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Top 10: Les anecdotes d’un siècle du Stade Malherbe
Aujourd'hui, le Stade Malherbe de Caen fête ses 100 ans. Et plutôt que de se casser à entasser 100 bougies sur un gros gâteau, il a préféré inviter le Milan AC à participer à la fête. Et il sort également un bouquin, œuvre démentielle qui se veut exhaustive sur cent années de football en Normandie. Petite sélection d'anecdotes piquantes et d'histoires rocambolesques qui en disent aussi long sur l'Histoire d'un club de football que sur l'Histoire de tout un sport.
1. Au cours de la saison 1931-32, un match amical oppose le Stade Malherbe à une obscure équipe luxembourgeoise (oui, un pléonasme se cache dans cette phrase). Le joueur Jean Gast prend la responsabilité de louper sciemment un penalty qu’il jugeait sifflé à tort, à la suite d’une main involontaire. Quelques minutes plus tard, les Luxembourgeois obtiennent à leur tour un péno très contestable, et rendent la politesse aux Caennais, en balançant un pruneau à côté des cages. En toute fin de match, une nouvelle faute est sifflée dans la surface en faveur des Caennais ; cette fois, la faute est réelle, et le SMC perd 3-2. Les Caennais tentent donc leur chance… et le gardien luxembourgeois repousse la tentative.
2. Décembre 1938. C’est la fin de la première ère professionnelle du SMC. Suite à une défaite 2-1 à Cherbourg, au cours de laquelle Malherbe a terminé la rencontre à 9, les supporters louent presque l’abnégation de leurs « tripiers » , et on évoque déjà une semi-victoire, quand on apprend le mercredi dans les colonnes du Bonhomme Normand que, sur le terrain, une partie des Rouge et Bleu avaient « les jambes de flanelle et la goule de bois » ! La presse révèle alors que plusieurs joueurs ont été vus le samedi soir, veille du match, au bal des étudiants à Caen jusqu’à une heure tardive… Quelques piques sont lancées, mais très vite le Moniteur, soutien inconditionnel du club, dédramatise : « Ce n’est pas grave, nos amateurs sont comme tout le monde et ils ont bien le droit, eux aussi, de s’amuser un peu ! » Effectivement, si les cadres de l’équipe sont militaires ou universitaires, les plus jeunes sont des scolaires ou des apprentis pour qui le football n’est pas la seule passion !
3. Novembre 1943. Avec le recul des armées allemandes, la pénurie s’accroît en France. La création du CFA et les longs trajets qui en découlent créent de nombreux casse-tête. Dans le cadre d’un déplacement à Dieppe, l’effectif du Stade Malherbe doit prendre le train jusqu’à Rouen, avant de rejoindre le stade. Mauvaise surprise après le match, puisque le chauffeur, peut-être lassé d’avoir attendu, ne revient pas chercher les joueurs ! Bloqués sur place, ceux-ci sont logés par leurs adversaires du jour. Le manque de lits oblige même un dirigeant caennais à dormir dans un berceau ! Sans nourriture ni tickets de rationnement, l’équipe dîne d’un rosbeef partagé par un des joueurs, qui se l’était procuré au marché noir. Finalement, un véhicule de livraison ramène la délégation à Rouen, les joueurs tassés au milieu des bidons de lait, battus par le vent froid de novembre. Le retour à Caen s’effectue en train, avec douze heures de retard.
4. Novembre 1970. C’est l’histoire d’un prof de sport originaire du Sud-Ouest qui est affecté en Basse-Normandie. Il s’appelle Parizot, ou Pariseau – les journaux de l’époque ne sont même pas d’accord sur la graphie de son nom. Le gaillard n’a laissé qu’un exploit en guise de signature. Amateur de ballon rond, et pas maladroit de ses pieds, le prof propose ses services au Stade Malherbe, alors club amateur pas vraiment en mesure de faire la fine bouche quand il a des opportunités de se renforcer. Le club bas-normand est donc tout disposé à autoriser le prof de sport à effectuer un essai en équipe première, à l’occasion d’un match de gala face à l’Olympique lyonnais. Le Stade Malherbe ne pèse pas bien lourd face à l’armada lyonnaise… Parizot (ou Pariseau), qui n’a jamais disputé la moindre rencontre professionnelle de sa vie, entre à la mi-temps. Et puis le temps s’arrête : le prof de sport récupère la gonfle, enrhume Raymond Domenech, jeune mais déjà moustachu, et balance un cachou qui finit au fond des filets. Malherbe s’impose 4-2, grâce à l’exploit d’un type qui s’empressera de retomber dans l’anonymat.
