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Top 10 : Histoires de trophées
Le grand soir. À minuit, voire un peu plus, on connaîtra le vainqueur de la 20e édition de la Coupe du monde de football. Quelques minutes plus tard, ce sera au tour de la fameuse cérémonie des trophées. Certains adorent. D'autres trouvent l'instant trop cheap, long ou protocolaire. Retour en dix histoires courtes sur la relation intime qui relie le football et son Graal. Et d'enfin savoir qui a choisi le nom de l'Hexagoal.
1/ La Coupe du monde volée…
Dimanche 20 mars 1966, Westminster Central Hall, en plein cœur de Londres. Quatre mois avant la Coupe du monde, organisée outre-Manche, se déroule la plus grande manifestation de philatélistes du pays. Ce jour-là, le trophée Jules Rimet, sous la surveillance de cinq gardes, est exposé en vitrine aux yeux du public. Aucun risque, donc ? Pas vraiment. Il est midi quand un agent de surveillance découvre que la Coupe du monde a disparu. Ou plus précisément a été volée. En Angleterre, l’incident ne passe pas inaperçu. La police londonienne est rapidement pointée du doigt. Cible de railleries, la Fédération anglaise (FA) de foot voit elle aussi son image écornée. Mais après une semaine d’enquête, le trophée est finalement retrouvé. Non pas par les forces de l’ordre, mais par Pickles, un jeune chien de quatre ans. Furetant dans un bosquet d’un parc londonien, il met la truffe sur un objet enveloppé dans du papier journal. David Corbett, marin d’une barge de la Tamise et maître du cabot, croit d’abord à une bombe, mais décide finalement de jeter un œil. « J’ai vu que c’était une sorte de statuette, racontera-t-il au Guardian en 2006. Une femme tenant une sorte de plat au-dessus de sa tête et sur le socle les noms de l’Allemagne et du Brésil. J’ai vite compris de quoi il s’agissait. Je suis allé voir ma femme, qui n’y connaît rien en sport, et je lui ai dit : « J’ai trouvé la Coupe du monde ! J’ai trouvé la Coupe du monde ! » » Pickles devient alors un héros national. Il joue au cinéma, fait le tour des plateaux TV et fait, bien entendu, de la publicité pour des marques de croquettes. David Corbett de se lécher, lui aussi, les babines : « Je suis devenu son agent. Il me rapportait jusqu’à 60 livres par jour et je lui faisais même boire du champagne. »
2/ … puis revolée !
Quelques années après cette affaire, le trophée Jules Rimet est une nouvelle fois volé au siège de la Fédération brésilienne, à Rio. Ce 19 décembre 1983, quatre hommes d’une favela de la ville, munis de pieds de biche, s’offrent donc un bien inestimable avant d’être arrêtés par la police. Laquelle, cependant, ne remettra jamais la main sur le trophée, qui a probablement été fondu par un orfèvre argentin pour pouvoir être écoulé sur le marché clandestin, selon la police brésilienne. Du côté des voleurs, on peut parler là aussi d’une malédiction : deux seront assassinés quelques années plus tard, l’un deviendra prêtre quand le dernier mourra de problèmes cardiaques en 2003… Un maillot du Brésil sur les épaules !
