domenech. Le naufrage français était complet, avec en plus, une signature italienne : celle de San Marco.
7 – France – Danemark (1-17), Londres, 22 octobre 1908
La prise du royaume d’Angleterre par Guillaume le Conquérant a presque un millénaire lorsque les joueurs de l’équipe de France touchent les côtes anglaises en 1908. Objectif, le tournoi des Jeux olympiques de Londres. Mais le voyage, effectué en frégate, a été long et fastidieux. Les troupes sont fatiguées, et le débarquement timide. Les Français pensaient pourtant avoir la force du nombre, et arrivaient aux JO avec deux équipes prêtes à s’emparer du trône olympien. Mais l’équipe A se fait écraser par le Danemark en demi-finale, 17 à 1. Un score qui reste encore comme la plus grosse déroute de l’histoire des Tricolores. La France préfère se rendre avant la fin de la guerre, et ne se présente même pas au match pour la troisième place.
6 – France – RFA (0-2), Guadalajara, 25 juin 1986
Après le traumatisme de Sedan en 1870, les Français eurent leur revanche lors de la Première Guerre mondiale. Et après la débâcle de juin 1940, la nation avait su se relever et bouter les Allemands hors de France quatre ans plus tard. Quatre ans, c’est également ce qu’attendront les Bleus avant que l’histoire ne leur donne une chance de venger les soldats tombés à Séville en 1982. Mais la lutte tourne court. Les colonels Platini et Giresse sont diminués, affaiblis par des blessures de guerre, et le rempart Joël Bats ne peut résister aux assauts allemands. La Nationalmannschaft poursuit sa marche en avant après avoir infligé un 2-0 aux Bleus. La fin d’une génération de héros.
5 – Sénégal – France (1-0), Séoul, 31 mai 2002
Après avoir mis le monde et l’Europe à leurs pieds, les Français se voyaient déjà la tête dans les étoiles. Ou plutôt imaginaient-ils un astre aux cinq branches dorées, brodé une deuxième fois sur leur tunique. Même la blessure de leur chef de file ne modérera pas leurs intentions glorieuses. Quelle ne fut pas leur surprise quand ils firent face à des tirailleurs sénégalais remontés comme jamais. El Hadji Diouf prit le bataillon arrière à revers depuis son côté, puis Bouba Diop s’y repris à deux fois pour donner le coup de grâce. C’est ainsi que la campagne de Corée mit fin à l’Empire.
4 – France – Afrique du Sud (1-2), Rustenburg, 22 juin 2010
Après dix jours de pain sec, de chaussettes-claquettes et d’insultes contre un général de pacotille, les hommes en finirent de leur campagne sud-africaine. La mutinerie tourna à la débâcle des plus sombres. On y avait vu un bataillon « où des caïds immatures commandent à des gamins apeurés » , dixit l’état-major. C’était le dernier jour, comment tomber plus bas ? Pourtant, la France perdit encore. Au pays, le peloton d’exécution attendait bon nombre d’entre eux – et le baroud d’honneur du soldat Malouda n’y changea rien. Encore une sombre page de la Françafrique.
3 – Italie – France (1-1 ap, 5-3 tab), Berlin, 9 juillet 2006
Il lui fit la misère tout du long, l’autre accrocha sa tunique blanche immaculée. Il lui proposa d’échanger son vêtement au terme du combat, l’autre le provoqua. Il se retourna instinctivement et, tel le bélier se ruant sur son rival, enfonça la poitrine de l’autre de son crâne chauve. L’autre n’avait plus qu’à faire le mort après être tombé à la renverse, son plan diabolique venait de se concrétiser. Et le chef-d’œuvre du premier partit en fumée… « Ouuuh, ouuuh Zinédine. Oh Zinédine. Pas ça, Zinédine. Pas ça, Zinédine. Oh non, oh non, pas ça. Pas aujourd’hui, pas maintenant, pas après tout ce que tu as fait. »
2 – France – Bulgarie (1-2), Paris, 17 novembre 1993
En cette froide soirée d’automne, le Parc des Princes allait accueillir l’inimaginable. À quelque instants du terme d’un combat âpre, les Bleus pensent tenir leur billet pour la mère de toutes les batailles, le Mondial 94 aux États-Unis. La suite est devenue légende. 89 minutes et 50 secondes, les Bulgares récupèrent le cuir et le font remonter sur l’aile droite. Kostadinov le récupère aux abords de l’arrière-garde française et fusille Bernard Lama. En cabine, Thierry Roland s’effondre : « C’est la mise à mort ! » Le coq est terrassé, et, 216 ans après La Fayette, les Français ne conquerront pas de nouveau l’Amérique.
1 – France – RFA (3-3 ap, 4-5 tab), Séville, 8 Séville 1982
La chevauchée s’arrête net. Sur le pré du stade Ramón Sánchez Pizjuán, Patrick Battiston ne se relèvera pas. Allongé, le dos collé au gazon andalou, l’homme ne bouge pas d’un pouce, à l’image de sa chevelure lisse. Une vertèbre endommagée et trois dents broyées par le choc. Vain sacrifice, la flèche du héros tricolore passera à côté de la cible germanique. La fleur au fusil, il ne sait pas encore que les Bleus s’inclineront au bout de la nuit. Assommé par un salaud de Boche. « Les parfums ne font pas frissonner sa narine ; Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine, Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit. » Arthur Rimbaud avait déjà tout compris.
Bonus : France – Irlande (1-1 a.p.), Saint Denis, 18 novembre 2009
Ce match aurait dû sonner comme une libération pour toute une nation, il fut en fin de compte la première pierre posée au « Chemin des drames » de 2010. Une prolongation pour départager les belligérants, une main contraire aux règles de l’art de la guerre pour poignarder les intrépides Irlandais, et c’est la France toute entière qui se retrouve couverte de honte. La victoire à la Pyrrhus par excellence.
Par Alexandre Doskov et Florian Lefèvre