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Top 10 : le Tour en musique

Par Guillaume Willecoq
6 minutes
Top 10 : le Tour en musique

Sport populaire et art populaire : cyclisme et musique ne pouvaient que se rencontrer. Franchissant autant de genres que de décennies, notre Tour de France en chansons fera aussi étape en Allemagne, Espagne et Pays-Bas. Attention : ici, on parle sueur, montagne et gros braquet. Pas de place pour la bicyclette chevrotante de Montand ou « L'arrivée du Tour » de Bashung et ses jeux de mots laids. Départ réel.

Yvette Horner (1952-1963)

La musique et le Tour de France, c’est elle. Yvette Horner ne fut pourtant pas la première à établir une passerelle entre les deux disciplines – les premières chansons officielles du Tour remontent aux années 30 – mais 11 éditions passées à jouer de l’accordéon au beau milieu du défilé de la caravane, juchée sur le toit d’une Citröen siglée « Suze » , ça marque forcément les esprits… sans même parler de la constitution physique que cela nécessite. Respect donc à la reine de l’accordéon aux 2000 concerts.

Kraftwerk, « Tour de France » (1983 – 2003)

Pionniers de l’électro, les Allemands de Kraftwerk ont multiplié les albums-concepts consacrés à l’univers mécanique : l’autoroute ( « Autobahn » ), le chemin de fer ( « Trans-Europe-Express » ) et… le Tour de France. Eux-mêmes cyclistes amateurs, les têtes pensantes du groupe sont des férus de la Grande Boucle, au point qu’à partir d’un unique morceau composé en 1983, ils accouchent finalement d’un album complet en 2003, leur dernière production à ce jour.

Ludwig von 88, « Louison Bobet forever » (1987)

Figures de la scène alternative française des années 80, les Ludwig von 88 ont passé à la moulinette de leur humour gras à peu près toutes les personnalités de leur temps, chantant aussi bien l’incapacité d’Ayrton Senna à appuyer sur les freins que le masochisme maladif de Sylvester Stallone / Rocky Balboa. Sans oublier de s’intéresser à un Louison Bobet qui, « le ventre plein d’amphés, ne peut plus s’arrêter d’pédaler » .

Dick Annegarn, « Agostinho » (1990)

Pourquoi écrire sur Joaquim Agostinho plutôt que sur ses compatriotes Zoetemelk ou Janssen ? Parce qu’à travers le Portugais au destin tragique, mort à la suite d’une chute provoquée par un chien sur le Tour de l’Algarve, le Néerlandais Dick Annegarn évoque « ces cyclistes qui tentent tant bien que mal d’émerger du peloton, pas les champions. C’est le côté social du vélo qui m’intéresse. Les coureurs sont des héros populaires. Agostinho, sa femme avait un élevage de vaches et lui ramenait les sous. Il était pauvre et ses trophées lui permettaient d’avoir une exploitation agricole. C’est une chanson que j’ai écrite quand je vivais à Marne-la-Vallée. Je faisais du vélo et il fallait monter une côte terrible. Et chaque fois que je la prenais, je me disais que je n’étais pas à la hauteur du dernier de ces gars-là. »

Kent, « 60 millions de Poulidor » (1996)

Il était donc possible d’aimer à la fois Anquetil et Poulidor. Tel est le sentiment exprimé par le chanteur Kent en 1996, dans une chanson revenant sur le duel phare du cyclisme de son enfance. Comme tout le monde, le petit Hervé Despesse aimait « Poupou » . Comme peu d’autres personnes, il s’est pris de tendresse pour Anquetil à force de voir le dominateur des routes relégué dans le gruppetto de l’affection des fans. « La vie est sévère pour les moins forts / Mais elle les console franco de port / En montrant les lanternes rouges / Qui rament à mort / En montrant aussi / Dans sa Tour d’ivoire / Le désespoir d’Anquetil / Si seul tandis que rigolent / 60 millions de Poulidor. »

Miossec, « Le critérium » (1997)

Un bouquet après la ligne d’arrivée ou le baiser d’une dulcinée, Christophe Miossec mélange allégrement les deux dans ce morceau de 1997. Quoi de plus logique après tout, tant on ne compte plus les coureurs ayant fini par se caser avec une hôtesse rencontrée sur le podium protocolaire (sans même parler des rencontres d’un soir)… Dans la même veine, on préférera tout de même son allégorie amoureuse depuis le terrain de foot, le magnifique « Evoluer en troisième division » .