3/ « Je ne vois personne plus con que lui »
Mythique gardien d’Everton dans les années 80, à l’époque où les Toffees rivalisaient encore avec Liverpool, Neville Southall est peut-être autant connu pour son record de sélections (92) avec le pays de Galles que pour son péché de gourmandise. En fin de carrière – à 41 ans et 178 jours, il devient en 2000 le 4e joueur le plus âgé de l’histoire de la Premier League -, sa balance affichait aisément la barre des cent kilos. A contrario, son compte en banque basculait fréquemment dans le négatif. La faute, entre autres, à un divorce très coûteux. En 2007, afin de payer la pension alimentaire de sa première femme, Neville Southall attaque en justice son propre enfant, Samantha, fille des deux ex-époux, dans le but de récupérer une partie de ses trophées. Oui, le Gallois, en bon père poule, avait offert la plupart de ses médailles à sa progéniture pour l’anniversaire de ses 10 ans. Coût total de cette collection : 70 000 euros ! Verdict : le juge des familles donne raison au père, oblige Samantha à rendre son cadeau d’enfance et la condamne à 7 500 euros de remboursements de frais de justice. En larmes le jour du procès, cette dernière lâche alors en place publique : « Je suis dévastée, je ne sais pas comment je vais payer cette somme… J’idolâtrais mon père ; maintenant je ne vois personne plus con que lui. »
4/ Défaits, ils en oublient la cérémonie des trophées…
« Seules trois personnes ont fait taire le Maracanã : Frank Sinatra, le pape, et moi. » Alcides Ghiggia est une grande gueule, certes, mais les faits parlent pour lui : en 1950, cet attaquant uruguayen de la Celeste crucifie le Brésil lors du dernier match de la Coupe du monde, à Rio. En terre carioca, le traumatisme causé par cette célèbre défaite (2-1), appelée le Maracanaço, prend alors des proportions à peine imaginables aujourd’hui. Des cas de suicides, parfois collectifs, sont constatés par les autorités locales dans les minutes qui suivent le coup de sifflet final. Pendant qu’au stade, abattus par cette défaite inattendue, les officiels brésiliens en oublient la remise des trophées. Le président de la FIFA en personne, Jules Rimet, doit descendre sur la pelouse pour simuler l’acte officiel. « Un silence de désolation dominait dans le stade, décrit-il dans son recueil de souvenirs. Il n’y avait pas de haie d’honneur, ni d’hymne national ou de discours au micro. Même la remise de la coupe n’avait rien de solennel. J’ai retrouvé dans le tumulte le capitaine uruguayen et je lui ai donné la statue en or très discrètement, presque caché. Je n’ai pas dit un mot. »
5/ « Cette coupe, c’est la leur »
Le saviez-vous ? Avec 58% des suffrages, l’Hexagoal est devenu le nom du nouveau trophée de la Ligue 1 suite au concours interactif et participatif lancé par la Ligue professionnelle de football (LFP), en 2007. 23 563 suffrages ont ainsi été enregistrés pour offrir ce doux nom à la plus prestigieuse des récompenses françaises. Raison pour laquelle Fréderic Thiriez, président de la Ligue, répondit un jour aux critiques d’une pirouette pleine de bon sens : « Si le nom et le design de cette coupe sont moches et ne plaisent pas aux gens, qu’ils s’en prennent à eux-mêmes, c’est la leur. » Côté stylisme, en effet, l’Hexagoal a été imaginé et fabriqué par l’artiste franco-argentin Pablo Reinoso, déjà créateur de la Coupe de la Ligue. Un récidiviste.
6/ Mouette, taxidermiste et Feyenoord
Aigles, canaris, faucons et même cygnes : au football plus qu’ailleurs, nombreuses sont les équipes à s’être appropriées des noms d’oiseaux. Rares sont cependant celles à en posséder dans leur salle de trophées. Le 15 novembre 1970, Eddy Treijtel, gardien de but néerlandais de Feyenoord, tue malencontreusement une mouette dans le ciel. Comment ? D’un coup de pied de dégagement lors un match l’opposant aux joueurs du Sparta Rotterdam. Aujourd’hui, l’animal est exposé dans le musée de Feyenoord aux côtés des autres récompenses du club, après qu’un taxidermiste a récupéré, une par une, les plumes laissées sur la pelouse. Depuis tout ce temps, la guerre est cependant déclarée entre les deux clubs. D’un côté, le Sparta Rotterdam estime que le « trophée » est sien puisque l’incident a eu lieu dans son stade ; quand Feyenoord avance l’argument du tueur maison, en la personne de son propre gardien de but. Ce dernier de trancher : « C’est moi qu’on devrait enfermer dans cette cage en verre, comme dans une prison. Je suis un assassin. »
7/ Et il cacha la Coupe du monde sous son lit… Dans une boîte à chaussure !
