- Coupe d'Espagne
- Finale
- Atlético Madrid/Real Madrid
Top 10 : Ils ont joué au Real et à l’Atlético
Ce vendredi soir, la finale de Copa del Rey s'annonce bouillante entre le Real Madrid et l'Atlético. Un derbi madrileño qui compte son nombre de « traîtres », ces joueurs ayant porté les liquettes blanches et rojiblancas. Et pas des moindres. Revue d'effectif.
Juan Gómez González, aka Juanito :
« Jouer pour le Real Madrid est comme toucher le ciel, le Real Madrid a toujours été ma priorité et Madrid a toujours été ma ville préférée. » Juanito sait y faire. Sitôt présenté à son nouveau public, l’Andalou de naissance déclare sa flamme à la Maison Blanche. Soit. En dix années sous la tunique blanche meringue, Juan Gómez González fait entrer son numéro 7 dans la postérité. Plus que de simples buts, coups d’éclat ou de sang, Juanito est, pour beaucoup de socios madridistas, l’essence même de leur fanion royal. Un avis pas forcément partagé par l’ennemi du Sud de la capitale. Bien avant de débarquer au Santiago Bernabéu en 1977, ledit Juanito a écumé les arcanes du Vicente Calderón pendant deux saisons (1972-74) : suffisant pour se péter le tibia et s’échouer à Burgos. Une remontée et un caractère bien affirmé plus tard – Juanito affiche un CV à faire pâlir Mario Balotelli – il fait du Real son siège. Et du Santiago Bernabéu son antre. Avant de se foutre en l’air à la sortie d’un virage mal négocié.
Raúl González :
741 matchs, 323 buts, double Pichichi, meilleur buteur de l’histoire de la Ligue des champions… Raúl González a une place au soleil dans le Hall of Fame du Real Madrid. Pourtant, rien ne prédestinait ce madrilène pur beurre à inscrire son patronyme dans la légende de Santiago Bernabéu. Ses premiers balbutiements footballistiques, Raúl González Blanco les accomplit à l’Atlético de Madrid. Issu d’une famille supportrice du club rojiblanco, il est contraint à quitter le navire colchonero après la dissolution des équipes de jeune – ah, les magouilles de Jesus Gil… Pas bête, le Real le récupère dans ses rangs à l’âge de quinze ans. Pour sa première saison avec les cadets, Raúl enfile les pions comme des perles (71 buts en 33 matchs). Trop fort, trop mature, trop tout, il ne lui faut que deux ans pour s’installer chez les grands du Real Madrid. Lors de la saison 94-95, lors du retour à Bernabéu, il claque sa première banderille face à l’Atlético. En 29 derbys – record qu’il partage avec Paco Gento –, l’autre numéro 7 de la Casa Blanca en est à onze réalisations. Un goret.
Eduardo Ordoñez :
Le précurseur. Aujourd’hui âgé de 104 ans, Eduardo Ordoñez Munguera a des histoires à raconter à ses petits-enfants. Avec son centenaire au compteur, la vie du milieu de terrain portoricain est un puits d’histoire. Outre avoir connu la guerre d’Espagne, il a été l’un des premiers footballeurs étrangers à évoluer en Liga. Toujours rayon record, Eduardo est le premier football de Porto Rico à atteindre le grade de professionnel. Un statut qu’il glane en 1928. Débarqué sur les bords du Manzanares (le fleuve bordant le Vicente Calderón), il y fait ses gammes jusqu’en 1932. C’est alors qu’il décide de devenir le premier transfuge entre les deux clubs de la capitale. La rivalité entre Merengues et Colochoneros n’atteignant pas encore son paroxysme – le Real Madrid se frottant à l’occasion avec le club de la Moncloa –, il ne joue qu’une saison sous la liquette blanche, le temps de s’accaparer une Liga (son seul et unique titre). En 1935, il met fin à sa carrière sous le maillot rojiblanco de l’Atlético avant d’épouser celle d’entraîneur au pays.
José Luis Pérez Payá :
José est un homme à punchline. En 1970, alors qu’il préside la Fédération espagnol de football, il dégaine : « Je ne suis pas contre le football féminin, mais il ne me plaît pas non plus. Esthétiquement, le football n’est pas un sport féminin. Une femme en maillot et en pantalon n’est pas très agréable. N’importe quel vêtement régional lui irait mieux. » Cette facette sexiste mise à part, José Luis Pérez Payá était un sacré joueur de foot. Dans les fifties, après des débuts en Liga avec la Real Sociedad, il est l’une des têtes d’affiche du Vicente Calderón. En compagnie de Juncosa, Ben Barek, Carlsson et Escudero, il est partie prenante de « la delantera de Cristal » (l’attaque de cristal en VF). Une Liga et trois petites saisons plus tard, il s’exile au nord de la capitale. Au sein du Real de Di Stéfano, il garnit son armoire de deux championnats et deux C1. Avant d’endosser le costume de principal coupable dans le retard pris par le football féminin en Espagne. True story.
Paco Llorente :
Fransisco Llorente Gento, aka « Paco » Llorente, n’a jamais trop su ce qu’il voulait. Neveu de l’illustre Paco Gente, et frère de Julio Llorente, il dédie sa vie au sport – une coutume dans la famille où deux de ses frères sont handballeurs professionnels. À 18 ans, alors qu’il évolue sous la liquette du Real Madrid aficionados, un club satellite du grand Real, il s’engage pour l’Atlético madrileño, petit frère de. En 1985, il fait ses grands débuts sous les couleurs rouge et blanche. Technique, rapide et agile, il ne profitera que deux ans durant de la chaleur du Vicente Calderón. Entre-temps, le Real s’est mis sur les rangs et l’attire pour faire le nombre autour de sa Quinta del Buitre. Attaquant, il a du mal à tenir la comparaison aux contacts de Butragueño et Pardeza. Pas grave, il se rattrapera en garnissant son palmarès de quelques Liga et Copa del Rey. En mal de temps de jeu, il prend le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle en 1994. Pour se faire pardonner ses nombreux pêchés. Amen.