Les Wampas, « Jalabert » (1998)

En 1998, le salarié de la RATP le plus célèbre de France, Didier Wampas, et son groupe d’irréductibles punks chantent les exploits du plus grand cueilleur de bouquets français des années 90. Un hymne court et choc dont les esprits taquins pourraient s’amuser à recycler les paroles à destination des meilleurs tricolores de la décennie suivante – exemple (pas tout à fait) au hasard, en trois syllabes : « Chavanel est génial, numéro 1 mondial, toujours il sera le premier » . Non ?

Les Wampas, « Rimini » (2006)

Huit années ont passé depuis la pochade consacrée à Laurent Jalabert. Entretemps, les fans de cyclisme ont bien dû se résigner à sortir de l’enfance devant la multiplication d’affaires de dopage, descentes de police fracassantes et autres décès brutaux de leurs héros. En l’espace de deux mois, deux des plus brillants grimpeurs de leur temps, Jose Maria Jimenez et Marco Pantani, disparaissent dans la fleur de l’âge. Les Wampas se parent d’une inhabituelle gravité pour rendre hommage au « Pirate » dans ce « Rimini » touchant, voire poignant dans le dernier couplet. « Le bandana sous les étoiles » …

Jean-Louis Murat, « Le champion espagnol » (2011)

Rayon cyclisme, Jean-Louis Murat est l’exact opposé de Dick Annegarn. Lui, ce qui le fascine, ce sont les exploits des champions… au point d’avoir songé, dans les années 90, à programmer ses dates de tournée d’été en se calquant sur les victoires d’étapes de Fausto Coppi lors de son mythique Tour de France 1952 ! « J’aime les champions, j’aime l’idée du Tour de France, le circuit du Tour de France. Les classements, les palmarès des étapes ont participé à une sorte de mythologie intime. Le premier champion que j’ai vu était passé au-dessus de la ferme de mes grands parents, échappé. J’étais petit, il s’appelait Gérard Saint, et je suis resté très longtemps avec l’idée que le coureur cycliste était un saint. Je ne voyais pas de différence entre un type qui courait le tour de France et Saint François d’Assise ».

Vetusta Morla, « Tour de Francia » (2014)

Tandis que la mode des chansons dédiées au cyclisme s’estompe en France, nos voisins espagnols nous gratifient l’an passé d’un joli « Tour de Francia » via le groupe Vetusta Morla. Nulle trace ici d’une quelconque glorification sans recul des vedettes nationales, dans un pays où l’affaire Puerto n’est pas loin d’être considérée comme une machination internationale ourdie pour saper la réussite sportive de tout un pays. Non, plutôt l’évocation sensible d’une atmosphère, celle des après-midis de juillet, la télé ronronnante, la chaleur assommante, les heures passées à refaire l’étape entre amis… Des moments à teneur d’éternité quand les générations les transforment les unes après les autres en immuables rituels estivaux.

Bonus

Un groupe qui porte – presque – un nom de coureur cycliste et qui ne chante – presque – que les héros de la Grande Boucle : vous en rêviez ? Les Poolidoors l’ont fait. Groupe d’Amiens créé en 2009, ces inconditionnels du grand Jimmy Casper chantent sous la pluie – « singin’Indurain » – célèbrent le tout-puissant Moncoutié, et rattrapent leurs histoires d’amour mal embarquées comme Floyd Landis corrigerait sa défaillance de la Toussuire dans la montée de Morzine. Imparable.

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Par Guillaume Willecoq

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