5. Parmi la galerie de personnages qui font l’histoire du SMC, il y a Émile Sentais. Peut-être pas l’équivalent d’un Bernard Tapie ou d’un Claude Bez, mais un type qui n’en est pas moins fumé comme un saumon. Capable de parier avec l’un de ses joueurs qu’il court plus vite que lui et de lui proposer un 100 mètres au beau milieu d’une nuit arrosée histoire de le lui prouver, et tant pis si ce pari perdu d’avance lui coûte une télé (à l’époque, un téléviseur, ça représente une moitié de salaire pour un joueur du SMC). Sentais, c’est aussi ce mec assez barjot pour improviser une causerie au fin fond d’une grotte, pendant un stade de préparation d’avant-saison à la Garette.
6. Alain Laurier, entraîneur-joueur de 1979 à 1983, est sans doute l’un des premiers grands tacticiens qu’ait connu le football français. Un type sérieux, qui est notamment le premier entraîneur à avoir écrit un bouquin sur l’art du schéma tactique – un livre qui s’est à l’époque écoulé à 40 000 exemplaires, excusez du peu. Un type sérieux, mais qui demande à ses joueurs de venir déguisés pour s’entraîner lors d’un Mardi gras, et qui organise des concours de culture générale dans le bus, lors des déplacements.
7. 22 octobre 1993. Le Stade Malherbe se déplace à Strasbourg pour le compte de la 14e journée de Division 1. Si le match oppose deux formations de milieu de tableau, il ne tarde pas à devenir épique. Le Stade Malherbe encaisse le triplé le plus insolite qui soit : le défenseur caennais Joël Germain provoque trois penalties, qui sont tous les trois transformés par… Frank Lebœuf (en réalité, le troisième est frappé par Pascal Baills, qui tire sur le gardien, avant que Lebœuf ne pousse le ballon au fond). Strasbourg s’impose 3-0. Ils ont dû faire une drôle de gueule, les mecs qui ont regardé Jour de Foot ce soir-là, en voyant le nom de Lebœuf s’afficher trois fois dans la liste des buteurs.
8. Le football a un peu vite oublié Bill Tchato, alors que le virevoltant attaquant du Stade Malherbe (saison 1995-96) avait tout fait pour marquer le football de son empreinte. Encore un type quelque peu curieux, que Pascal Théault retrouve un jour crevé au terme d’une sortie vélo organisée en stage de préparation estival, et pour cause : il a cassé l’une des pédales dans le premier kilomètre et s’est coltiné les 40 bornes restantes avec une seule pédale sur son bicloune. Le même Bill Tchato qui tentait, en période de mise en vert dans les Alpes, de dépasser Frédéric Née sur les skis alors qu’il n’avait pratiquement jamais vu de neige de sa vie et qui se prenait des gadins monumentaux.
9. Pascal Théault a également une drôle d’anecdote (un poil plus inavouable), datant de l’époque où il dirigeait le centre de formation du SM Caen, au sein duquel sévissaient notamment Jérôme Rothen et Grégory Tafforeau. Afin d’organiser ces fameux voyages au ski, Théault avait besoin de rassembler 60 000 francs, et le club n’en accordait que 10 000. Pour rassembler les fonds nécessaires, Théault organisait donc une fausse tombola, avec des micro-ondes et des dindes de Noël à la clé – sauf que les lots en question n’ont jamais existé. Les joueurs s’empressaient de vendre leurs tickets à leur entourage (naïf) avant de se carapater aux sports d’hiver, pas vraiment soucieux d’avoir taxé la famille et les amis.
10. Mai 2011. En assurant le point du nul face à l’OM à domicile (2-2), le Stade Malherbe assure son maintien en Ligue 1. L’exubérant Yohan Mollo, auteur du premier but et remplacé lors de la seconde période, se glisse au milieu du kop caennais pour chanter son bonheur avec eux.
par Julien Mahieu
Merci à tous les auteurs du Livre du Centenaire pour ces anecdotes.
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