Hugo Sánchez :
« Mon dernier match avec l’Atlético, celui de mes adieux, était une finale de Copa del Rey au Bernabéu : j’ai marqué et nous avons remporté le titre. Il peut se passer la même chose avec lui (Falcao, ndlr), peut-être que c’est l’un de ses derniers matchs avec l’Atléti. » En plus d’être un conseiller avisé, Hugo Sánchez est avant tout un grand fou. Terreur des surfaces aux coups de sang mémorables, le Mexicain a donc entamé son périple espagnol à l’Atlético de Madrid. Après une Liga et un titre honorifique de Pichichi en poche, il se barre chez l’ennemi de toujours. Pas en reste, il remporte cinq Ligas consécutives, quatre autres trophées de meilleur buteur et se veut prévoyant avec son ex : « L’Atlético de Madrid devrait travailler avec un psychologue pour en terminer avec son tabou avec le Real. » Détail qui a son importance, c’est au Rayo Vallecano, autre club madrilène de déjantés, qu’Hugo termine son parcours espagnol.
Bernd Schuster :
Rayon fantaisie et traîtrise, Bernd Schuster a une place de choix. En bon touriste teuton, l’ex de Cologne pose tout d’abord sa moustache sur la Costa Brava. Pas tombé dans la meilleure période azulgrana, Bernd remporte tout de même neuf trophées lors de ses huit années au Camp Nou (1980-88). En avance sur son temps (jurisprudence Figo), il troque sa camiseta blaugrana pour le blanc meringue du Real Madrid. Deux années pour autant de Liga plus tard, il se fait la malle à l’Atlético de Madrid pour une première dans ce sens. Sous la liquette des Colchoneros, il s’offre deux Coupes du Roi. La dernière, celle de 1992, il la remporte face au Real Madrid (2-0) : « Gagner au Santiago Bernabéu est quelque chose de maladif et, pour nous, ça a été une nuit magique, comme pour le président Jésus Gil. » Le tout sans jamais rendre son carnet de socios du Barça. Respect, petite catin.
Santiago Solari :
Santiago Solari pue toujours le football. Aujourd’hui chroniqueur pour El País – peut-être le meilleur d’Espagne dans son style et son analyse – El Precipito ( « Le Petit Prince » ) a été pour beaucoup la simple doublure de Zinedine Zidane. Pour les supporters Rojiblancos, c’est également un traître. Débarqué depuis son Argentine natale en 1999, Santiago Solari connaît l’une des pires crises de l’Atlético. Avec une équipe bâtie pour le titre, le club des Hinchas (des Indiens) se retrouve propulsé en Liga Adelante après un nul face au Real Oviedo. Contraint de vendre ses meilleurs joueurs, Santiago se retrouve donc au Real Madrid avec un maillot trop grand pour lui. Successeur désigné de Fernando Redondo, il prend une part prépondérante lors de la conquête de la neuvième Ligue des champions de la Casa Blanca. Par la suite, il sera abonné au banc de touche, d’où son sobriquet de « remplaçant en or » . Un beau gâchis.
Juan Antonio Reyes :
Juan Antonio Reyes est une comète qui n’a pas même eu le temps de flamber. De la pépite de Séville au tricard de Séville, l’Andalou a connu une chute vertigineuse. En 2006-2007, alors en prêt au Real Madrid, il offre pourtant le titre à la Maison Blanche sur un doublé lors de la dernière journée face à l’Osasuna. Bernd Schuster prend alors les manettes du club et n’est pas contre un transfert définitif de Juan Antonio. Avec une forte envie de faire la nique à son voisin hégémonique, c’est l’Atlético qui rafle la mise pour une dizaine de millions d’euros. Bien trop. Car la carrière de Reyes à Vicente Calderón n’est faite que de bas. Chahuté par les socios, pas en odeur de sainteté dans le vestiaire, il file en prêt au Benfica lors de sa deuxième saison avant d’être définitivement renvoyé au bercail sévillan en 2012. Reyes, sans doute la plus belle arnaque du football espagnol.
Juanfran :
C’est le dernier de la lignée. Passé par tous les étages de la Fabrica, Juan Fransisco Torres « Juanfran » n’y aura jamais sa chance. Malgré sept petites apparitions sous le maillot des pros, il fera carrière bien loin de Santiago Bernabéu. D’abord en prêt à l’Espanyol Barcelone, il se pose à l’Osasuna. Après cinq années à Pampelune, il ne résiste pas aux yeux doux de l’Atlético qui l’attire dans ses filets en 2011. Ailier de formation, c’est au poste de latéral qu’il devient un crack – une trouvaille de Diego Simeone. Ses performances de patron lui ouvrent même les portes de la Roja à l’automne dernier. Entré en jeu dans son Vicente Calderón, il se craque dans les grandes largeurs et offre l’égalisation aux Français. Cette boulette mise à part, Juanfran est désormais un pilier du Calderón. Homme de base de Simeone, il espère bien faire la nique au Real Madrid ce vendredi soir. Pour ce qui serait un joli retour du bâton.
Par Robin Delorme, à Madrid