Ancien président de la Fédération italienne de football, Ottorino Barassi est un héros national. Un statut particulier acquis, entre autres, grâce à ses talents de prestidigitateur : durant tout le long de la Seconde Guerre mondiale, qui a conduit à une interruption de la Coupe du monde pendant douze ans, ce Romain a planqué le trophée Jules Rimet sous son lit, emmitonné dans une boîte à chaussures, afin d’éviter que le régime nazi ne s’en empare. Un pari risqué mais finalement réussi. Jusqu’à ce que les Allemands mettent la main sur le butin quelques années plus tard, mais de manière licite ; en battant la Hongrie en finale du Mondial 1954…
8/ Sergio Ramos fait tomber la Coupe du Roi
« Plus on s’élève et plus dure sera la chute. » Les Chinois ont de ces proverbes que les Espagnols ignorent trop souvent. En 2011, alors que le Real Madrid fête sa victoire en Coupe du Roi dans le centre de la capitale espagnole, Sergio Ramos fait tomber le trophée – 15 kilos, tout de même – du haut du bus décapotable qui trimbale toute son équipe. Roulant à faible allure, le chauffeur du véhicule trouve néanmoins le temps de rouler dessus et d’exploser l’objet en une dizaine de morceaux. Sergio Ramos de tweeter le lendemain matin : « Il y a eu un malentendu au sujet du trophée. Il n’est pas tombé, il a sursauté quand il a vu tant de Madristas l’acclamer. » Vous l’avez ?
9/ La médaille « en chocolat » de Sir Alex Ferguson
Août 2000. Coup de sifflet final. Manchester United remporte le Charity Shield aux dépens de Chelsea, sur le score de deux buts à zéro. En tribune, place désormais à la remise des trophées. Mais Ken Bates, ancien président fou du club londonien, a soudain une meilleure idée, plus amusante, et propose une seconde décoration à Sir Alex Ferguson, alors manager des Red Devils. « J’ai tenté de lui offrir une de mes médailles en plus, explique Bates. Mais il a arraché le ruban bleu, il était très en colère. » « Je ne sais pas ce qu’il voulait, pour être honnête » , révèlera Ferguson quelques années plus tard. Réponse : sur cette médaille « en chocolat » , confectionnée par Bates lui-même, était inscrit : « Cher Fergie, la meilleure chose depuis le pain tranché. »
10/ Porcelaine, Celtic Glasgow et efforts de guerre
75 ans. Une longue période durant laquelle le Celtic Glasgow a patienté pour recevoir un trophée glané au début du XXe siècle. Son nom ? Le vase Ferencváros, plus communément appelé la Coupe Budapest, ville où les Écossais se sont déplacés, en 1914, pour affronter les Anglais de Burnley au terme d’une tournée européenne. Ce soir-là, les deux équipes jouent sous une pluie torrentielle, n’arrivent pas à se départager, mais refusent, en raison de conditions climatiques dantesques, de jouer la prolongation. Après tirage au sort, Burnley remporte finalement le droit d’accueillir le replay. Cette fois-ci, les visiteurs l’emportent, mais ne peuvent recevoir leur trophée. La raison ? Cette breloque a déjà été vendue pour amasser des fonds pour l’effort de guerre. Un deuxième conflit mondial vient ensuite perturber les relations entre le Royaume-Uni et la Hongrie. Avant qu’en 1987, année du centenaire du Celtic, les dirigeants de l’équipe écossaise ne reçoivent, à leur grand étonnement, un vase en porcelaine blanc en provenance de Hongrie. Un message gravé sur son socle : « Nous vous devions quelque chose. Joyeux anniversaire ! »
Par Victor Le Grand